Entre la démocratisation d’Internet dans les années 90 et l’arrivée du mot “googler” dans le dictionnaire, trouver son chemin sur le Web n’était pas toujours simple. Petit retour à l’époque des webrings, des annuaires et des colonnes de liens !
Le saviez-vous ? À l’époque où Internet n’était encore utilisé que dans quelques universités, l’idée d’y faciliter la recherche dans les contenus par des commandes simples était déjà là. Les premiers prototypes de moteurs de recherche ont été développés dans les années 70 et standardisés au début des années 80. Il faut cependant attendre décembre 1989 avant que le Knowbot Information Service (KIS) propose une expérience abordable pour le commun des mortels (du moins les mortels informaticiens de l’époque). Néanmoins, quand Internet arrive massivement dans les foyers à partir du milieu des années 90, on est encore bien loin d’avoir facilement accès à ce genre de gadgets : il faut se débrouiller avec es moyens du bord.
Le far-west des annuaires des années 90
Avant la démocratisation des moteurs de recherche, trouver une information sur Internet nécessitait avant tout de connaître des bonnes adresses… D’annuaires de liens. Ces sites spécialisés, qui n’hésitaient pas à investir les médias traditionnels à grand renfort de publicité, étaient de longues et austères listes regroupant des pages indexées par catégorie : sites d’actualité, site de cuisine, boutiques en ligne… Il faut dire qu’avant l’arrivée de l’Internet à haut débit, le nombre de pages sur un sujet donné était assez limité pour tenir dans un listing simple.
Les sites d’annuaires, ou portails web, étaient nombreux et plus ou moins perfectionnés, certains se spécialisant dans le recensement de sites grand public (Lycos, Altavista ou Yahoo, par exemple), d’autres se tournant (déjà) vers du contenu plus sulfureux. Un prestataire comme Hotbot, avec son aspect qui masquait un peu sa nature d’annuaire derrière une apparence de moteur de recherche futuriste, indexait notoirement du contenu menant allègrement vers des sites de téléchargement illégaux ou liés à des contenus pornographiques.
L’indipensable Webring
Mais pour l’usager d’Internet qui n’aurait pas trouvé son bonheur dans ces ancêtres des moteurs de recherche moderne, rien n’était perdu. Peut-être pouvait-il trouver son bonheur sans quitter son ordinateur, certes hors-ligne, mais en insérant une encyclopédie multimédia dans son lecteur de CD-ROM ?
Et si ça ne suffisait pas, il était toujours possible de se rabattre sur la presse imprimée : dans les années 90, elle regorgeait de pages listant des adresses de sites Web sur tous les sujets possibles et imaginables, certains magazines se spécialisant même dans la question, recommandant chaque semaine ou chaque mois les bonnes adresses à taper dans la barre de son navigateur Netscape.
Mais plus efficace encore : la possibilité de se rendre sur un de ses sites favoris enregistré dans un marque page. Si les favoris sont encore très utilisés de nos jours et semblent complètement banals, ils ne datent cependant “que” de 1992. Une fois sur place, sur presque tous les sites dignes de ce nom, une page recensant des liens sur des sujets connexes était quasiment systématiquement présente, quand elle ne l’était pas sur l’ensemble du site via une colonne permanente à gauche ou à droite de l’écran.
Petite coquetterie supplémentaire : certains sites rejoignaient des “webrings”, des sortes de carrousel vous emmenant d’un site à l’autre sur des sujets similaires. De quoi se perdre pendant des heures et des heures… Jusqu’à revenir au site d’origine, car comme son nom l’indiquait, le webring était un “anneau”. Visuellement assez envahissants (certains sites les affichaient par dizaines), les webrings étaient à la fois une source de découverte et une plaie, à une époque où charger des pages pleines d’images et de liens pouvait prendre plusieurs minutes. Mais ils ont incontestablement largement boosté l’audience de nombreux site de ce web des origines !
Les newsletters, déjà bien implantées
Si tout cela ne suffisait pas encore pour trouver son chemin dans la jungle des télécommunications modernes, il restait possible de s’abonner à des newsletters. Lesquelles étaient déjà bien présentes dans le paysage de l’époque. Pas étonnant que ce concept ait émergé très tôt dans l’histoire du web, puisqu’il s’agit avant tout de la transposition électronique d’une tradition ayant émergé dès le XVIIè siècle !
Dès les années 80 avec le développement des emails, les boîtes aux lettres virtuelles ont été saturées de courriers publicitaires plus ou moins désirables. Mais c’est avec le développement rapide des liens hypertextes à partir de 1991 que les newsletters peuvent véritablement se dématérialiser : elles prennent leur forme moderne au fil des années 90, en intégrant généralement une série de nouvelles et des sélections de liens sur lesquels il est aisé de cliquer pour découvrir du nouveau contenu. Un peu tombées en désuétudes dans les années 2000, elles font désormais leur grand retour, excellent moyen de contourner le chaos informationnel des réseaux sociaux.
En tout état de cause, avant même l’arrivée de Google et de ses concurrents dans notre quotidien, il y avait déjà tout un tas de moyens de chercher de l’information en ligne… Sans parler de ceux qui existaient en dehors de tout cadre informatique : n’oublions pas qu’il n’y a pas si longtemps, il était encore très commun d’aller chercher une information précise dans la collection d’encyclopédies de la bibliothèque municipale… Ou de passer un coup de téléphone à une hotline spécialisée pour surmonter une difficulté dans un jeu vidéo. Tout ceci semble si près, et pourtant si loin !