Ant-Man est de retour dans les salles obscures dès ce mercredi 15 février. Paul Rudd rempile dans le costume de l’homme-fourmi avec plus de caractère pour une aventure prometteuse… mais à l’envergure microscopique.
La Phase 4 du MCU a été perçue par de nombreux fans Marvel comme transitoire. Elle a été nécessaire pour introduire de nouveaux personnages, des formats et des concepts inédits dans l’univers, mais elle n’a pas su offrir de créations pivots, capables de dépasser l’apothéose d’Avengers: Endgame (2019).
Les studios Marvel avaient pourtant toutes les cartes en main, en inaugurant la prometteuse Saga du Multivers. Concept aussi majeur que fantasmagorique qui servira de fil conducteur entre la Phase 4 et la Phase 5, il a finalement été grossièrement teasé dans Spider-Man: No Way Home (2021) avant d’être sous-exploité scénaristiquement et visuellement dans Doctor Strange 2 (2022).
Seule la série Loki (2021) a été capable de jouer pertinemment avec ce concept en introduisant de véritables enjeux grâce à la Time Variance Authority (TVA), et Kang le Conquérant, grand ennemi des Avengers dans les comics Marvel, capable de jouer avec le temps et l’espace à l’infini.
Depuis le grand final de la série portée par Tom Hiddleston en 2021, les fans étaient donc nombreux à souhaiter la concrétisation du Multivers sur grand écran. Une impatience qui n’a fait que grandir après les aventures solos de Thor: Love & Thunder (2022) et le passage de flambeau de Black Panther: Wakanda Forever (2022).
Jonathan Majors, le choix idéal ?
Mais pour lancer véritablement le Multivers à travers Kang – et par la même occasion inaugurer la Phase 5 du MCU – la Maison des Idées a choisi Ant-Man. Héros populaire au charisme finalement aussi flamboyant que son animal totem, on peut le voir comme un choix étonnant pour introduire un personnage aussi puissant que Kang.
Ce dernier est incarné par Jonathan Majors, étoile montante d’Hollywood découverte dans la série LoveCraft Country (2020) – que l’on retrouvera prochainement face à Michael B. Jordan dans Creed III. Le personnage permet ici de donner plus d’importance à la franchise portée depuis 2015 par Paul Rudd et de lui confier un rôle déterminant dans la grande machine Marvel.
La magnitude de son méchant, interprété avec brio et subtilité, est l’un des éléments les plus réussis d’Ant-Man et la Guêpe : Quantumania. L’acteur américain domine chaque scène avec une tenue maîtrisée et un regard perçant, qui lui confèrent une envergure quasi théâtrale. Pour autant, Paul Rudd parvient à s’affirmer face à une telle figure, offrant ainsi un duel surprenant, mais convaincant. Ici, les studios Marvel et Peyton Reed (le réalisateur) ont eu l’ingénieuse idée de faire évoluer Scott Lang.
L’ancien détenu reconverti en super-héros adopte, dans ce troisième volet, la carrure et l’assurance d’un véritable Avengers. Le ridicule du personnage devient secondaire au profit d’un portrait plus héroïque, parfois sombre, qui va étonnamment bien à Paul Rudd. Ceci offre un aspect presque méta au film, dans la mesure où Scott Lang a réussi à se désolidariser de l’image que représente son interprète dans notre imaginaire commun.
Généralement cantonné au rôle du side-kick gauche, l’acteur révélé dans les comédies de Judd Apatow dévoile une justesse de jeu plaisante, qui lui permet non seulement de rivaliser avec Jonathan Majors, mais aussi d’assurer fidèlement son rôle de père face à sa fille Cassie (Kathryn Newton).
N’est pas Star Wars qui veut
Cette dernière est l’élément déclencheur de cette nouvelle aventure d’Ant-Man. Passionnée par les sciences, à l’instar d’Hank Pym (Michael Douglas), Cassie a mis au point un système afin de cartographier le Royaume Quantique, un espace subatomique dans lequel a longtemps été coincée Janet Pym (Michelle Pfeiffer).
Évidemment, alors que Cassie est en pleine démonstration, sa nouvelle invention va se retourner contre elle et envoyer toute sa famille dans le Royaume Quantique, dominé par Kang le Conquérant, que des légions de rebelles tentent de renverser. Un point de départ qui rappelle étrangement l’une des plus grandes sagas de science-fiction, Star Wars.
Ant-Man et la Guêpe : Quantumania est gorgé de références au space-opéra imaginé par George Lucas en 1977. Telle une Luke Skywalker, Hope Van Dyn (Evangeline Lilly) a le droit à sa rencontre dans une cantina futuriste, tandis que son costume et ceux de ses parents rappellent ceux portés par les ennemis de l’Empire.
Sauf qu’à vouloir s’en inspirer et à lui rendre hommage, le film de Peyton Reed finit par déborder et offrir une pâle copie de Star Wars. Le design bâclé des créatures peuplant le Royaume Quantique et le jeu des rebelles ne permettent pas au long-métrage de décoller pour offrir un spectacle digne des meilleurs space-opera.
Plus de gêne que de sourire
On est finalement loin de Star Wars et l’on tombe vite dans un univers proche de Stargate SG-1, notamment avec ses personnages. L’un d’eux nous arrache tout particulièrement la rétine à plusieurs reprises, tant par sa laideur physique que la vulgarité avec laquelle les effets spéciaux ont été réalisés. Étonnamment, là où les deux premiers volets parvenaient à nous offrir un ton décalé, jouant sur le ridicule de son personnage, Ant-Man et la Guêpe : Quantumania tombe souvent dans le piège d’une parodie qui ne s’assume pas et de l’humour graveleux.
On pense à l’apparition de Bill Murray qui évoque ses parties de jambes en l’air avec le personnage de Michelle Pfeiffer. Un moment particulièrement gênant pour les cinéphiles étant donné les récentes révélations sur le comportement borderline de l’acteur sur les tournages. À côté de cela, les blagues sur le nombre d’orifices de Scott Lang, ou encore les répétitions du mot « dick » durant toute une scène n’ont de cesse de susciter la gêne plutôt qu’un franc sourire.
Pourtant, on aurait aimé sortir de ce troisième volet d’Ant-Man convaincu. Bien que le film puisse compter sur une distribution impeccable et une évolution des personnages travaillée, la photographie et la mise en scène ne sont jamais au service de l’action. Elle ne décolle jamais, coincée entre l’envergure d’une fourmi et la volonté d’offrir un blockbuster super-héroïque à Paul Rudd et Jonathan Majors.
Longueurs, humour sans saveur et pâle copie de science-fiction ont fait perdre son mojo à la saga Ant-Man. Non pas qu’elle en ait déjà eu, mais là où le Multivers aurait pu offrir à l’homme-fourmi son grand moment Marvel, la machine des studios a encore écrasé son insecte de super-héros.
Ant-Man et la Guêpe : Quantumania de Peyton Reed avec Paul Rudd, Jonathan Majors, Michelle Pfeiffer, Michael Douglas, et Evangeline Lilly, 2h01, en salle le 15 février 2023.