Critique

Final Fantasy VII Rebirth tient-il sa promesse de monde ouvert ?

23 février 2024
Par Valérie Précigout (Romendil)
“Final Fantasy VII Rebirth” est à découvrir sur PS5 le 29 février.
“Final Fantasy VII Rebirth” est à découvrir sur PS5 le 29 février. ©Square Enix

Amorcée en 2020 au travers d’un remake qui n’était que la première étape d’un projet de plus grande envergure, la résurrection de Final Fantasy VII a déjà commencé. Mais avec Final Fantasy VII Rebirth, le papillon entame une mue périlleuse. Ce deuxième segment tient-il réellement sa promesse de monde ouvert ?

Il y aurait tellement de choses à dire au sujet de Final Fantasy VII Rebirth qu’il nous faut dès à présent fixer une limite claire. À l’issue de la cinquantaine d’heures de jeu que nous avons déjà pu passer sur le titre en amont de sa sortie, que penser de la prise de risque opérée avec le déploiement de ce monde semi-ouvert ? Car c’est bien sa volonté d’ouverture vers des étendues offrant un vrai sentiment de liberté qui marque l’évolution la plus significative de cette nouvelle étape du projet de ré-imagination de Final Fantasy VII. Et le pari était loin d’être gagné d’avance pour Square Enix.

De Remake à Rebirth : une liberté retrouvée

Aussi époustouflant qu’ait pu être Final Fantasy VII Remake à sa sortie en 2020, son déroulement affichait une obstination permanente à maintenir le joueur sur des rails pour l’obliger à suivre sagement les contours du scénario. Un mal nécessaire pour parvenir à recréer de toutes pièces un titre considéré comme une véritable légende du jeu vidéo, répondant ainsi au plus grand fantasme des passionnés de jeux de rôle japonais.

Confinés entre les murs de Midgar, cité caractérisée par ses tristes bidonvilles, sa grisaille permanente et ses réacteurs Mako en sursis, les joueurs se familiarisaient ainsi doucement avec les enjeux complexes de cet épisode. Mais ils ressortaient aussi de cette expérience avec un sentiment de claustrophobie prononcé et un soupçon de frustration lié à l’impossibilité de quitter les rails de l’aventure.

La plage de Costa del Sol ne nous fait pas regretter la grisaille de Midgar.©Square Enix

Dès lors, on pouvait légitimement se poser la question : et si ce remake se décidait enfin à nous ouvrir les portes de Midgar, que se passerait-il ? Après tout, c’est bien ce que proposait le Final Fantasy VII original en nous lâchant sur sa carte du monde dès l’issue de son prologue.

Pour résoudre cette problématique, Final Fantasy VII Rebirth relève le défi d’écrire son propre monde ouvert sans pour autant sacrifier quoi que ce soit de ses intentions initiales. Il combine donc tout ce qui faisait la force de son prédécesseur, à commencer par une narration omniprésente, en y injectant une liberté d’exploration inédite dans le cadre de ce vaste projet de refonte.

Le jeu ne perd rien de sa puissance narrative et émotionnelle.©Square Enix

Voyons tout de suite ce qu’un tel choix implique et si le résultat se révèle digne de nos attentes sur la question de l’open world.

La fin du confinement ?

Même les plus nostalgiques sont bien obligés de l’admettre, en 1997, le monde de Final Fantasy VII n’était pas des plus généreux sur le plan de l’exploration pure. Bien sûr, il convient de se replacer dans le contexte d’une époque où les jeux de rôle japonais se servaient essentiellement de leur carte du monde comme d’un simple repère visuel permettant de rallier les villes et les continents. On s’y baladait au hasard des rencontres aléatoires avec les ennemis du jeu, sans réellement s’attendre à trouver quoi que ce soit d’autre que des lieux imposés par le scénario. Les secrets y étaient rares et l’esprit de découverte n’avait rien à voir avec la proposition actuelle des jeux en monde ouvert.

