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Test de Fox n Forests : le Roman de Renart en pixel art

28 mai 2018
Par Valérie Précigout (Romendil)
Test de Fox n Forests : le Roman de Renart en pixel art

En résumé

S’affranchissant du temps qui passe autant que du rythme inaltérable des saisons, Fox n Forests démontre que le jeu vidéo se moque bien des règles lorsqu’il œuvre pour la bonne cause. En dépit d’une construction imposant d’innombrables revisites qui ne masquent que maladroitement la faible densité de son contenu, ce platformer old school possède tout de même de solides arguments pour nous convaincre de lui laisser sa chance.

Note technique

Les plus et les moins

Les plus
  • Toutes les astuces de gameplay liées aux saisons
  • La réalisation avenante en pixel art
  • L'arbalète du renard et sa palette de talents évolutifs
  • Quelques phases de shoot'em up exigeantes
  • Un 100 % qui se mérite, avec un challenge toujours progressif
  • La petite surprise de fin de jeu
Les moins
  • Une progression qui impose la collecte des bonus cachés
  • Des potions magiques très peu utiles
  • Une traduction française parfois hasardeuse
  • Trop d'allers-retours car pas assez de niveaux différents
  • Moins de six heures de jeu pour voir les crédits

Notre test détaillé

Fruit d’une campagne Kickstarter réussie, Fox n Forests vient jouer les madeleines de Proust avec l’intention manifeste de nous ramener à l’ère des jeux de plate-forme 16 bits salués pour leur réalisation 2D enchanteresse. Dans la veine d’un Mr. Nutz ou d’un Magical Quest, ce projet rétro fait souffler une brise de nostalgie envoûtante sur nos machines de jeu.
(Ce test a été réalisé sur Nintendo Switch.)

Comme en hommage au célèbre Roman de Renart auquel Fox n Forests emprunte le même goupil rusé en guest star, la narration de ce titre aux pixels chatoyants nous intrigue d’emblée par son écriture en vers. En dépit d’une traduction française hasardeuse, les rimes nous révèlent ainsi les prémices d’un drame qui se noue en plein cœur de la forêt, lorsqu’une perdrix grassouillette et bavarde convainc son prédateur à poils roux d’embrasser un destin plus ambitieux que celui de simplement garnir son ventre : terrasser les forces du mal. Alléché par les récompenses promises, Rick le renard décide de mettre temporairement de côté ses besoins primaires pour suivre les conseils de Patty la perdrix, et s’élance ainsi à la recherche des quatre morceaux d’écorce magique dérobés par de viles créatures au vénérable gardien des saisons.

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L’oracle des saisons

Si l’on vient d’abord à Fox n Forests par attrait pour sa réalisation avenante en pixel art, c’est bien vite la magie de ses mécaniques liées aux saisons qui nous retient dans son univers. Dans l’esprit d’un jeu tel que The Legend of Zelda: Oracle of Seasons, le titre développé par Bonus Level ne se contente pas d’appliquer la formule ancestrale du jeu de plate-forme au travers de décors remodelés au gré des saisons. Il articule bel et bien toutes ses routines de gameplay autour de cet élément pour nous inviter à contrôler nous-mêmes l’alternance des quatre saisons, dans le but de façonner l’environnement selon notre convenance.

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Dans les limites d’une jauge conçue pour nous permettre de faire basculer chaque niveau dans une saison alternative durant une période limitée, le titre multiplie les transformations visuelles liées à la résolution de chaque problématique rencontrée. L’hiver permettra par exemple de geler un lac pour se déplacer par-dessus, tandis que le printemps rendra possible le franchissement d’une chute d’eau, une fois libérée de la glace. Les feuilles d’automne pourront faire office de ponts de fortune pour nous aider à virevolter au-dessus des gouffres, et seul un jonglage avisé entre les différentes saisons nous conduira jusqu’à l’accomplissement de notre quête.

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Exhaustivité de rigueur

À ces intéressantes trouvailles de gameplay s’ajoutent les idées relatives à la palette de talents évolutifs du renard, ainsi qu’à l’utilisation des différents modes de tir de l’arbalète. Le simple projectile de départ laisse en effet rapidement place à des rafales de carreaux aux trajectoires variables qui non seulement s’adaptent à une adversité de plus en plus retorse, mais sont également le seul moyen d’activer certains mécanismes débouchant sur des bonus cachés. On touche ici à un point essentiel de Fox n Forests, qui s’efforce de compenser le caractère famélique de sa carte du monde par l’impossibilité de débloquer les niveaux suivants sans une recherche minimale des graines magiques dissimulées dans chaque saison. L’idée est simple : puisque le joueur voit ses capacités renforcées au fil de sa progression, il doit nécessairement retourner dans les niveaux déjà terminés pour découvrir ce que ses nouvelles aptitudes peuvent lui révéler.

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Les contes du chat perché

À la différence de la quasi-totalité des titres du genre, Fox n Forests ne mise donc pas sur une recherche facultative des bonus cachés, puisque c’est tout simplement obligatoire, ce qui implique d’inévitables allers-retours pouvant s’avérer rapidement fastidieux. Même s’il n’est pas nécessaire de mettre la main sur la totalité des secrets du jeu pour en voir le bout, on peut regretter que ces revisites imposées ne servent finalement qu’à masquer le faible nombre d’environnements proposés, avec des niveaux à rallonge que l’on aurait préféré voir subdivisés en plusieurs étapes accessibles indépendamment les unes des autres. De temps à autre, Fox n Forests tente tout de même de briser la routine en incluant quelques phases de shoot’em up à dos de perdrix. Exigeantes, car n’autorisant pas la moindre erreur de contrôle, ces séquences ont hélas tendance à virer un peu trop au « par cœur », avec des collisions fatales favorisées par le manque de distinction entre les vrais obstacles et les simples plans différentiels constituant les décors. Ce qui ne change pas, en revanche, c’est la présence récurrente du blaireau grippe-sou qui ne délivre ses fonctions de « garde checkpoint » qu’en échange d’un droit de passage, ce même argent pouvant servir à renforcer les capacités offensives et défensives de maître renard.

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C’était mieux avant

Une fois passée la surprise des métamorphoses liées aux saisons, Fox n Forests donne finalement le sentiment de ne livrer qu’une expérience de jeu incomplète, comme si la campagne de financement participatif n’avait pas permis d’étoffer son contenu autrement que par le rajout de potions magiques largement dispensables. Assurément à l’ancienne, les confrontations avec les boss laissent elles aussi une impression assez mitigée, les subtilités relatives à leur résolution étant contrebalancées par la rapidité avec lesquelles ces imposants gardiens trépassent. Court, mais déjà redoutable dans son niveau de difficulté intermédiaire, Fox n Forests constitue tout de même une belle étape à franchir pour les joueurs ayant entamé un pèlerinage nostalgique à travers les âges vidéoludiques.

Conclusion

S’affranchissant du temps qui passe autant que du rythme inaltérable des saisons, Fox n Forests démontre que le jeu vidéo se moque bien des règles lorsqu’il œuvre pour la bonne cause. En dépit d’une construction imposant d’innombrables revisites qui ne masquent que maladroitement la faible densité de son contenu, ce platformer old school possède tout de même de solides arguments pour nous convaincre de lui laisser sa chance.

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