Entretien

Paul Deby, notre talent du mois : “La comédie, c’est une musique que je ressens de manière puissante”

13 octobre 2023
Par Lisa Muratore
Paul Deby.
Paul Deby. ©Lisa Lesourd

Mettre en avant les nouveaux talents de la culture, c’est la mission que s’est donnée L’Éclaireur. Ce mois-ci, coup de projecteur sur le comédien Paul Deby afin de parler de son parcours, de son travail, mais surtout de sa passion pour le septième art qui l’anime depuis l’enfance.

Paul Deby trace doucement mais sûrement sa route sur grand et petit écran, du spin-off de The Walking Dead au futur biopic sur Charles Aznavour, en passant par plusieurs projets comiques. Alors qu’il explose actuellement sur les réseaux sociaux grâce à des pastilles humoristiques, L’Éclaireur a rencontré l’artiste de 29 ans qui a toujours rêvé d’être acteur afin de revenir sur son parcours, ses références et ses objectifs.

Qu’est-ce qui vous a amené au cinéma ? 

Ça vient tout d’abord des films que j’ai pu voir au cours de mon enfance. J’allais régulièrement au cinéma avec ma mère et je pense que j’avais un intérêt particulier pour cet art-là. Le vrai déclic se situe en 2014, quand j’accompagne ma cousine, qui n’est pas du tout comédienne, sur le tournage d’un court-métrage amateur. Je me fais discret, parce que je suis impressionné par tout ce qui se passe. C’était un tournage à petit budget, mais pour moi, ça me semblait être Hollywood. 

Je suis là, j’observe, je vois ces quatre jeunes s’amuser dans leur salon et faire de la comédie. Et moi, c’est tout ce que j’aime : rigoler avec mes potes, me faire chambrer… Il se trouve qu’il leur manquait quelqu’un ce jour-là. Je me suis proposé pour faire la scène et j’ai improvisé. Il y avait aussi tout l’aspect technique avec de belles caméras, un chef opérateur… Cette ambiance était incroyable. Je suis rentré chez moi et je ne faisais que penser au tournage. Je suis tombé instantanément amoureux du métier d’acteur. 

Paul Deby. ©Lisa Lesourd

Comment fait-on pour se faire un nom en tant qu’acteur après une révélation pareille ?

J’ai d’abord cherché à comprendre comment ça fonctionnait, parce que c’est assez complexe au début. À l’époque, j’ai 20 ans, je travaille dans un magasin à Paris et je dis à ma mère que j’ai envie d’apprendre la comédie. Je suis persuadé que je peux faire quelque chose, même si elle me rétorque de finir mes études.  

« Parfois, je regarde en arrière et je me dis que je suis content du chemin que l’on est en train de parcourir avec l’ancien Paul. »

Paul Deby

Il faut savoir que j’ai joué au football américain à très haut niveau. Et l’amour que j’ai eu pour ce sport-là, c’est le même que je ressens aujourd’hui pour le métier de comédien. C’est ça qui m’a rassuré. Je savais que c’était quelque chose qui allait m’accompagner pour longtemps. 

Une fois que j’ai compris comment le métier fonctionnait, j’ai épuisé tous les sites, tous les Facebook, pour me retrouver sur un plateau de tournage à nouveau. J’ai aussi vite compris qu’il fallait trouver un agent et, pour trouver un agent, il faut avoir des images à lui montrer, ce qui veut dire aller sur des tournages à petit budget. À la même époque, je rencontre également des gens de YouTube, qui me font tourner. Ça m’a donné l’opportunité d’avoir les images. Tout s’est fait étape par étape. 

Comment vit-on petit à petit ce passage vers la lumière ? 

J’essaie de repenser souvent au chemin que j’ai parcouru, parce que c’est vrai que l’on s’habitue assez vite à tout. On peut oublier à quel point ça a été dur et long avant. Je ne suis pas du tout arrivé là où je veux être, mais quand je compare avec 2015-2016 – quand j’envoyais 150 mails par jour pour faire de la figuration –, on en est loin aujourd’hui. Parfois, je regarde en arrière et je me dis que je suis content du chemin que l’on est en train de parcourir avec l’ancien Paul. 

Quelles sont vos références cinématographiques ? 

C’est une question complexe, car j’ai toujours ce débat avec moi-même : je voudrais répondre quelque chose de très cinéphile, mais comme j’ai eu cette révélation dans les années 2000, j’ai tendance à citer un film qui correspond avec la découverte de cette passion, et c’est Interstellar, de Christopher Nolan. Ce film n’a fait que consolider mon envie d’être acteur. Même s’il est tombé dans la pop culture, ça reste un film qui a beaucoup compté pour moi.

