Critique

Les braises avec Virginie Efira : en manque d’étincelles ?

05 novembre 2025
Par Lisa Muratore
Virginie Efira dans “Les braises”, en salle le 5 novembre 2025.
Virginie Efira dans “Les braises”, en salle le 5 novembre 2025. ©Wild Bunch Distribution

Virginie Efira est de retour au cinéma après deux ans d’absence dans Les braises. En incarnant une militante des Gilets jaunes, l’actrice belge se plie une nouvelle fois à l’exercice du drame. Toutefois, le feu parvient-il à prendre ?

En 2023, Virginie Efira remportait le César de la meilleure actrice pour Revoir Paris (2022), récit traumatique d’Alice Winocour qui suivait une rescapée des attentats du 13 novembre 2015. Cette récompense venait saluer une année riche pour l’actrice belge : Les enfants des autres, Rien à perdre, L’amour et les forêts

Mais celle qui s’amusait, au moment de son sacre, « de s’être arithmétiquement donné les chances en tournant 63 films en un an », a toutefois eu le besoin de faire une pause. D’abord pour élever son deuxième enfant qu’elle a accueilli avec son partenaire Niels Schneider, mais aussi très certainement pour souffler, loin des plateaux de cinéma, et prendre du recul sur ses projets.

Virginie Efira recevant le César de la meilleure actrice pour Revoir Paris.

Aujourd’hui, Virginie Efira est de retour. Et alors qu’on la retrouvera prochainement chez Asghar Farhadi dans Histoires parallèles, chez le cinéaste japonais Ryusuke Hamaguchi ou bien dans la peau de Gisèle Halimi devant la caméra de Pauline Bureau, c’est d’abord dans Les braises, réalisé par Thomas Kruithof, que le public va pouvoir, à nouveau, découvrir la comédienne.

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Dans ce drame, Virginie Efira incarne Karine, une ouvrière en agroalimentaire, mariée à Jimmy, un chef d’entreprise et conducteur routier, interprété par Arieh Worthalter (césarisé, lui aussi, pour Le procès Goldman). Un jour, alors que les conditions de travail sont de plus en plus pénibles pour elle, Karine va décider de rejoindre la mobilisation des Gilets jaunes. Un choix qui n’est pas vraiment du goût de son époux et qui risque de mettre en péril l’équilibre familial. Car l’émotion des débuts ainsi que la ferveur du collectif vont rapidement laisser place à des convictions de plus en plus fortes chez Karine.

La grande Virginie Efira

Des blocages de ronds-points aux manifestations parisiennes, Les braises retrace le parcours intime d’une héroïne bien décidée à s’engager pour faire changer les choses. Ainsi, le choix de Virginie Efira n’est pas anodin. L’actrice montre une nouvelle fois avec subtilité qu’elle est capable d’insuffler dans ses personnages la puissance nécessaire pour faire « décoller » un film. En effet, avec charme et sincérité, l’actrice dévoile une partition habitée. Surtout, elle permet de sauver un long-métrage qui non seulement ne nous apprend rien sur le mouvement des Gilets jaunes – malgré le recul presque vertigineux que nous avons aujourd’hui sur ses conséquences –, mais croule sous les clichés du cinéma d’auteur social.

Arieh Worthalter dans Les braises.©Wild Bunch Distribution

La véritable démonstration réside avant tout dans la famille et sa désintégration. En prenant pour décor le mouvement des Gilets jaunes, Thomas Kruithof dissèque le couple à l’aube des divergences politiques et sociétales. Que faire quand celui ou celle qu’on aime ne partage pas les mêmes idées que nous ? Comment tenir face au poids de l’engagement ? Comment ne pas sombrer et garder sa famille intacte ?

Sans jamais être moralisateur, le cinéaste donne à voir la trajectoire de ce couple broyé par un système. Cette « France d’en bas » qui doit choisir entre un engagement sincère, souvent réprimé par la justice et la violence, ou la fraude discrète pour tenter de s’en sortir.

Virginie Efira et Arieh Worthalter dans Les braises. ©Wild Bunch Distribution

Toutefois, la puissance de jeu de Virginie Efira et sa partition face à un Arieh Worthalter aussi convaincant que désemparé ne suffisent pas à emmener le long-métrage vers la pression que l’on attend. Là où Jouer avec le feu (2024) – drame familial porté par Vincent Lindon et Benjamin Voisin, dans lequel le premier voyait le second basculer du côté de l’extrême droite – faisait monter la tension en questionnant, sur fond de violence faciste, la relation d’un père et de son fils, Les braises manque d’étincelle.

Le film ne parvient jamais à nous emporter dans la folie de ses personnages ni dans la torpeur du couple. Encore moins dans l’effervescence ou l’urgence sociale que représentent les Gilets jaunes. Un constat étonnant pour Thomas Kruithof, qui a déjà proposé des œuvres politiques et engagées, comme le thriller La mécanique de l’ombre (2016) ou Les promesses (2021). Aujourd’hui, si le cinéaste offre un film plus humble qui résonne avec l’actualité, force est de constater que Les braises manque d’ardeur.

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Article rédigé par
Lisa Muratore
Lisa Muratore
Journaliste