La faune nous guide souvent vers des cachettes dignes d’intérêt.©Square Enix

Aujourd’hui, même un open world foisonnant de points d’intérêt ne suffit plus à contenter les joueurs. Il suffit de voir le succès de la formule proposée par les derniers épisodes de The Legend of Zelda (Breath of the Wild et Tears of the Kingdom) pour réaliser que la vraie liberté doit désormais passer aussi par la notion d’immersive sim. En clair, la plupart des joueurs veulent pouvoir interagir librement avec le monde du jeu en poussant son moteur physique dans ses derniers retranchements, sans aucune limite à leur soif d’exploration. Et ce n’est clairement pas ce que propose Final Fantasy VII Rebirth. Mais est-ce pour autant rédhibitoire ?

Explorer sans improviser

Prenons un exemple simple : le jeu s’efforce de déployer une grande diversité de moyens pour nous permettre d’évoluer dans ses environnements en exploitant les particularités de chaque biome. Pour autant, les prises utilisables par notre grappin sont prédéfinies, il n’est donc pas question de s’en servir en dehors des voies que les concepteurs ont envisagées. De la même façon, les personnages sont tout à fait capables de gravir des montagnes, mais à condition qu’il existe des marches ou des prises permettant d’effectuer une telle ascension. Atteindre un lieu précis nécessite donc forcément de comprendre de quelle manière le jeu a prévu de nous y conduire. L’improvisation est proscrite.

Défiez de nouveaux Espers dans le simulateur pour en faire vos alliés.©Square Enix

Ces restrictions pourraient sembler incompatibles avec la notion de monde ouvert, mais pas dans le cadre de la formule mise en place ici. N’oublions pas que Rebirth doit aussi faire la transition entre le premier et le troisième volet de la trilogie ; il ne doit donc pas donner le sentiment de renier complètement les acquis de Remake en basculant subitement dans un schéma totalement différent.

C’est pourquoi il renferme aussi de nombreux passages beaucoup plus linéaires destinés à dérouler le narratif de cet épisode. L’alternance entre les deux est d’autant plus habile que le jeu nous prévient systématiquement lorsqu’il est sur le point de refermer temporairement les portes de son monde ouvert. Libre à nous d’avancer alors un peu plus dans l’histoire ou de prendre le temps d’explorer librement le continent sur lequel nous venons de poser le pied.

La notion de monde étendu

Bien qu’elles nous soient généralement imposées, il existe une multitude de solutions possibles pour explorer le monde de Final Fantasy VII Rebirth. La plupart du temps, cela passe par la nécessité d’apprivoiser des chocobos, les montures iconiques de la franchise. Il suffit alors d’exploiter les talents propres à chaque espèce de chocobo pour surmonter les aléas de l’environnement de manière originale.

Mais ce ne sont pas les seuls moyens de locomotion disponibles dans le jeu et d’autres surprises sont au programme. On constate d’ailleurs avec soulagement que la superficie des différentes régions du monde offre un bon compromis en matière d’open world. Si sa seule exploration suffit à démultiplier la durée de vie du jeu par rapport à celle de son prédécesseur, les objectifs secondaires ne se révèlent jamais trop chronophages.

Les capacités des chocobos varient en fonction des espèces.©Square Enix

Car le monde étendu de Final Fantasy VII Rebirth est en réalité semi-ouvert, dans le sens où ses différentes régions sont bien délimitées. Il est possible de passer de l’une à l’autre, mais cela donne davantage l’impression d’évoluer dans des lieux séparés qui ne sont pas étroitement interconnectés. Cela se justifie notamment par une diversité des biomes faisant intervenir de nouvelles astuces de progression. Il est d’ailleurs assez amusant de voir de quelle manière les créateurs du jeu ont su puiser dans l’univers de la série Final Fantasy pour étoffer un monde où tout était encore à inventer.

