Un premier musée uniquement composé d’oeuvres numériques a été inauguré à Seattle, aux Etats-Unis. Le marché des NFT (jetons non-fongibles) se chiffre aujourd’hui en dizaine de milliards de dollars.
Le Seattle NFT Museum (SNFTM), lancé par un couple d’entrepreneurs de la Tech, a ouvert ses portes en janvier dernier à Belltown, un quartier huppé de Seattle. Le musée y expose des oeuvres numériques sur une trentaine d’écrans, proposant une programmation variable à l’exception d’un parcours permanent censé expliquer aux visiteurs le concept de NFT et son potentiel. « L’intérêt d’avoir un lieu physique est de faciliter l’accès à tous », a déclaré à l’AFP Peter Hamilton, cofondateur du musée. Pour rappel, un NFT est un certificat d’authenticité rattaché à un objet virtuel – en l’occurrence, une oeuvre d’art numérique – généré grâce à la technologie sécurisée de la blockchain. « Vous pouvez entrer et, peu importe ce que vous savez ou non à propos de l’art numérique, des NFT, car vous pouvez voir les œuvres présentées en grand format, d’une manière qui vous rappelle une exposition dans un musée », a-t-il ajouté.
L’incursion de cette technologie dans le monde de l’art semble avoir porté ses fruits puisque le marché des NFT se chiffre aujourd’hui en dizaine de milliards de dollars (plus de 40 milliards en 2021 selon la plateforme spécialisée Chainalysis). Les maisons de vente se sont immédiatement prises au jeu, à l’instar de Christie’s, qui a organisé en mars 2021 la vente d’une œuvre de l’artiste Beeple pour 69,3 millions de dollars (58 millions d’euros), devenant alors l’œuvre numérique la plus chère de l’Histoire. Aujourd’hui, cette tendance dépasse largement le monde de l’art et touche aussi bien l’industrie musicale que les jeux vidéos, le cinéma et le monde numérique en général – on se souvient que le premier tweet de l’Histoire, du fondateur de Twitter Jack Dorsey, a été vendu sous forme de NFT pour près de trois millions d’euros.
Les limites des NFT
L’arrivée des oeuvres numériques et l’essor des cryptomonnaies n’ont pas encore gagné tous les acteurs du monde de l’art. En France, les ventes publiques de NFT ne sont autorisées qu’à condition d’être liées (pour l’instant) à des oeuvres physiques. De plus, ce marché est largement gonflé par l’engouement autour de séries de NFT comme le Bored Ape Yacht Club (plus de deux milliards de chiffre d’affaires depuis sa création en 2021), collection d’avatars numériques que des célébrités s’arrachent à prix d’or, mais qui ne reflètent pas du tout la réalité du marché de l’art. Sans compter que les artistes et collectionneurs d’oeuvres numériques s’exposent à de nombreux risques : impostures, escroqueries, pillage virtuel, etc.
Dans un secteur totalement dérégulé, tout contenu peut potentiellement se décliner sous forme de NFT, quitte à sortir du cadre de la loi : ainsi, fin janvier, un scandale éclatait au sein de l’AP-HP suite à la vente de la radio d’un patient victime des attentats du 13 novembre sur OpenSea, plateforme où, par ailleurs, plus de 80% des NFT créés s’avèrent frauduleux. Pour l’instant, cette plateforme (dont les ventes dépassent les dix milliards de dollars) n’est pas tenue de vérifier la légalité du contenu qu’elle héberge.