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Un an après Résistance renaissance : porter la voix des femmes afghanes

10 avril 2025
Par Benoît Gaboriaud
La Fnac Bercy a organisé une rencontre autour du sort des femmes afghanes.
La Fnac Bercy a organisé une rencontre autour du sort des femmes afghanes. ©SibRapid/Shutterstock

Il y a un an tout juste sortait Résistance renaissance, un poignant recueil écrit et dessiné par un collectif de personnalités publiques qui portait haut la voix des femmes afghanes, aujourd’hui réduites au silence. Pour célébrer cet anniversaire, la Fnac Bercy Village invitait le 5 avril Hamida Haman, journaliste et fondatrice de Radio Begum, Alexia Laroche-Joubert, Julie Gayet et Sophia Aram, à revenir sur le recul incessant des droits fondamentaux des femmes afghanes, un phénomène tragique qui se noie dans un flux d’actualités trop dense.

En ce beau week-end de printemps, les Parisiens, parfois sifflotant, se ruent dans les parcs où chantent les oiseaux. Une démarche naturelle dont doivent désormais se priver les femmes afghanes. « On associe souvent la situation de la femme iranienne à celle de la femme afghane, mais les femmes afghanes rêveraient d’être des femmes iraniennes », rappelle Hamida Aman qui, au sein du forum de la Fnac Bercy Village, élève la voix pour qu’en Afghanistan, celles des femmes ne s’éteignent pas. 

Un soutien éducatif et psychologique

Cette journaliste et productrice de télévision connaît bien le sujet. Sa double nationalité franco-afghane lui permet de se rendre dans ce pays qui tend à se refermer complètement et volontairement sur lui-même, afin d’isoler au maximum les femmes qui y vivent. Hamida Aman les côtoie. Mieux, elle a offert un emploi à une trentaine d’entre elles, d’anciennes journalistes et professeures, à Radio Begum, une radio éducative qui émet sur une majorité du territoire depuis Kaboul et qu’elle a fondée le 8 mars 2021, à l’occasion de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes.

Rencontre à la Fnac Bercy. ©Benoît Gaboriaud

Cet espace de parole libre a pour objectif d’apporter une éducation à celles qui en sont privées. « Nous diffusons des cours radiophoniques niveau collège et lycée à l’intention des jeunes filles et des adolescentes, ainsi que des programmes de soutien psychologique et de santé. Les femmes peuvent nous appeler et échanger avec nos psychologues et gynécologues qui leur donnent des consultations. Ainsi, nous pouvons prendre le pouls de cette population condamnée », souligne Hamida Aman.

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Ce système de communication est encore toléré par les talibans, car, « comble du cynisme ! », s’exclame Alexia Laroche-Joubert, la femme y est invisibilisée. Pour autant, Hamida Aman reste dans leur viseur. Déterminée, elle a fondé, il y a un an, TV Begum à Paris, une chaîne de télévision moins soumise à la censure, mais visible en Afghanistan. « Tout cela reste fragile. Notre radio a été récemment interrompue quelques semaines et deux de nos collaboratrices ont été emprisonnées », souligne-t-elle.

Pour ne pas oublier

Pour célébrer l’anniversaire de Résistance renaissance, Julie Gayet et Sophia Aram, qui ont, elles aussi, collaboré à cet ouvrage, ont souhaité rejoindre Hamida Aman, aux côtés d’Alexia Laroche-Joubert, pour lui apporter son soutien et faire entendre les voix de toutes les femmes afghanes muselées par le régime obscurantiste et violent des talibans. « Nous pouvons clairement parler d’apartheid de genre. Pour ma part, j’ai la chance d’avoir ce micro tendu. Avec mon humour, mes outrances et mes gros sabots, je tente de leur redonner la voix qu’elles ont perdue. En France, le sujet est souvent abordé, mais nous l’oublions trop vite. C’est donc utile d’être là aujourd’hui et de prendre la parole le plus souvent possible », confie Sophia Aram, humoriste, journaliste et chroniqueuse.

« Nous pouvons clairement parler d’apartheid de genre. »

Sophia Aram

Julie Gayet la prend, elle, pour faire entendre les mots d’une jeune Afghane extraits du livre : « J’ai beaucoup étudié pour accomplir mon rêve, mais celui-ci a été brisé en une seule nuit, me laissant seule à mon chagrin… J’ai réussi à rejoindre une de ces écoles [clandestines]. J’y étudie encore plus dur qu’avant. Si les talibans n’étaient pas revenus, je serais aujourd’hui en seconde. Avec tous mes efforts acharnés, j’ai déjà réussi à terminer de lire le programme de première, bien résolue à ne pas les laisser m’arracher à mon rêve. Ils ne pourraient jamais m’enlever ni mes crayons, ni mes livres, ni ma soif d’apprendre. »

Des témoignages encourageants

Ce genre de témoignage nourrit quotidiennement les motivations d’Hamida Aman et lui donne la force de poursuivre. Une belle énergie saluée par le public, particulièrement concerné. « Ma copine est franco-afghane, mais nous avons du mal à avoir des nouvelles du pays par les canaux traditionnels. Ce genre de manifestation nous permet de croiser la route de personnes qui en reviennent », se réjouit Maxime Rezé, jeune Parisien. Quant à Lysiane Marchal, elle trouve cette initiative extraordinaire, « car elle nous permet d’entrer en contact avec des gens engagés qui nous mettent le pied à l’étrier et qui nous permettent de nous sentir un peu moins impuissantes ».

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Résistance Renaissance avec Leïla Slimani, Julie Gayet ou encore Patrick Cohen. L’intégralité des droits d’auteurs du livre est reversée au profit de Radio Begum pour faire entendre la voix des femmes, proposer des programmes éducatifs à distance et tisser des liens de solidarité à travers le pays et au-delà.

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