
C’est la fête côté sorties Blu-Ray et DVD en ce mois de mars 2025. Voici la très belle sélection des films les plus attendus dont la dernière Palme d’or, l’excellent « Anora » de Sean Baker. On pourra également (re)découvrir le troublant thriller aveyronnais d’Alain Guiraudie, la cure de jouvence horrifique de Coralie Fargeat, le nouveau réquisitoire animé de Claude Barras ou encore le retour en grâce de Robert Zemeckis.
Flow, le chat qui n’avait plus peur de l’eau– Gints Zilbalodis
Alors que l’espèce humaine semble avoir disparu, le chat Flow voit soudain son lieu de vie submergé par les eaux et se retrouve perché sur une arche de Noé improvisée, en compagnie d’un chien, d’un lémurien, d’un gros rongeur et d’un drôle d’oiseau. Le début d’une folle aventure filmée à hauteur de chat et… sans un mot. Un sacré défi brillamment relevé par le réalisateur letton Gints Zilbalodis.
Flow, le chat qui n’avait plus peur de l’eau est une merveille d’animation où la narration avance à la seule force de l’image, des mouvements de caméra, de la musique et des sons de la nature. Un étonnant objet de cinéma doublé d’une intelligente sensibilisation à la question climatique. L’un des plus beaux films sortis en 2024.
Miséricorde– Alain Guiraudie
Le retour d’un jeune homme (formidable Félix Kysy) dans son village d’enfance de l’Aveyron pour l’enterrement de son ancien patron sème le trouble au sein de sa petite communauté. Et une fois encore, le réalisateur Alain Guiraudie de faire naître le désir – et la violence – là où on ne l’attend pas. Quoiqu’on finisse maintenant par s’y faire. Dans Miséricorde, le cinéaste aveyronnais associe avec brio tragédie et burlesque, entremêlant la sombre tension d’un thriller érotisé à la banalité réjouissante, parfois amusante, de ses personnages.
Juré n°2- Clint Eastwood
Juré n°2 ou l’histoire d’un criminel qui s’ignore, pris dans les rouages de la justice américaine. Juré dans une affaire de meurtre, Justin Kemp n’imagine pas se retrouver étroitement lié à l’affaire qu’il est censé juger. Et voilà ce bon vieux Clint Eastwood qui surprend tout son monde – à l’exception peut-être de celles et ceux qui connaissent Le Septième Juré de Georges Lautner – dans un sympathique jeu d’arroseur arrosé, insufflant à l’académique et non moins élégante mise en scène de son film de procès un suspense des plus captivants.
Anora– Sean Baker
Après Tangerine, The Florida Project, Red Rocket, c’est finalement avec Anora que Sean Baker sera enfin reparti palmé du Festival de Cannes. Le destin halluciné et hallucinant d’une strip-teaseuse de Brooklyn métamorphosée en Cendrillon des temps modernes au bras du fils inconséquent d’un oligarque russe.
Filmer les marginaux, égratigner l’American Dream, c’est le cinéma de Sean Baker. Et Anora ne fait pas exception : si dans un premier temps, le réalisateur feint d’emprunter le chemin doré du conte de fées, il s’empresse dans un second de noircir son idyllique mirage. Un anti-Pretty Woman qui invite à nous méfier des illusions d’Hollywood. L’un des grands favoris des Oscars 2025.
Gladiator 2– Ridley Scott
Vingt-quatre ans après avoir redonné ses lettres de noblesse à l’antique péplum grâce au destin vengeur du général Maximus dans Gladiator, Ridley Scott confie à l’acteur irlandais Paul Mescal la mission de marcher dans les traces de Russell Crow en se glissant dans la peau de Lucius, fils exilé et caché de Lucilla et… de Maximus. À son tour de faire son entrée dans l’arène d’un Gladiator 2 plus épique que jamais et de défendre son honneur au cœur d’une Rome corrompue, tombée entre les mains perverties des empereurs Geta et Caracalla. Une nouvelle fresque plus ambitieuse encore, fidèle à la démesure visuelle, à la violence des combats et au souffle tragique du premier volet.
The Substance- Coralie Fargeat
Quand une cure de jouvence vire au body horror… Demi Moore, star des nineties, est Elisabeth Sparkle, vedette sur le déclin d’une émission d’aérobic. Mais une substance miraculeuse lui permet de devenir une « meilleure version » d’elle-même : la jolie Sue, campée par la jeune Margaret Qualley.
