
Comédie sur quatre amis quarantenaires, la nouvelle série Netflix par les créateurs de Plan cœur, à découvrir le 24 janvier, fait le job. Elle met en lumière des talents avec lesquels il faudra compter : Ariane Mourier, Antoine Gouy et Vincent Heneine.
Ils s’appellent Tom, Cédric, Tonio et Jérémie, et ils sont les héros de Super mâles, la nouvelle série made in France de Netflix, disponible à partir du 24 janvier. Avec ces quatre potes, c’est bel et bien à un voyage que Noémie Saglio et Olivier Rosemberg, les créateurs et réalisateurs du show, et Julien Teisseire et Estelle Koenig, showrunners avec Noémie Saglio, nous invitent. Direction : Quadraland. Et c’est peu dire que, sur la planète des quarantenaires, on est légèrement perdu…
Tranches de vie
Tom (Manu Payet), auteur de BD en panne d’inspiration, ne se remet pas d’avoir été quitté par Andréa (Alysson Paradis), avec qui il a un fils, Milo, 16 ans. Cédric (Guillaume Labbé), directeur de création dans une agence de publicité, « mâle alpha », voit son monde s’effondrer quand on lui impose de partager son poste avec une femme, ce qu’il refuse.

Il démissionne et ses finances dégringolent. Une situation qu’il cache à Léna (Olga Kurylenko), sa compagne, ex-mannequin reconvertie en influenceuse, qui revendique haut et fort ses convictions féministes ; à Magda, 15 ans, sa fille née d’une précédente union ; et à ses amis. Tonio (Vincent Heneine), patron d’un restaurant, connaît, lui, une histoire avec Delphine (Mélanie Bernier), avocate spécialisée dans la gestion des divorces.
Il en est fou amoureux, rêve de l’épouser, mais ne peut s’empêcher de la tromper. Quand cette dernière, réfractaire au mariage, lui propose d’être « un couple libre » – manière, selon elle, d’entretenir la flamme, Tonio est déstabilisé. Toutefois, il accepte son pacte. Quant à Jérémie (Antoine Gouy), policier, il est marié depuis 14 ans avec Cécile (Ariane Mourier), monitrice d’auto-école, avec qui il a deux jeunes enfants, Ulysse et Iris.

Écrasés par le quotidien – leur rôle de parents, le travail, un déménagement qui ne se concrétise pas depuis dix ans… –, ils se sont complètement oubliés. Cécile veut provoquer un électrochoc et fait tout pour pimenter leur relation. Jérémie ne ménage pas ses efforts. Mais pas facile de retrouver la passion quand la charge mentale s’invite à chaque instant. Comme la trentaine, que Noémie Saglio et Julien Teisseire avaient explorée avec Chris Lang à travers leur série Plan cœur (2018-2022), déjà une production Netflix, la quarantaine n’est donc pas un long fleuve tranquille.
Des influences anglo-saxonnes revendiquées
Remake de la série espagnole Machos alfa, elle aussi visible sur Netflix et dont la troisième saison vient d’être mise en ligne, Super mâles, composée de six épisodes d’environ 30 minutes, s’inscrit dans un genre bien identifié : « le film/la série de potes ». Côté cinéma, le genre a été alimenté par un nombre incalculable de longs métrages comme Mes meilleurs copains de Jean-Marie Poiré (1989) ou encore le diptyque Les petits mouchoirs et Nous finirons ensemble de Guillaume Canet (2010-2019).

Dans le champ de la série, la liste est également fournie, de l’Américaine Seinfeld (1989-1998) à la française Mes amis, mes amours, mes emmerdes (2009-2015). Noémie Saglio, Julien Teisseire et Estelle Koenig n’ont pas la prétention de révolutionner ce genre. Ils s’en approprient les codes et les mixent avec des influences anglo-saxonnes clairement revendiquées, dont le style Judd Apatow. Dans Super mâles, le langage est cru et on n’a pas peur de la vulgarité.
Comme on n’a pas peur, non plus, des sentiments. Si le titre laissait penser que le show serait une réflexion exhaustive sur la place de l’homme dans la société post-#MeToo, ce n’est pas vraiment le cas. Le sujet est traité, mais essentiellement dans le couple formé par Cédric et Léna. Le thème central, celui qui innerve les épisodes, c’est la quarantaine.

D’ailleurs, Super mâles aurait pu échanger son titre avec celui d’un film de Judd Apatow : 40 ans, mode d’emploi (This is 40 en anglais, 2013). À 40 ans, est-on dépassé ? L’amour peut-il être aussi beau qu’à 20 ? L’insouciance est-elle encore permise face au poids des responsabilités ? Peut-on remettre en cause des certitudes figées depuis des années ? Ce sont ces questions qui sont posées, avec humour et sensibilité, à travers les portraits de Tom, Cédric, Tonio et Jérémie.
Une tirade qui marquera les esprits
Certains affirmeront que les états d’âme de quarantenaires parisiens, c’est vu et revu, voire irritant. Peut-être. Mais, ici, ça fonctionne. Les ingrédients de la recette ? Tout d’abord, un scénario maîtrisé, qui a digéré ses références, sans pour autant être exempt de lourdeurs (la longue séquence des champignons hallucinogènes dans l’épisode 4 était dispensable). À cela s’ajoutent une mise en scène soignée, une tendresse pour ces protagonistes paumés et des acteurs au top.

Manu Payet nous régale en dépressif romantique, tout comme Guillaume Labbé en ahuri qui ne comprend rien à l’époque – dans l’épisode 3, il faut voir sa tête lorsque, dans la boîte où il se recycle, son projet de publicité est retoqué par un parterre de membres de la Gen Z. Olga Kurylenko est parfaite en néo-instagrammeuse et Mélanie Bernier délivre une prestation nuancée dans la peau de Delphine, avocate qui refuse les conventions.
Et il y a ces comédiens que l’on connaissait peu et qui nous ont enchantés. Grâce à son interprétation, Vincent Heneine extrait Tonio de la caricature dans laquelle un tel personnage aurait pu être enfermé. Ariane Mourier et Antoine Gouy, eux, nous font hurler de rire – la scène, dans l’épisode 1, où ils rencontrent des difficultés à se servir d’un sextoy est mémorable.
Ils nous touchent également en plein cœur. Leurs échanges de regards en disent long sur l’amour que ceux qu’ils incarnent, Cécile et Jérémie, se portent, malgré le temps qui passe. Et des séquences marqueront les esprits. Dans l’épisode 2, Cécile se lance dans une tirade sur son quotidien de femme et de mère au bout du rouleau qui devrait parler à beaucoup de personnes. Un discours qu’Ariane Mourier transforme en morceau de bravoure. En bref, Super mâles fait le job, et, osons le jeu de mots, le fait super bien. On passe un excellent moment et la série déploie au fil des épisodes une profondeur qui nous a cueillis. Vite, une saison 2 !