Bande-annonce d’Interstellar.

Je pense aussi aux AffranchisCasino, et Heat qui m’ont marqué durant mon adolescence. J’aime aussi beaucoup Elephant ; j’avais eu un vrai choc avec les plans-séquences. Côté acteurs, je peux citer évidemment Christian Bale, Matthew McConaughey, Tom Hardy, Robert de Niro, Daniel Day-Lewis, Dustin Hoffman, Jim Carrey… Des grands noms américains avec lesquels j’ai grandi, finalement.

En parlant de production américaine, que retenez-vous de votre expérience sur le tournage de la série spin-off de The Walking Dead ? 

C’était exceptionnel ! Je n’ai eu qu’un rôle dans le premier épisode, mais c’était trois jours de tournage incroyables. Ce que je retiens, en vérité, par rapport aux tournages français que j’ai faits, c’est que tout est plus gros. Il y a plus de budget, les postes sont doublés. C’est aussi très professionnel, tellement carré. En tant que comédien, tout est mis en œuvre pour que l’on ne pense qu’à une chose : jouer. Si on veut viser l’excellence, il faut gommer les choses parasites et se concentrer sur la tâche que l’on a. Les Américains ont compris ça. Ils étaient très forts dans l’anticipation. Tout était mis en œuvre pour qu’on soit prêt le jour J. On devait être 150 sur le plateau, ça va très vite.

Puisque l’on parle de coulisses, quel souvenir gardez-vous des tournages français ?

Chaque tournage que j’ai eu l’opportunité de faire en France a été humain. J’ai eu la chance de tomber sur des équipes incroyables. Parmi les tournages auxquels j’ai participé, je retiens l’un des derniers que j’ai faits pour un film qui s’intitule Un stupéfiant Noël d’Arthur Sanigou, qui est un ami réalisateur et scénariste. J’ai eu 15 jours de tournage et je me suis vraiment senti impliqué. C’était un plaisir fou du premier au dernier jour. J’ai vraiment fait partie d’une aventure, à la différence de The Walking Dead.

Je pense aussi à Stalk, que l’on a tourné il y a trois ans. C’était mon deuxième rôle, mais c’était le premier tournage où j’avais un rôle assez important. J’ai rencontré des comédiens de mon âge, j’étais vraiment considéré dans une équipe. 

Quelle importance votre court, Les Rêves lucides, qui a gagné le prix du public au dernier Nikon Film Festival, occupe-t-il dans votre parcours ? 

J’ai de la chance que tout se passe bien ; j’ai la chance que les choses se suivent de manière logique. Les Rêves lucides arrive à un moment où ça faisait déjà trois ans que je faisais des pastilles sur les réseaux, des très courts-métrages que je postais sur Instagram. J’avais déjà tenté l’aspect court-métrage au Nikon Film Festival deux fois. Ça n’avait rien donné, mais je me décide finalement à y participer une troisième fois. 

On se motive avec un ami à postuler 12 jours avant la remise des courts-métrages. Au final, la pastille sur les rêves devient ce court-métrage, on s’applique. À l’époque, je suis dans une période de creux, mais je veux vraiment aller chercher les choses. Je me dis que ça ne va pas tomber tout seul. Des mois après, on finit par recevoir le prix du public. C’était complètement fou. 

On ne pensait pas le gagner. Le jour J, on était là car on avait été sélectionné dans le catalogue Brut X. On a aucune idée à ce moment-là que l’on va repartir avec le prix du public. C’est le premier prix remis par Gilles Lellouche. C’est une sensation qui marque à vie. Ça a été un vrai moteur pour moi ! Depuis, tout s’est enchaîné, je n’ai vécu que des belles choses. 

Ce court-métrage a-t-il réveillé en vous une envie de scénariser et de diriger un long-métrage à l’avenir ? 

Ça m’a autocrédibilisé. Je me suis rendu compte que j’étais capable de gagner quelque chose dans un festival. Désormais, je peux aller chercher l’étape supérieure ; celle de faire un long-métrage ou une série. Je tente l’écriture depuis 2021. Quant à la réalisation, ça a toujours été quelque chose qui me passionne, car j’ai toujours réalisé mes petites pastilles. 

Partir sur un film ou une série, c’est une autre galaxie, mais Les Rêves lucides, ça a été un déclencheur, car c’est grâce à ça que j’ai rencontré le réalisateur d’Un stupéfiant Noël, Arthur Sanigou. Ça a été un coup de cœur amical et professionnel. Il a un bagage scénaristique fou, il m’a vraiment épaulé, il m’a appris énormément de choses et, à l’heure actuelle, nous sommes en train de développer une série comique.  

