
L’auteur américain, maître du roman noir, sera cette année parmi les stands du festival lyonnais qui célèbre les intrigues sombres, les figures troubles et les plumes acérées.
Il se surnomme lui-même le « Demon Dog » de la littérature policière américaine. Un sobriquet sombre et atypique, qui colle pourtant parfaitement à l’auteur de Los Angeles. Avec sa prose musclée, son verbe sec, sa fascination pour les ténèbres de l’âme humaine, James Ellroy n’écrit pas : il cogne. Et du 4 au 6 avril, c’est à Lyon qu’il posera ses poings, invité d’honneur de la 21e édition du festival Quais du Polar, haut lieu du roman noir en France.
Enfance d’un crime
Né à L.A. en 1948, Ellroy porte en lui l’histoire d’une Amérique désenchantée. Celle des années 1950, rythmée par la corruption policière, les scandales politiques, les drames jamais élucidés. Dans sa propre vie, le premier d’entre eux survient alors qu’il n’a que dix ans : sa mère, Geneva Hilliker, est assassinée. Le meurtre reste sans réponse, et devient le traumatisme originel qui irrigue toute son œuvre. Il y reviendra frontalement dans Ma part d’ombre (1996), une autobiographie saisissante saluée par la critique.
Avant d’être un auteur culte, Ellroy est un survivant ; de l’alcool, de la rue, des hôpitaux. Dans les années 1970, il sort la tête de l’eau grâce à l’écriture. Son premier roman, Brown’s Requiem paraît en 1981, bientôt suivi par Clandestin et la trilogie du détective Lloyd Hopkins. Le style est déjà là : une écriture syncopée, nerveuse, minimaliste.
Mais c’est en 1987 qu’il frappe fort, avec Le dahlia noir, plongée dans le meurtre d’Elizabeth Short, une jeune actrice assassinée dans des circonstances atroces. Cet ouvrage le propulse sur la scène littéraire mondiale et se voit même adapté en film en 2006 par le réalisateur Brian de Palma, avec Josh Hartnett et Scarlett Johansson.
Un auteur culte
Le dahlia noir est en outre le premier tome de son fameux Quatuor de Los Angeles, suivi par Le grand nulle part (1988), L.A. Confidential (1990) — également adapté au cinéma par Curtis Hanson en 1997 — et White Jazz (1992).
Ellroy y déconstruit le rêve américain à travers une fresque tentaculaire de flics véreux, de journalistes cyniques et de politiciens corrompus. Dans un article du Monde, à propos de son dernier livre, Les enchanteurs (2024), le quotidien souligne : « Ellroy affûte son scalpel et crève les abcès d’un Hollywood en plein âge d’or finissant, capitale du vice en voie de décomposition avancée, où Orson Welles photographie les ébats de stars de cinéma pour confectionner des jeux de cartes porno vendus sous le manteau. »
Lyon, capitale du noir
Sa venue à Quais du Polar s’annonce comme l’un des temps forts de cette 21e édition, placée sous le signe des Frontières — géographiques, littéraires, sociales. L’an dernier, le festival avait accueilli plus de 100 000 visiteurs. Près de 125 écrivains de 17 nationalités sont attendus cette année. Conférences, rencontres, prix littéraires, projections : pendant trois jours, Lyon se transformera en capitale du crime littéraire — et James Ellroy, en parrain vénéneux de cette grande messe noire.