L’année 2023 a propulsé l’intelligence artificielle générative sur le devant de la scène mondiale. Phénomène incontournable de l’année, cette technologie captive non seulement l’imagination collective, mais redéfinit aussi les frontières du possible dans divers secteurs.
Douze mois qui ont été particulièrement fastes pour l’intelligence artificielle. Nouveau « buzz word » en vogue, elle est sur toutes les lèvres et semble toucher tous les domaines ou presque. Retour sur une année 2023 marquée par une explosion d’innovations en la matière. Des avancées spectaculaires qui se sont aussi accompagnées de débats éthiques profonds et de discussions autour des transformations socio-économiques que l’IA générative va provoquer. Une ascension fulgurante qui n’est pas sans remous.
Flashback. Nous sommes le 30 novembre 2022 et OpenAI s’apprête à bouleverser la scène Tech mondiale. Alors que la hype autour du métavers, du Web3, des cryptos et autres blockchains sombre aussi vite que le cours du Bitcoin, le robot conversationnel ChatGPT fait son apparition. Le succès est foudroyant : 1 million d’utilisateurs en cinq jours, 100 millions en deux mois.
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Les chiffres vertigineux s’enchaînent, que vient confirmer l’investissement XXL de Microsoft dans OpenAI en janvier 2023 : 10 milliards de dollars pour prendre 49 % des parts de la startup californienne. ChatGPT a lancé la folie de l’IA générative, mais l’outil est bien vite rejoint par pléthore de services dans le même esprit.
L’IA à toutes les sauces, partout, pour tout
En février 2023, seulement deux mois après le lancement de ChatGPT, la concurrence réplique avec ses propres IA génératives : Google lance Bard, Meta annonce LLaMA… Mais l’innovation ne se limite pas qu’au texte. Côté visuel, DALL-E, également créé par OpenAI en janvier 2021, s’améliore à vitesse grand V. Il faut dire que la compétition est rude avec, en face, Midjourney et Stable Diffusion, notamment. Adobe (Photoshop, mais pas que) et Canva suivent rapidement et intègrent vite, parfois maladroitement, des outils d’IA générative dans leurs services.
Preuve de cette progression dans le rendu visuel réaliste, en mars 2023, une fausse image du pape François habillé en doudoune blanche gonflée comme jamais fait le buzz sur les réseaux sociaux. On voit aussi apparaître un visuel plus vrai que nature d’Emmanuel Macron ramassant des poubelles. Fake aussi. Mais le résultat est trompeur. Et fait peur.
Dans la foulée, en mai, une grande partie des scénaristes de Hollywood entame une grève qui durera de longs mois. S’ils réclament une hausse des salaires, ils veulent aussi obtenir des studios de production de séries et de films la garantie que l’IA ne sera pas utilisée pour écrire le prochain blockbuster.
Dans le même temps, les géants de l’IA sont convoqués à la Maison-Blanche pour s’engager sur le sujet de la sécurité. Le but est de mettre en place des garde-fous pour éviter les dérapages dangereux (questions éthiques, données privées, désinformation, manipulation de l’opinion, arnaques…).
Mais, en parallèle, la folie IA continue à gagner du terrain : à la rentrée, Snapchat et TikTok intègrent des fonctionnalités alimentées par IA. Et HeyGen fait le buzz avec sa solution permettant de rendre n’importe qui polyglotte en traduisant ce qui se dit en simultané tout en synchronisant le mouvement des lèvres. Troublant… et diablement efficace.
Un raz de marée pour le marché du travail… et des questions éthiques
En entreprise aussi, le phénomène prend de l’ampleur. Microsoft, grâce à son étroite collaboration avec OpenAI, commence à intégrer l’IA dans nombre de ses logiciels (Teams, la suite Office) puis annonce l’arrivée d’un chatbot dédié au travail collaboratif, Copilot. Véritable compagnon de travail, il est censé fluidifier les flux de projets.
Google a lui aussi intégré sa solution dans Workspace et OpenAI propose ses outils en version intégrable. La firme de Sam Altman ajoute aussi peu à peu de nouveaux services. Comme la possibilité de créer son propre ChatGPT qu’une entreprise (ou un particulier) peut personnaliser à loisir avec ses réglages et en se basant exclusivement sur des données fournies.
Mais l’accélération de l’adoption de l’IA dans tous les domaines ou presque de la société soulève des questions fondamentales sur la propriété intellectuelle, l’authenticité et la véracité des informations, ainsi que sur les implications pour la vie privée et la sécurité des données. Alors que l’IA est capable de produire des œuvres d’art, de la musique, et même des textes d’une complexité et d’une précision stupéfiantes, la distinction entre création humaine et création artificielle devient de plus en plus floue.
Cela nous pousse aussi à réfléchir sur la valeur que nous accordons au travail créatif et sur les mécanismes de rémunération équitable des créateurs. Face à ces défis, l’élaboration de cadres réglementaires et éthiques robustes est impérative pour garantir que le développement de l’IA générative se poursuive de manière responsable, transparente, et bénéfique pour l’ensemble de la société.
La musique, le prochain grand bouleversement ?
Cela reste encore un pan où l’IA générative reste timide. Mais cela pourrait changer du tout au tout en 2024. Début novembre 2023, Paul McCartney dévoile un morceau inédit des Beatles intitulé Now and Then. Un tour de force rendu possible grâce à l’IA. À la base, un enregistrement de John Lennon qui remonte à 1978 et la guitare de George Harrison enregistrée en 1995. C’est l’intelligence artificielle qui s’est chargée d’améliorer la qualité de l’enregistrement audio de sa voix. Une voix devenue « claire comme du cristal » après l’intervention de l’IA à en croire Paul McCartney.
Des IA sont aussi capables de plagier de manière très efficace les styles de certains artistes dans l’écriture de texte ou encore de cloner la voie (la chanteuse Angèle par exemple, en a fait les frais). La voix de l’artiste belge a été posée sur le hit Sayan de Gazo et Heuss l’Enfoiré par le beatmaker Lnkhey. Il s’est aidé pour cela du logiciel RVC. Réaction d’Angèle sur les réseaux sociaux : « Je ne sais pas quoi penser de l’intelligence artificielle, je trouve que c’est une dinguerie, mais en même temps, j’ai peur pour mon métier ! »
Enfin, en novembre dernier, Google a dévoilé Lyria. Cette IA générative est capable de générer de la musique synthétique (chants et instruments) à loisir. Une aubaine en vue d’intégrer l’outil à YouTube. À la clé : une bibliothèque infinie d’ambiances musicales pour les créateurs qui veulent améliorer leurs vidéos. Et pour Google, le gros avantage de ne plus avoir à payer de droits d’auteur aux artistes…