Décryptage

Comment Conan le Barbare, une franchise vieille de près de 100 ans, arrive encore à nous fasciner

14 mars 2024
Par Samuel Leveque
“Conan le Barbare” (1982) avec Arnold Schwarzenegger est le film le plus culte sur le personnage.
“Conan le Barbare” (1982) avec Arnold Schwarzenegger est le film le plus culte sur le personnage. ©20th Century Fox

Plus de 90 ans après sa création sous la plume du romancier américain Robert E. Howard, le personnage culte reçoit encore de nouvelles adaptations.

Difficile de parler de Conan sans évoquer son créateur. Atteint de dépression, ce jeune homme fragile et solitaire a connu une carrière littéraire éclair, et s’est donné la mort en 1936, à l’âge de 30 ans, après avoir imaginé quelques dizaines de nouvelles et de romans. L’essentiel de son œuvre est désormais oublié, mais il a laissé derrière lui deux héros légendaires du monde de la fantasy : Kull le Conquérant et Conan le Cimmérien, sorte de « deuxième version » de Kull.

Un des premiers personnages du genre de la fantasy

Pour se lancer dans les aventures de Conan, il faut tout d’abord oublier les clichés qui font de lui un barbare analphabète et violent. Dans les textes de Howard, le personnage est un chevalier valeureux, vivant dans un passé vague et lointain (l’âge hyborien), assez épris de justice, séducteur et doté d’un solide sens de l’humour. Ses péripéties, narrées dans le désordre, empruntent autant au registre de la littérature médiévale qu’à l’horreur ou au récit de bataille.

Kull, puis Conan, sont, sous la plume de leur auteur, des héros complexes, évoluant dans un monde à la géopolitique élaborée. Leurs histoires ont ainsi posé les bases de nombreux récits ultérieurs du registre de l’heroic fantasy et inspiré des générations entières d’auteurs. L’image du guerrier musculeux et stupide de Conan a été forgée bien plus tard, quand d’autres artistes, en particulier Lyon Sprague de Camp, ont repris le personnage après la mort de son créateur, pour en faire des pastiches assez détachés de l’œuvre d’origine.

Un univers vaste et complexe

Cette vision d’un Conan brutal et bas du front atteint son apogée dans les années 1960 avec les illustrations de Frank Frazetta, et deux décennies plus tard plus avec son interprétation par Arnold Schwarzenegger dans une série de films. Néanmoins, ces différents opus et les très nombreux comics publiés par Marvel permettent d’entretenir la flamme et de conquérir de nouveaux lecteurs.

Barack Obama, fan de la licence, y fera même une apparition dans une minisérie, Barack the Barbarian, en 2009.©Devil's Due Publishing

Il faut dire que le monde imaginé par Howard est vaste et propice à de nombreuses histoires qui passionnent un public adolescent : des récits de duels, de magie, d’affrontement épiques et de politique qui ont par ailleurs été les livres de chevet d’un certain Barack Obama. C’est aussi un univers qui se prête particulièrement bien aux récits illustrés spectaculaires, avec ses monstres tentaculaires, ses guerriers et ses mages venus de contrées mythiques.

De quoi inspirer des dizaines d’auteurs de comics qui continuent à s’emparer du personnage près d’un siècle après sa création – dont les talentueux Jim Zub et Rob de la Torre qui livrent une version modernisée du personnage dans une série à paraître ce mois-ci chez Panini Comics.

De nouveaux récits pour moderniser la licence

Ces nouveaux récits, destinés à entretenir la flamme du guerrier cimmérien, sont issus de la volonté de Cabinet Entertainement – propriétaire depuis 2022 des droits de Howard après une lutte acharnée et complexe – de maintenir une forte activité autour de la licence. En effet, le personnage de Conan est tombé dans le domaine public dans de nombreux pays, mais ce n’est pas le cas aux États-Unis, où il devrait recevoir ce traitement en 2027. En attendant, les nouveaux comics sont la propriété de Titan, lui-même éditeur possédé par Cabinet.

Conan imaginé par Rob de la Torre en 2023. ©Titan Comics

À compter de 2027 ou 2028 (il y a débat), la plupart des éditeurs ou des cinéastes qui le souhaitent pourraient logiquement présenter « leur » Conan. Il n’est donc pas surprenant de voir l’actuel propriétaire des droits s’activer pour proposer des versions palpitantes et modernisées du personnage. Pour le moment, les résultats sont positifs : les premières séries de Titan ont reçu d’excellentes critiques, les rumeurs de films ou de séries télévisées se multiplient, et le personnage semble ne pas avoir perdu son aura avec le temps.

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Il faut dire qu’entre-temps, le genre de l’heroic fantasy a acquis ses lettres de noblesse. Il est finalement sorti de la seule littérature pulp pour être diffusé auprès du grand public. Près d’un siècle après que Robert E. Howard a créé un personnage qui était, en grande partie, une projection littéraire brillante de tout ce qu’il ne parvenait pas à être (un aventurier valeureux, preux et jovial), Conan continue d’inspirer des cohortes de créateurs d’histoires épiques et de lecteurs en quête d’aventures.

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