Diffusée depuis le 26 décembre sur la plateforme, la saison 2 de la production sud-coréenne enregistre des audiences records. Un succès qui s’explique notamment par un scénario au message politique fort.
Après trois ans d’attente, Squid Game fait un retour (très) remarqué. Dévoilée le 26 dernier, la saison 2 rencontre un succès fulgurant, enregistrant 68 millions de vues au cours de ses quatre premiers jours de disponibilité – et 487 millions d’heures ce 2 janvier. Des chiffres records, qui font de cette production sud-coréenne la série ayant réalisé le meilleur démarrage de l’histoire de Netflix, devant Mercredi.
Une réussite méritée, qui repose essentiellement sur une histoire simple, mais très efficace. En effet, le show met en scène 456 joueurs qui s’affrontent durant des épreuves inspirées de jeux d’enfants pour remporter 45,6 milliards de wons (environ 30 millions d’euros). Les gagnants passent au niveau supérieur, et les perdants sont éliminés – comprendre : tués. Ddakji, Un, deux, trois, soleil, dalgona… Ces pratiques enfantines existent bel et bien en Corée, mais qu’en est-il réellement de l’histoire au cœur de la série ?
Fragments de vie
Le réalisateur du show, Hwang Dong-hyeok, est connu pour s’inspirer du réel. Son long-métrage My Father (2007), qui s’intéresse à un homme à la recherche de son père biologique, est tiré de l’histoire d’Aaron Bates, le film Silenced (2011), qui dénonce les abus sexuels subis par des enfants sourds, se base sur une affaire glaçante et bien réelle, et The Fortress (2017) décrit un événement historique concernant un roi de Corée du XVIIe siècle. Autant d’éléments qui nous poussent à croire que Squid Game pourrait être tiré d’une histoire vraie.
Dans les faits, aucune compétition mortelle de ce genre n’a été organisée en Corée. En revanche, Hwang Dong-hyeok a révélé à Variety avoir lu « beaucoup de comics » et avoir été « fasciné par les jeux de survie ». « Je voulais écrire une histoire qui soit une allégorie ou une fable sur les sociétés capitalistes modernes, quelque chose qui décrive la compétition extrême, a-t-il détaillé au média américain. Mais je voulais des personnages que nous avons tous croisés dans la vie de tous les jours. »
Ainsi, un article de l’Agence France-Presse (AFP) révèle que les héros de la série font écho à la vie du cinéaste. Tout comme Sang Woo, le réalisateur est diplômé d’une prestigieuse école, mais a connu des problèmes financiers, il a été élevé dans la pauvreté par une mère veuve, à l’image de Gi-hun, et il a conçu le personnage d’Ali (un travailleur pakistanais sans papier, maltraité par son employeur) à partir de personnes bien réelles rencontrées durant sa première expérience à l’étranger.
La lutte continue
Au-delà de la vie de l’artiste, Squid Game fait aussi référence à des événements qui ont marqué les Coréens, comme la crise financière asiatique de 1997 ou l’occupation de l’usine Ssangyong Motor en 2009. « En faisant référence à ces licenciements, […] je voulais montrer que n’importe quel individu de la classe moyenne, dans le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui, peut tomber au bas de l’échelle économique du jour au lendemain », a confié Hwang Dong-hyeok à l’AFP.
L’entreprise, qui était en difficulté, avait été reprise par un consortium de banques et d’investisseurs privés et avait licencié plus de 2600 personnes – soit près de 40 % du personnel. Après cette annonce, l’usine a été occupée, et les employés ont maintenu une grève durant 77 jours – qui s’est soldée par de violents échanges avec les policiers.
Après les événements, plus de 200 ouvriers ont fait l’objet de poursuites, une centaine a été emprisonnée, et une trentaine se serait suicidée. La précarité de cette classe moyenne et la possibilité d’une chute économique soudaine ont marqué le réalisateur, qui décrit parfaitement ces situations dans Squid Game.
Allégorie des dérives du capitalisme contemporain, la série met en lumière les inégalités sociales et les sacrifices auxquels sont contraints les individus pour échapper à la misère, et dans ce contexte, ces jeux brutaux symbolisent la lutte acharnée pour la survie dans un système économique impitoyable. Puisant son histoire dans des événements bien réels, le show a ainsi inspiré de nombreux divertissements, comme la fiction The 8 Show ou encore l’émission de téléréalité Beast Game, pilotée par le youtubeur le plus suivi du monde.