La langue allemande a généré une littérature particulière, associée à l’Histoire de pays comme l’Allemagne, l’Autriche, ou la Bohème. Elle fut aussi le berceau du romantisme, et offrit au monde quelques-uns des plus grands écrivains du XXe siècle, en particulier Thomas Mann et Stefan Zweig. Voici les plus grandes œuvres de cette sphère linguistique particulière.
Le Loup des steppes, de Herman Hesse
Asocial intellectuel d’un côté, jouisseur invétéré de l’autre, Henry Haller doit réconcilier les deux pôles de sa personnalité. Son cheminement tisse la toile de fond du Loup des steppes. Dans ce roman à plusieurs voix (y sont consignés un récit à la première personne, un traité de psychanalyse, ainsi que le regard d’un personnage secondaire), Herman Hesse fait intervenir la danse jazz, l’amour et la sociabilité pour exprimer la manière avec laquelle un homme peut assumer toutes les parties qui le constituent. Livre culte longtemps incompris, ce roman reste l’un des plus fameux exemples de la modernité littéraire allemande, et un ouvrage à lire pour s’accepter dans un monde injuste et conformiste.
La Montagne magique, de Thomas Mann
La littérature allemande a inventé un genre à part entière, le « Bildungsroman », consacré à l’apprentissage de la vie par un personnage principal. La Montagne magique en demeure le roman canonique. Le reçu débute avec l’arrivée d’Hans Castorp dans un sanatorium en altitude. D’abord ennuyé, il va progressivement s’intégrer à cet étrange milieu hors du temps où la maladie n’empêche pas de féconds dialogues philosophiques entre pensionnaires. Thomas Mann y dévoile les grands débats de son temps, tout en décrivant avec justesse le commencement d’une vie d’adulte à tous les niveaux.
À l’ouest rien de nouveau, de Erich Maria Remarque
La Première Guerre mondiale a entraîné un courant littéraire résolument démonstratif des horreurs de la guerre dans l’Europe des années 1910-1920. À l’ouest rien de nouveau, récit signé Erich Maria Remarque, en est l’un des symboles. S’attachant à montrer le quotidien peu reluisant des tranchées, la dureté des combats, ce témoignage à valeur édifiante a retranscrit, en Allemagne, le traumatisme majeur du conflit pour toute une génération exigeant que jamais pareil événement ne se reproduise.
Les Souffrances du jeune Werther, de Johann Wolfgang von Goethe
Immense succès littéraire du XVIIIe siècle, Les Souffrances du jeune Werther de Goethe incarne le début du romantisme allemand, en ce sens que son personnage principal souffre d’une sensibilité exacerbée, d’une imagination sans borne et connaît un destin tragique. Dans sa forme épistolaire comme dans ses préoccupations – la passion impossible, le triangle amoureux -, ce roman a initié les lecteurs d’Europe à la vivacité d’esprit de la littérature allemande de l’époque du Sturm Und Drang et influencé les arts du XIXe siècle.
Le liseur, de Bernhard Schlinck
Best-seller des années 1990 en Allemagne, écrit par un auteur jusque-là cantonné aux romans policiers, Bernhard Schlink, Le liseur a fait date, narrant l’amour impossible entre un jeune lycéen et une conductrice de tramway plus âgée que lui. Si la littérature est elle-même l’un des sujets du livre (l’amant fougueux lisant des passages d’œuvres à sa maîtresse), la deuxième partie du récit nous plonge dans l’immédiate après-guerre : le procès d’Hanna, l’héroïne, nous amène à une suite de révélations qui fait le sel d’un ouvrage à twist indispensable.
Berlin Alexanderplatz, de Alfred Döblin
L’une des fresques urbaines les plus significatives du XXe siècle… Berlin Alexanderplatz suit la vie de Franz Biberkopf, ancien prisonnier, qui tente de se racheter en s’intégrant à la société. À la façon des films allemands de l’époque (celle de la fin du cinéma muet), le roman de Döblin nous entraîne dans le chaos de la ville, le décor devenant parfois plus important que l’intrigue elle-même.
Le Joueur d’échecs, de Stefán Zweig
Comme son titre l’indique, Le Joueur d’échecs nous décrit l’étrange histoire d’un amateur rompu aux arts de l’échiquier qui affronte l’illettré mais brillant champion du monde de la discipline, sur un bateau. L’occasion pour Zweig de revenir sur le parcours des deux protagonistes : l’aristocrate challengeant le meilleur joueur de la planète sort tout juste des geôles nazies. La dernière nouvelle de l’auteur, à l’aura très importante aujourd’hui, nous donne certaines clés pour comprendre le déclin de l’Europe lors de la guerre, qui causa à l’écrivain une peine irrémédiable.
