Test

Test de The Sinking City : De Conan Doyle à Lovecraft

04 juillet 2019
Par Valérie Précigout (Romendil)
Test de The Sinking City : De Conan Doyle à Lovecraft

En résumé

Dans une démarche assez proche de celle entreprise par Cyanide avec Call of Cthulhu, The Sinking City promettait une enquête tourmentée sur fond d’hystéries lovecraftiennes. Manette en main, le titre révèle cependant vite ses lacunes, mais cela ne doit pas vous empêcher de venir percer les mystères de son intrigue si son austérité générale ne vous rebute pas.

Note technique

Les plus et les moins

Les plus
  • L'influence palpable de l’œuvre de Lovecraft
  • Trouver soi-même l'emplacement des objectifs sur la carte
  • L'idée de recouper les indices dans les salles d'archives
  • Des conclusions alternatives en fonction des déductions choisies
  • Présence de missions secondaires pour renforcer la durée de vie
Les moins
  • Techniquement fragile, à tous les niveaux
  • Davantage calibré pour l'aventure que pour l'action
  • Énigmes et reconstitutions un peu simplistes
  • Les troubles mentaux sont sous-exploités
  • Pourquoi imposer le doublage français ?

Notre test détaillé

Spécialisé dans les enquêtes de Sherlock Holmes depuis le début des années 2000, le studio Frogwares s’inspire à présent de l’ensemble de l’œuvre de H.P Lovecraft pour dévoiler au grand jour The Sinking City, un titre qui ne remplit malheureusement pas toutes ses promesses.
(Ce test a été effectué sur PlayStaiton 4.)

Bien résolu à déterminer l’origine des sinistres visions qui le hantent, le détective Charles Reed décide de faire une virée dans le Massachussetts pour inspecter la ville fictive d’Oakmont en proie à des phénomènes inexpliqués. Depuis quelque temps, nombre d’individus sujets à de violentes crises d’hystérie s’y sont donné rendez-vous, comme attirés par une force invisible. Nous sommes dans l’Amérique des années 20 et le cadre se veut fortement imprégné d’une ambiance malsaine que n’aurait probablement pas reniée l’auteur de L’Appel de Cthulhu. Rien d’étonnant à cela dans le sens où les créateurs de The Sinking City revendiquent justement l’influence de Lovecraft sur tout ce qui touche à l’écriture du jeu.

The Sinking City

© BigBen / capture d’écran

Comme à Venise, ou presque

La particularité de la ville fictive d’Oakmont est de se traduire par un environnement ouvert partiellement inondé qu’il nous faut explorer en empruntant des canots de fortune afin de franchir les zones submergées qui condamnent certaines de ses rues. Si l’on peut accorder au titre une direction artistique plutôt réussie en dépit d’ambiances qui se répètent un peu trop, quels que soient les différents quartiers explorés, The Sinking City reste tout de même techniquement fragile. Outre une animation globale des individus très sommaire, y compris dans les expressions faciales, le jeu souffre de nombreux ralentissements présents même en dehors des phases d’action, et certains modèles de PNJ sont réutilisés à plusieurs reprises pour des personnages différents. L’ambiance n’est pas non plus aussi oppressante qu’attendu et le bestiaire peine à générer des frissons d’angoisse autrement qu’à travers le risque d’entamer notre jauge de vie.

The Sinking City

© BigBen / capture d’écran

La peste soit de ces malbêtes !

Davantage calibré pour l’aventure que pour l’action, The Sinking City ne gagne finalement pas grand-chose à nous confronter à une adversité ponctuelle en vue à la troisième personne. Même si l’on n’est que rarement confronté à ces créatures hostiles baptisées « malbêtes », surtout lors des premières heures de jeu, les phases d’action se contentent du minimum syndical dans leur concrétisation. La fuite reste d’ailleurs le plus souvent la meilleure option dans l’optique d’économiser nos munitions et autres seringues de soin, sachant que le titre abrite sa propre logique d’artisanat et de développement de compétences. Dans les faits, le manque d’efficacité de ces scènes d’action nous incite tout de même à éviter au maximum les confrontations inutiles, en restant à distance des zones infestées très justement marquées d’une tête de mort sur le plan de la ville.

The Sinking City

© BigBen / capture d’écran

Élémentaire, mon cher Reed

Ces dernières années, les jeux vidéo nous ont tant habitué à nous prendre par la main que le choix de The Sinking City de nous guider le moins possible dans son cheminement s’avère parfois presque déstabilisant. En vérité, l’absence de marqueurs évidents sur la carte est une très bonne chose, le titre nous obligeant à déduire par nous-mêmes l’emplacement théorique des preuves à l’aide des informations récoltées. Propre aux sens aiguisés de notre détective, le recours à l’œil de l’esprit est par ailleurs souvent le seul moyen de mettre en évidence la manière dont certains drames ont pu se dérouler. Cela donne alors lieu à des phases de reconstitution un peu simplistes dans lesquelles il convient de réordonner les étapes des différents faits qui se sont déroulés dans le passé.

The Sinking City

© BigBen / capture d’écran

Dans le même ordre d’idées, il est souvent nécessaire de se rendre dans des salles d’archives pour recouper différents indices afin de connaître sa prochaine destination. Mais attention à frapper à la bonne porte, car les archives de la police, de l’hôpital ou de la bibliothèque se partagent les résultats des recherches en fonction de leur spécificité. En matière d’investigations, The Sinking City comporte donc ses hauts et ses bas, le meilleur résidant peut-être dans l’interface du Palais de la Mémoire où nos déductions peuvent souvent mener à des conclusions alternatives en fonction de ce que l’on choisit de retenir ou pas. Si cela change du tout au tout la version des faits et les conséquences que nos choix impliquent dans le cadre des différentes affaires, il n’y pas de bonnes ou de mauvaises décisions, sinon sur le plan purement moral.

The Sinking City

© BigBen / capture d’écran

Un manque de folie

En marge du fil rouge, The Sinking City renferme également son lot de missions secondaires qui viennent renforcer sa durée de vie au-delà de la quinzaine d’heures de jeu. Dommage que la plupart d’entre elles n’aient finalement que peu d’envergure narrative. Dans un autre registre, et même s’il n’est pas foncièrement mauvais, le fait que le doublage français soit imposé reste aussi étrange que regrettable. Enfin, parmi les principaux bémols qui méritent d’être soulignés, les troubles mentaux susceptibles d’affecter notre personnage nous ont semblé d’autant plus sous-exploités qu’il est sans doute trop facile de préserver notre équilibre mental. Pour un jeu misant à ce point sur le malaise engendré par les hallucinations, cela constitue tout de même un regret assez important.

Conclusion

Dans une démarche assez proche de celle entreprise par Cyanide avec Call of Cthulhu, The Sinking City promettait une enquête tourmentée sur fond d’hystéries lovecraftiennes. Manette en main, le titre révèle cependant vite ses lacunes, mais cela ne doit pas vous empêcher de venir percer les mystères de son intrigue si son austérité générale ne vous rebute pas.

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