Une durée de vie décuplée

Bien que la liberté d’exploration dans le monde étendu de Final Fantasy VII Rebirth nous soit offerte très tôt dans le jeu, il est recommandé d’attendre un tout petit peu avant de partir en quête de ses mystères. Car ce n’est qu’avec le concours de Chadley que Cloud et son équipe entrent en possession des outils technologiques requis pour interagir avec les éléments clés de cet univers. Dès lors, plus rien ne nous empêche d’aller vadrouiller vers l’inconnu en quête de tours de transmission, de puits de vie, de terrains de chasse ou de caches aux trésors.

Le changement d’ambiance est permanent dans FF7 Rebirth.©Square Enix

Plutôt que de ralentir notre progression avec des coffres disséminés partout dans la nature, les concepteurs ont choisi de les concentrer uniquement dans des zones restreintes, ce qui n’est pas une mauvaise idée. Les missions de chasse aux monstres impliquent systématiquement des conditions bien précises à remplir, afin de s’assurer que l’on maîtrise les nouvelles possibilités offertes par le système de combat. Bien des aspects ont été retravaillés et améliorés par rapport à Remake, pour un résultat infiniment plus riche en termes de possibilités.

Saurez-vous trouver tous les cristaux d’Espers disséminés dans le jeu ?©Square Enix

Largement mis à l’honneur dans cet épisode, les chocobos ne disposent pas seulement d’aptitudes variées en fonction de leur espèce. Ils sont aussi capables de détecter et de déterrer des puces ou d’autres éléments précieux enfouis dans le sol. En découvrant le cristal d’un Esper, le groupe d’aventuriers a par ailleurs la possibilité de relever une épreuve spéciale pour renforcer la puissance de la chimère associée. Cela permet aussi de réduire de plusieurs degrés la difficulté du combat qui nous oppose à elle, sachant qu’une victoire est nécessaire pour invoquer cet Esper lors des batailles.

Chaque région renferme également un ennemi secret à débusquer, ainsi que des protoreliques donnant lieu à des quêtes assez inattendues. Quant aux amateurs de challenges, ils peuvent toujours opter pour le mode de difficulté dynamique qui ajuste la force des ennemis à celles de nos héros.

Même si les objectifs secondaires ne sont pas en surnombre, ils sont complétés par une vraie profusion de minijeux, sans oublier une nouvelle série de quêtes annexes souvent déconcertantes. On raconte même que des Mogs d’un genre nouveau auraient élu domicile dans des lieux bien particuliers.

Le voyage rompt-il le rythme du jeu ?

Si Final Fantasy VII Remake avait pris le risque de surprendre les joueurs en osant s’affranchir parfois de la trame originelle, sa suite conforte ce choix en allant souvent encore plus loin. Le voyage oscille en permanence entre le drame et la dérision. La progression est constellée d’humour, de séquences mémorables et d’imprévus qui donnent l’impression de ne jamais savoir ce que nous réserve la suite de l’aventure. Le monde étendu est loin d’être le seul argument en faveur de ce deuxième segment, qui relègue Final Fantasy VII Remake à son statut de simple prologue.

Le lien croissant entre les personnages se traduit par des actions synchronisées.©Square Enix

L’un des paris les plus délicats de cette suite résidait dans le fait de savoir si l’exploration libre ne risquait pas de casser le rythme d’une aventure aussi scénarisée. Il est clair que ce n’est pas le cas puisque, quel que soit le temps que l’on passe à crapahuter dans les différentes régions du jeu, la trame finit toujours par nous rattraper de manière fluide et naturelle.

©Square Enix

Comme si nous n’avions jamais décidé de quitter soudainement les rails du scénario… Ce long périple a aussi le mérite de renforcer nettement les liens entre les protagonistes, ainsi que notre sentiment d’attachement à leur égard, en vue des événements à venir. Exactement comme le souhaitait le directeur créatif Tetsuya Nomura.

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