Conclave : le film avec Ralph Fiennes est-il réaliste ?

Conclave connaît une seconde vie exceptionnelle. Depuis le décès du Pape François, le long-métrage réalisé par Edward Berger (À l’ouest rien de nouveau) avec Ralph Fiennes et nommé plusieurs fois aux Oscars bat des records sur les plateformes de VOD et ressort même dans certains cinémas pour quelques séances exceptionnelles.

Revenant sur la désignation d’un nouveau Pape suite au décès du précédent souverain pontife, Conclave montre les coulisses de cette succession alors que les cardinaux se réunissent tous sans contact avec le monde extérieur — cum clave : « sous clé » — pour voter et élire le nouveau chef de l’Église catholique après plusieurs délibérations. Si Conclave permet donc de découvrir l’intérieur de cette élection, le film correspond-il pour autant à la réalité et à ce qui se passera à partir du 7 mai prochain ?

Actuellement, les 135 cardinaux électeurs (soient ceux de moins de 80 ans) sont tous arrivés à Rome, mais ne sont pas encore isolés du monde extérieur. Comme dans une sorte de pré-conclave, ils prennent le temps de se rencontrer et de se connaître avant que la phase effective du vote ne commence. 

Quelles différences entre le film et la réalité ?

Outre les délibérations et les votes, Conclave prend le temps de montrer toutes les coutumes entourant le décès du Pape. Lors de l’introduction du film, la chambre du Pape est ainsi scellée, avec un sceau apposé sur la porte. Une représentation exacte de la réalité, la chambre du Pape François ayant été effectivement verrouillée suite à son décès.

Comme montré dans le film, les cardinaux seront bien isolés, sans pouvoir accéder au monde extérieur et sans accès à leurs téléphones, ordinateurs, télévisions ou même journaux. Des mesures strictes de sécurité sont prises pour que les échanges à l’intérieur de la chapelle Sixtine ne soient pas ébruitées. De son côté, le personnel présent qui ne participe pas à l’élection doit également prêter serment et respecter le caractère secret du vote, sous peine d’excommunication. Deux séances de votes de deux tours ont lieu chaque jour et comme dans le film, la fumée noire ou blanche annonce si les cardinaux ont désigné un nouveau Pape.

Dans Conclave, l’accent est mis sur l’opposition entre les cardinaux conservateurs et ceux considérés comme plus progressistes — notamment plus ouverts sur les sujets tels que homosexualité, le divorce ou l’avortement. Une scission qui correspond à la réalité au sein de l’Église, bien que le film accentue grandement cette opposition à des fins narratifs. Si des différences de point de vue existent, le conclave doit élire le Pape avec les deux tiers des voix : un consensus est plus ou moins vite atteint.

L’autre grande surprise du film concerne l’apparition d’un cardinal nommé en secret par le Pape, qui exercerait à Kaboul en Afghanistan. La nomination secrète de certains cardinaux a déjà eu lieu. Il s’agit de la pratique in pectore (« dans le secret du cœur »), réalisée pour des mesures de sécurité. Les cardinaux nommés en secret exercent généralement dans des zones de conflit et leur mise en lumière pourrait les mettre en danger. Néanmoins, dans le cas d’un conclave, les spécialistes s’accordent à dire que la venue impromptue et soudaine d’un cardinal secret est peu envisageable. Avant toute participation à un conclave, les cardinaux doivent avoir fait l’objet d’un consistoire, soit la réunion du Pape et d’autres cardinaux entérinant la nomination des nouveaux cardinaux. Certains peuvent donc être connus seulement du Pape lui-même, mais ils pourraient difficilement participer à l’élection du nouveau souverain.

Conclave s’approche ainsi grandement de la réalité tout en s’octroyant certaines libertés nécessaires pour développer le propos du film et ses différents enjeux dramatiques. Alors que le véritable conclave doit se tenir à partir du 7 mai prochain, le film avec Ralph Fiennes permet de saisir et de comprendre les grandes lignes entourant la succession du Pape.