Pourquoi la comédie est un genre qui vous passionne autant ? 

Depuis que je suis tout petit, j’aime faire rire les gens. J’ai toujours été le petit gars en classe qui à la moindre occasion voulait faire rire ses camarades. C’est en moi, c’est une musique que je ressens de manière plus puissante que les autres registres. Je suis à l’aise avec le drame, bien sûr, mais j’ai l’impression d’avoir développé une sensibilité plus accrue à la comédie – à l’écriture et dans la compréhension.

On ressent un naturel dans la comédie, qui se voit également sur vos réseaux sociaux. 

Sur Instagram, pendant longtemps, mes premiers contenus, c’était plutôt des pastilles et des courts-métrages. C’était beaucoup de travail. Au même moment, en story, je faisais les mêmes contenus humoristiques que je fais aujourd’hui. Ça disparaissait au bout de 24h, je n’avais pas envie de publier parce que ce n’était pas qualitatif. J’avais envie d’être comédien, donc je faisais attention à ce que je postais. Mais le déclic arrive le soir du Nikon Film Festival : je tourne une vidéo, je la poste avant de rentrer dans le Grand Rex, mais, comme le réseau était très mauvais, ce n’est que quand je sors que je vois que la vidéo a explosé. 

Les gens venaient de capter mon délire. Je me suis dit qu’il y avait peut-être quelque chose à creuser, et je me décide à en poster deux autres, avant que ça buzz vraiment en août dernier avec une vidéo qui change tout, et qui est partagée par Ragnar le Breton, Jérôme Niel… À partir de là, je me suis pris au jeu, je poste de façon pérenne sur mon feed, car je me dis que je gagne à être connu. Je suis très content, ça me demande moins de travail, même si à côté je continue de poster des contenus plus qualitatifs. Je reviens avec des projets de dingues, de la fiction très bien réalisée et je vais alterner entre l’improvisation des stories et des contenus plus travaillés. 

Quel est le rôle qui vous fait rêver ?

Je pense que c’est celui d’un astronaute. Ça va vient forcément de mes influences comme InterstellarSeul sur Mars ou Ad Astra. C’est mon fantasme qui parle, mais à jouer en lui-même, il ne faut pas oublier que c’est beaucoup de studio et de fonds verts. Je pense qu’il faut être un excellent acteur pour pouvoir interpréter ce genre de rôle, car il n’y a absolument rien de concret auquel se raccrocher.

Plus jeune, je rêvais des rôles de Ray Liotta dans Les Affranchis ou de Jim Carrey dans le Truman Show. J’aurais aimé jouer dans Le Dîner de con et jouer le con, pour tout l’aspect comique !

Bande-annonce de Seul sur Mars.

Avec quel acteur ou quelle actrice rêveriez-vous de travailler ? 

J’aimerais tourner avec Pierre Niney. Il m’étonne dans chacun de ses rôles. Récemment, j’ai vu Le Livre des solutions de Michel Gondry, il est excellent dedans, il fait de très bons choix. J’adorerais aussi travailler avec François Civil et avec Gilles Lellouche. J’aime beaucoup Daniel Auteuil, Michel Blanc et Albert Dupontel. J’avais adoré Au revoir là-haut, je me souviens de la claque que j’avais prise. J’adore Marina Foïs, Agnès Jaoui, Camille Cottin également. Je pense aussi Hafsia Herzi et Juliette Binoche. 

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Comment vous préparez-vous à vos rôles ? 

Honnêtement, je pense que je n’ai pas eu assez de gros rôles pour pouvoir faire un vrai travail de préparation, mais sur le dernier film que j’ai fait, le biopic sur Charles Aznavour de Grand Corps Malade et de Medhi Idir, j’interprète un metteur en scène dans les années 1930. Je n’ai qu’une grande scène, mais j’avais envie de bien faire. Je me suis informé et documenté sur leur manière de parler et de bouger. Pour le texte, j’ai essayé d’être plus que prêt le jour J. Tout ce que je peux contrôler, j’essaie de le préparer un maximum et de m’imprégner de l’ambiance. J’attends aussi beaucoup de la direction d’acteurs. J’essaie de discuter avec le réalisateur et de m’accorder à sa vision. 

Quelles sont vos dernières pépites culturelles ? 

Récemment, j’ai adoré un manga qui s’appelle The Fable, c’est fou ! Côté musique, j’adore Myth Syzer qui a sorti un album il n’y a pas très longtemps, Poison. C’est un beatmaker qui rappe et j’adore son univers !

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Article rédigé par
Lisa Muratore
Lisa Muratore
Journaliste