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Des tatouages en graphène pour surveiller votre corps en temps réel

23 mars 2025
Par Florence Santrot
Des tatouages en graphène pour surveiller votre corps en temps réel
©DR

Ces tatouages feront office de véritables capteurs invisibles et entendent révolutionner la santé connectée en surveillant en temps réel fréquence cardiaque, glucose et stress pour une médecine préventive personnalisée.

Et si votre peau devenait un tableau de bord médical ultraconnecté ? Des chercheurs de l’Université du Texas à Austin et de l’Université du Massachusetts Amherst ont imaginé un tatouage invisible, capable de suivre votre fréquence cardiaque, votre taux de glucose ou encore votre niveau de stress en temps réel. Pas dans un futur lointain, mais demain, grâce aux avancées fulgurantes dans les tatouages électroniques en graphène. Des dispositifs aussi fins qu’une cellule humaine et aussi performants qu’un électrocardiogramme, qui promettent de révolutionner la santé connectée.

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Les avancées récentes en bioélectronique ont considérablement accéléré le développement de ces dispositifs. Initialement limités à des prototypes en laboratoire, ils sont désormais testés dans des conditions réelles. Plusieurs entreprises et centres de recherche travaillent sur leur miniaturisation et leur autonomie énergétique, afin de permettre une utilisation prolongée sans nécessiter de recharge ni de dispositif externe encombrant. Allant de la surveillance des signes vitaux au diagnostic précoce, ces tatouages pourraient s’imposer comme des outils incontournables pour la médecine de demain.

Un capteur invisible, une révolution médicale

Le principe est aussi simple qu’une décalcomanie pour enfants : une fine pellicule de graphène, ultraflexible et conductrice en électricité, se colle sur la peau avec un peu d’eau. À la différence des montres connectées et autres « wearables », ces tatouages électroniques se fondent totalement à l’épiderme. Résultat : aucun inconfort, aucune gêne. Et surtout, une précision de mesure inégalée puisque le dispositif épouse totalement la forme et les mouvements de la peau.

Ces tatouages high-tech sont le fruit d’années de recherche sur les matériaux bidimensionnels, en particulier le graphène, ce supermatériau composé d’une seule couche d’atomes de carbone. Léger, ultrarésistant et biocompatible, il se prête parfaitement aux applications médicales. En 2017, les chercheurs Deji Akinwande et Nanshu Lu, de l’Université du Texas, avaient mis au point les premiers tatouages électroniques en graphène (GETs). Depuis, la technologie s’est affinée et les applications se multiplient.

Des tatouages en graphène pour surveiller votre corps en temps réel
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Du suivi cardiaque à l’analyse de la sueur

L’un des développements les plus prometteurs concerne le suivi cardiovasculaire. Aujourd’hui, mesurer sa pression artérielle en continu reste compliqué : les tensiomètres classiques nécessitent un brassard et ne permettent que des mesures ponctuelles. Les tatouages en graphène, eux, utilisent la bioimpédance – la résistance électrique des tissus – pour suivre les variations du flux sanguin en temps réel, comme l’a démontré une étude publiée dans Nature en 2022. Couplés à une intelligence artificielle, ils pourraient détecter les premiers signes d’hypertension ou d’arythmie avant même l’apparition de symptômes.

Autre domaine d’application : la biochimie corporelle. Nos fluides corporels regorgent d’informations sur notre état de santé. Grâce aux tatouages-capteurs, il devient possible d’analyser en continu la sueur pour y détecter des niveaux anormaux de cortisol (hormone du stress), de glucose (pour les diabétiques) ou encore d’acide lactique (indicateur de fatigue musculaire). Plus besoin d’une prise de sang ou d’un examen en laboratoire : votre propre peau devient une interface médicale en temps réel.

Vers une médecine préventive et ultrapersonnalisée

L’un des avantages majeurs des tatouages en graphène est leur capacité à collecter des données sur le long terme. Contrairement aux examens médicaux ponctuels, ils permettent d’observer les évolutions physiologiques d’un individu sur des semaines, des mois, voire des années. En accumulant ces données, les chercheurs espèrent détecter les tendances précoces de certaines pathologies chroniques, comme le diabète ou les maladies cardiovasculaires.

Des tatouages en graphène pour surveiller votre corps en temps réel

Par ailleurs, ces tatouages pourraient ouvrir la voie à des thérapies préventives ultra-personnalisées. En croisant les données biométriques d’un individu avec des algorithmes prédictifs, il deviendrait possible d’anticiper un problème de santé avant même qu’il ne se manifeste. Une montée de stress anormale ? Votre tatouage pourrait vous avertir avant une crise d’angoisse. Une chute progressive de votre rythme cardiaque au repos ? Un signal pour consulter avant un éventuel problème cardiaque.

L’avenir du tatouage : science-fiction ou réalité ?

Au-delà du domaine médical, ces tatouages pourraient ouvrir la voie à de nouvelles interactions homme-machine. Suivi des performances sportives, détection de polluants dans l’environnement, interfaces tactiles invisibles… On imagine déjà des applications dans l’armée, la recherche spatiale ou encore la cybersécurité. Imaginez un tatouage qui fait office de clé d’identification biométrique ou qui peut alerter automatiquement les secours en cas de malaise.

Reste un défi majeur : intégrer ces tatouages au quotidien sans nécessiter d’électronique externe. Aujourd’hui, les GETs doivent être reliés à un boîtier pour fonctionner. À terme, les chercheurs espèrent les connecter directement à une montre ou un smartphone via des antennes flexibles. Mieux encore, certains envisagent des circuits entièrement constitués de graphène, rendant ces tatouages totalement autonomes… et quasiment invisibles.

Entre promesses et défis technologiques

Ces tatouages électroniques en graphène sont encore en phase de développement, mais les premiers essais cliniques sont prometteurs. Le défi principal reste leur industrialisation et leur accessibilité. Comment produire ces capteurs à grande échelle, à un coût abordable ? Comment garantir leur durabilité sur la peau sans qu’ils se dégradent au fil du temps ? Et surtout, comment sécuriser les données personnelles qu’ils collectent ? La recherche a encore du chemin à faire avant la commercialisation.

Néanmoins, d’ici quelques années, ces tatouages pourraient bien devenir aussi communs que les patchs de nicotine ou les tests de glycémie. Une révolution discrète, mais qui pourrait transformer notre rapport à la santé. Et si, au lieu de prendre sa tension chez le médecin, il suffisait d’un coup d’œil sur son avant-bras ?

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