Siddhartha, de Hermann Hesse
En s’inspirant, dans les années 1920, des doctrines religieuses indiennes (l’hindouisme et le bouddhisme en particulier), Herman Hesse a écrit l’un des plus beaux livres sur la spiritualité qui soit. Roman d’apprentissage et de sagesse, Siddhartha et son style si apaisant nous amènent sur un chemin de pensée éloigné des dogmes.
Le Mur invisible, de Marlen Haushofer
Une femme partie en week-end se retrouve isolée par un mur invisible dressé entre le terrain attenant au chalet qu’elle occupe et le reste du monde. Elle doit s’organiser pour survivre dans un domaine limité, tout en n’ayant plus aucun contact avec les êtres vivants au-delà de cette barrière. Merveille de science-fiction, malheureusement un peu oubliée, Le Mur invisible a porté Marlen Haushofer parmi les meilleurs écrivains autrichiens du XXe siècle.
Faust, de Johann Wolfgang von Goethe
Deux pièces de Goethe portent le nom de Faust, la seconde étant la suite de la première. Le poète allemand y conte le parcours fameux d’un personnage avide de connaissance philosophique qui finit par vendre son âme au diable, incarné par Méphistophélès. L’amour de Marguerite, la question de la rédemption et l’horreur de l’humaine condition vont peu à peu surnager dans cette œuvre absolument fondamentale de la littérature mondiale.
Le Parfum, de Patrick Süskind
Dans la France du XVIIIe siècle, Jean-Baptiste Grenouille ne dégage aucun effluve corporel mais est doté d’un odorat exceptionnel. Des tanneries jusqu’aux ateliers de parfumeurs, il va mettre son talent mais aussi sa pathologie mentale, au service de son projet existentiel : se faire accepter, aimer et obéir par tout un chacun. La vision démiurgique du Parfum de Patrick Süskind et son audace littéraire en ont fait un chef-d’œuvre immanquable.
Les Buddenbrook : Le déclin d’une famille, de Thomas Mann
À travers le parcours de trois frères nés dans une famille commerçante bourgeoise de Lübeck, Thomas Mann a dressé le terrible portrait de l’individu dans sa quête d’une image publique cachant ses errements intérieurs. La première grande œuvre réaliste du génie allemand du XXe siècle en est aussi l’une des plus captivantes, par son ampleur et son profond attachement à saisir la vérité des êtres. Les Buddenbrook : le déclin d’une famille est à redécouvrir d’urgence !
Krabat, de Otfried Preussler
L’écrivain allemand d’origine tchèque Otfried Preussler s’est fait connaître grâce à une imposante œuvre à destination de la jeunesse. Son roman le plus connu peut se lire à tout âge : dans Krabat, un jeune homme devient apprenti d’un meunier après avoir été guidé en rêve. Il découvre petit à petit le vrai visage de son maître, dans une atmosphère étrange, décrite avec la maestria d’un auteur culte outre-Rhin.
L’Histoire sans fin, de Michael Ende
Devenue fameuse grâce au cinéma et à la télévision, L’Histoire sans fin demeure l’un des romans jeunesse les plus célèbres de la langue allemande. L’aventure de Bastien Balthazar Bux débute lorsqu’il qui se retrouve dans le Pays Fantastique à la suite du vol d’un livre. Un univers fantasy, avec une jolie mise en abyme, a fait la réputation d’un ouvrage qui fait voyager l’imaginaire et de son auteur, Michael Ende.
La Métamorphose et Le Procès de Franz Kafka
L’œuvre de Franz Kafka, écrite en allemand, a connu une étrange postérité, l’auteur ayant couché sur testament que ses écrits ne soient jamais publiés. La Métamorphose (novella autour d’un jeune homme se réveillant transformé en cafard géant) et Le Procès (un homme est arrêté et traduit en justice sans aucune idée du motif d’inculpation) sont devenues pourtant deux des plus grands textes de l’Histoire. Paranoïa, existentialisme et ambiance d’inhumanité ont fait de l’écrivain tchèque, aux côtés de Joyce ou Proust, le romancier du XXe siècle.
La Mort à Venise, de Thomas Mann
Oeuvre remarquée pour sa brièveté (ce qui n’est pas l’habitude de Thomas Mann), La Mort à Venise dépeint une relation homosexuelle sur fond de culture artistique et de tensions philosophiques. Entre le respectable Gustave Von Aschenbach et l’éphèbe Tadzio, la relation psychologique et morale atteint une telle intensité qu’elle est restée canonique dans la littérature mondiale.
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