Avec The Substance, la réalisatrice française Coralie Fargeat signe un film choc à la viscéralité jusqu’au-boutiste. Un film multi-référencé où l’on croise autant David Cronenberg, Stanley Kubrick et Brian De Palma que Paul Verhoeven, Tod Browning ou David Lynch. Un violent et cathartique coup de griffe au patriarcat et une invitation à regarder en face, en chair et en os les « monstres » qu’il porte dans son ventre.
Trois amies- Emmanuel Mouret
Fidèle à son exploration de l’amour et des relations humaines, Emmanuel Mouret signe ici une jolie ronde amoureuse à la délicate mélancolie. Un triple portrait de femmes liées par une profonde amitié mais que l’amour, et le désamour, pourrait faire vaciller. Élégance de la mise en scène, finesse des dialogues, justesse d’un trio d’interprètes (Camille Cotin, Sara Forestier et India Hair) qui louvoient à merveille parmi les doux marivaudages nés de l’imagination romantique du cinéaste. Avec Trois amies, Emmanuel Mouret n’a décidément plus rien à envier à Éric Rohmer et Claude Sautet.
Sauvages, Claude Barras
Dans une jungle de Bornéo en pâte à modeler, la lutte de la petite Kéria, de son jeune cousin Selaï et de Oshi, un bébé orang-outan, contre la destruction de leur forêt ancestrale… À l’instar d’un Michel Ocelot ou d’un Benoît Chieux, Claude Barras fait de l’animation ce monde merveilleux capable de rendre accessibles aux enfants les réalités les plus complexes. Après l’abandon et les maltraitances de l’enfance dans Ma vie de Courgette, le réalisateur revient avec Sauvages, ode à la tolérance et à l’acceptation de l’autre, appelant à la barre des accusés les destructeurs du vivant et la société de consommation.
Venom : The Last Dance– Kelly Marcel
Suite et fin de la bromance entre Eddie Brock et Venom, son symbiote au sourire carnassier et à la langue bien pendue. Avec Venom : The Last Dance, Kelly Marcel scelle la trilogie en offrant un dernier tango au duo Eddie-Venom. Un pas de deux entièrement emmené par un Tom Hardy en roue libre et content d’être là, devant la caméra. L’acteur y prend clairement un malin plaisir à se donner la réplique dans un sur-jeu de tous les instants mais totalement assumé, au point d’en devenir réellement réjouissant.
Le Royaume- Julien Colonna
Le réalisateur Julien Colonna s’est adjoint les services de Jeanne Herry (Pupille, Je verrai toujours vos visages) pour bâtir son Royaume. Une association tout à fait fructueuse qui fait de ce thriller corse et premier film une pure merveille. L’omerta, le maquis, le sang qui coule, les sangliers et même Tino Rossi : c’est toute la Corse qui jaillit à l’écran.
C’est aussi et surtout un formidable duo père-fille, porté par les incarnations farouches de Saveriu Santucci et de la jeune et très inspirée Ghjuvanna Benedetti. Tous les deux rassemblés et emportés au rythme effréné d’une cavale au cours de laquelle ils apprendront à se connaître et à s’aimer. Brillant !
Diamant brut- Agathe Riedinger
Autre jeunesse incandescente, celle de Liane, 19 ans, le Diamant brut d’Agathe Riedinger qui, entre sa mère borderline et ses foyers d’accueil, croit entrevoir la lumière (artificielle) et l’aube d’une vie à l’argent facile en passant un casting pour une téléréalité, Miracle Island… Et pour camper cette insoumise Liane, une incroyable Malou Khebizi, actrice non professionnelle à la rage folle face à la caméra. Un véritable diamant brut.
Au final, un premier film traversé d’une incroyable fureur de vivre, à la mise en scène brute de décoffrage mais au ton d’une très grande justesse.
Here, les plus belles années de notre vie- Robert Zemeckis
Attention ça brille ! Tom Hanks, Robin Wright, Kelly Reilly ou encore Paul Bettany. Robert Zemeckis n’a pas lésiné sur le casting – réunissant son éternel duo de Forrest Gump – pour dérouler son audacieux tour de magie. Here, les plus belles années de notre vie est un fabuleux voyage dans le temps dans un lieu unique où défilent hommes et femmes sur trois générations.
Un dispositif puissant mais risqué. Un pari osé pour, au final, une réjouissante ode au cinéma et à son envoûtante sorcellerie, le tout signé par l’un des meilleurs conteurs d’histoire.