L’adaptation de la BBC, initialement sortie en 2018 et désormais disponible sur Arte, plonge au cœur du chef-d’œuvre de Victor Hugo avec une approche classique, anglo-saxonne et portée par un casting remarquable.
On ne compte plus les adaptations audiovisuelles et scéniques des Misérables, le roman monumental de Victor Hugo publié en 1862. Considéré comme l’un des chefs-d’œuvre de la littérature française, ce texte du XIXe siècle continue de séduire par sa puissance dramatique et sa dénonciation des injustices sociales. L’une des dernières relectures en date, proposée par la BBC en 2018 sous la direction d’Andrew Davies, est désormais disponible en streaming sur Arte depuis le 25 décembre.
Une fresque sociale et humaine
Le roman d’Hugo tisse les destins entremêlés de personnages confrontés aux bouleversements de la France du XIXe siècle. Jean Valjean, ancien forçat marqué par 19 années de bagne pour avoir volé un morceau de pain, tente de se reconstruire malgré la traque incessante de l’inflexible inspecteur Javert. Autour de ce duo central gravitent des figures inoubliables : Fantine, qui sacrifie tout pour sa fille Cosette ; Marius, jeune idéaliste épris d’amour et de justice ; et les sinistres Thénardier, archétypes de la cupidité.
L’adaptation d’Andrew Davies condense les 1000 pages du roman en six épisodes, en privilégiant les tensions entre Valjean et Javert, tout en explorant les destins croisés des autres personnages dans un contexte de pauvreté, de révoltes populaires et de profondes inégalités sociales.
Une production ambitieuse
Portée par un casting remarquable, la série a impressionné par la qualité de ses interprétations. Dominic West incarne un Jean Valjean intense, tandis que David Oyelowo prête à Javert une rigueur jugée implacable. Lily Collins, dans le rôle de Fantine, a été unanimement saluée pour sa « grâce et sa force remarquables » (The Independent). Olivia Colman, Josh O’Connor et Ellie Bamber enrichissent également cette distribution étoilée.
Le producteur Damian Keogh a cherché à moderniser les codes des séries historiques britanniques : « Quand on parle de série britannique d’époque, tout le monde s’attend à quelque chose d’un peu confortable. Ce n’est pas ce que nous voulions. Nous voulions que le film ait un côté contemporain. En termes de mouvements de caméra et de performances, c’est la façon dont le réalisateur l’a abordé. » (France Info) Tournée entre la Belgique et la région de Sedan, la série bénéficie d’une reconstitution minutieuse des décors et costumes d’époque, renforçant l’immersion dans une France tourmentée.
Revue de presse : entre louanges et critiques
Lors de sa première diffusion en 2018, France Inter avait interrogé plusieurs experts des séries lors du festival Series Mania. Les avis étaient partagés. Charlotte Blum (OCS) déplorait une absence d’originalité : « La 160e adaptation des Misérables, on peut s’en passer. La série s’ouvre sur une scène d’une beauté époustouflante, mais dès qu’on entre dans le vif du sujet, tout devient classique. »
Marion Olité (Biiinge) regrettait pour sa part un manque d’authenticité linguistique : « Aujourd’hui, Netflix nous a habitués à regarder des séries en version originale. Pourquoi ne pas faire parler les personnages en français ? Cela aurait apporté une authenticité supplémentaire. »
À l’inverse, The Guardian accueillait cette adaptation avec enthousiasme, la qualifiant de « festin visuel et narratif, une manière luxuriante de clôturer l’année ». Le journal britannique saluait particulièrement Dominic West, qui « vole la vedette dans un final émouvant », et laissait entendre que l’absence de chansons, contrairement à la comédie musicale, était un atout majeur : « Le point fort de cette version est justement de ne pas être une comédie musicale, ce qui, depuis longtemps, a éclipsé le roman dans l’imaginaire collectif. »
Une redécouverte saluée par Télérama
À l’occasion de sa rediffusion sur Arte, Télérama a qualifié cette adaptation de « sage, très classique », mais a souligné ses qualités grâce à un « récit rythmé » et une « force dramatique (…) sauvegardée ». David Oyelowo est jugé « parfait en Javert piégé par ses principes » et « Dominic West, très bien en Valjean à vif ».
Une adaptation fidèle à l’esprit de l’œuvre, donc, mais aussi empreinte de modernité et de diversité, ce qui a plu au comédien de l’inspecteur de police, interrogé par le magazine : « Je ne vois pas l’intérêt de faire une adaptation si elle ne s’adresse pas aux téléspectateurs de notre époque. »
Comédie musicale à Paris
Enfin, pour celles et ceux qui ne se satisferaient pas d’une nouvelle mini-série, le Théâtre du Châtelet accueille jusqu’au 2 janvier 2025 Les Misérables dans une nouvelle production en français. Mis en scène par Ladislas Chollat, ce retour aux origines du musical permet de redécouvrir des titres emblématiques comme J’avais rêvé ou À la volonté du peuple dans leur version originale.