
Avec leur 36e film, Thunderbolts*, les studios Marvel concluent la Phase 5 du MCU dans une apothéose brute et réussie. Une surprise cinématographique que l’on n’attendait plus, portée notamment par la talentueuse Florence Pugh.
Seulement deux mois après Captain America: Brave New World, Marvel présente sa nouvelle équipe : les Thunderbolts ; une bande de bras cassés qui œuvre dans l’ombre pour le compte de Valentine Allegra de Fontaine (Julia Louis-Dreyfus). Sabotage d’un laboratoire, exécutions sommaires… Ces écorchés vifs n’hésitent pas à se salir les mains au nom de la directrice de la CIA.
Le jour où elle est visée par une procédure de destitution, Valentina n’a d’autre choix que de détruire les preuves et, avec elles, les mercenaires au courant de ses exactions. Envoyés pour une ultime mission dans un bunker perdu dans le désert, Yelena Belova (Florence Pugh), Le Fantôme (Hannah John-Kamen), John Walker (Wyatt Russell) et Taskmaster (Olga Kurylenko) comprennent rapidement la raison qui les a réunis. Mais surtout, les Thunderbolts font une découverte qui pourrait changer leur destinée et celle de l’humanité tout entière.
“Thunderbolts assemble”
Depuis plusieurs années, les anti-héros ont pris le pas sur les figures héroïques classiques. Conséquence directe d’une « super-héros fatigue », les studios se tournent depuis un certain temps vers les laissés pour compte de leurs écuries afin de leur donner plus d’ampleur. En 2016, le décevant Suicide Squad de David Ayer débarquait ainsi dans les salles obscures, avant de trouver une véritable rédemption devant la caméra de James Gunn en 2021 chez DC.

Côté Marvel, l’avènement a été plus prudent. Si le MCU présente, depuis ses débuts, des personnages cabossés (Iron Man, Le Soldat de l’hiver, Black Widow…), c’est avec la série de Disney+, Loki, que l’on assiste pour la première fois à un véritable programme consacré à une figure anti-héroïque.
Avec Thunderbolts*, Marvel quitte le petit écran pour s’offrir celui du cinéma. Il n’en fallait pas moins, au regard des gros calibres que se paient les studios de Kevin Feige. L’étoile montante Florence Pugh, la star de Stranger Things David Harbour ou encore la reine de la comédie passée par Seinfeld et Veep, Julia Louis-Dreyfus, composent le casting de ce blockbuster.

Ensemble, ils donnent la réplique à l’acteur de The Apprentice (2024) – tout juste lauréat d’un Golden Globe – Sebastian Stan. Réalisé par Jake Schreier, le film peut également compter sur le talent de la nouvelle garde hollywoodienne : Wyatt Russell, Lewis Pullman, Hannah John-Kamen, mais aussi Geraldine Viswanathan.
Le MCU version cinéma indépendant
Entre acteurs bankables et talents émergents du 7e art, Thunderbolts* réunit ainsi une distribution chorale convaincante qui a, par ailleurs, fait ses armes du côté du cinéma indépendant. Un atout non négligeable pour le film qui favorise une véritable exploration des personnages, entre humour, désillusion et émotion. Malgré un casting d’ensemble, le long-métrage trouve son équilibre et laisse la place à chaque protagoniste d’exister grâce à une écriture rythmée, parfois cinglante, et une mise en scène subtile.

Si, de prime abord, on ne misait pas sur l’intérêt de cette équipe de misfits, Thunderbolts* déjoue les paris. Le casting transpire le charisme – quelque chose qui manquait cruellement aux dernières productions Marvel aseptisées –, une force à l’état brut ainsi qu’une gravité dans l’émotion. Walker en père de famille divorcé, le Red Guardian en conducteur de limousine prostré, ou encore Fantôme en tueuse redoutable forment cette nouvelle équipe aussi attachante que dysfonctionnelle, avec à sa tête Yelena Belova.
Incarnée par l’excellente Florence Pugh, l’ancienne espionne de la Red Room s’offre son premier film MCU en tant que personnage principal. Une promotion rendue possible par le film Black Widow (2021) qui la présentait, mais surtout par les talents d’interprétation de l’actrice qui affiche une force naturelle dans son jeu.

Face à elle, Lewis Pullman, véritable révélation du film. Le comédien incarne Bob, un civil coincé dans le bunker sur lequel le gouvernement américain a mené des expérimentations dans le cadre du programme Sentry. Si le public avait pu le découvrir brièvement dans Top Gun: Maverick (2022), il laisse éclater toute la puissance de son jeu dans Thunderbolts* en incarnant un jeune homme en proie à la dépression. L’acteur livre ainsi une prestation habitée et n’est jamais aussi bon que quand il laisse transparaître la fragilité de son personnage.
Les vraies gens
Cette fragilité est d’ailleurs ce qui fait le sel du long-métrage de Marvel, car elle accompagne non seulement l’écriture des personnages, torturés par leur passé, mais aussi la mise en scène. Sans jamais sacrifier l’action ou les combats au corps-à-corps, Thunderbolts* trouve une profondeur dans les sujets qu’il aborde.
La dépression et le besoin de donner un sens à leur vie n’épargnent pas nos héros. Marvel, à l’instar d’un film indépendant, s’empare ainsi de la question de la santé mentale dans une métaphore filée tout au long de l’œuvre.

Les Thunderbolts seraient-ils de vraies personnes ? Bien que cette démonstration ne révolutionne pas le genre, ce choix scénaristique apporte de la profondeur aux personnages et permet une identification presque immédiate en tant que spectateur. Mieux encore, cette thématique résonne avec la mise en scène de Jake Schreier qui a préféré aux effets CGI le réalisme des décors ainsi que les scènes d’action lisibles, violentes et brutes de décoffrage.
Les attaques extraterrestres, les super-pouvoirs exponentiels ou encore les manœuvres politiciennes particulièrement présentes dans les films de la Phase 5 du MCU laissent place à la frappe des poings et aux coups sous la ceinture ; une façon d’humaniser davantage nos héros. Par ailleurs, Thunderbolt* revient à un humour bienvenu après la drôlerie poussive et vulgaire de Deadpool & Wolverine (2024).

Grâce à l’excessif Red Guardian de David Harbour, grâce à un Sebastian Stan qui n’a pas peur du ridicule ou encore grâce à la classe d’une Julia Louis-Dreyfus aussi cinglante que terrifiante, Thunderbolts* profite d’une bonhommie percutante et de dialogues acérés, délivrés avec justesse.
Ainsi, entre humour et gravité, entre proposition indépendante et film à grand spectacle, Thunderbolts* dépasse nos espérances. Après une Phase 5 laborieuse, le long-métrage apparaît, sans nul doute, comme le meilleur de celle-ci. Décisif pour la suite de l’univers (on évitera tout spoiler final), il apparaît aussi comme un marqueur important pour l’avenir du MCU.

Ce 36e long-métrage montre que les studios sont capables de proposer des œuvres cinématographiques originales et denses en puisant dans différents genres (film politique, film d’aventure, drame…). Avec Thunderbolts*, Marvel propose également un blockbuster féministe. Car c’est aussi l’un de ses atouts : replacer au centre de l’écran des personnages féminins capables de maîtriser l’action et de donner le ton. Et si c’était là que résidait le succès de Marvel ?
Thunderbolts*, de Jake Schreier avec Florence Pugh, Sebastian Stan, David Harbour, Lewis Pullman et Julia Louis-Dreyfus, 2h06, au cinéma le 30 avril 2025.