Article

À la Fondation Henri Cartier-Bresson, Weegee fait l’Autopsie du spectacle

31 janvier 2024
Par Apolline Coëffet
Charles Sodokoff and Arthur Webber Use Their Top Hats to Hide Their Faces, 1942.
Charles Sodokoff and Arthur Webber Use Their Top Hats to Hide Their Faces, 1942. ©Weegee / International Center of Photography. Louis Stettner Archives, Paris.

Du 30 janvier au 19 mai 2024, la Fondation Henri Cartier-Bresson célèbre l’œuvre de Weegee avec Autopsie du spectacle. Au fil de ses images, le photographe n’a eu de cesse d’interroger les regards et les représentations des faits divers.

Les faits divers, quels qu’ils soient, exercent une certaine fascination sur les foules. « Les curieux […], ils sont toujours pressés […], mais ils trouvent néanmoins le temps de s’arrêter pour regarder », remarquait Weegee à ce propos. En ce moment même, le photographe américain, connaisseur en la matière, fait l’objet d’une vaste rétrospective à la Fondation Henri Cartier-Bresson. Intitulée Autopsie du spectacle, l’exposition retrace l’ensemble de sa carrière, allant des clichés crus qui l’ont d’abord fait connaître à ses derniers tirages, qui entremêlent scènes festives et portraits de célébrités. 

Une carrière en deux parties

« Il y a une énigme Weegee. La carrière du photographe américain semble être scindée en deux », remarque à juste titre Clément Chéroux, commissaire d’exposition et directeur de la Fondation Henri Cartier-Bresson. Entre 1935 et 1945, Weegee sillonnait New York à la recherche de faits divers. Branché aux ondes de la police, il accourait toujours de telle sorte à être le premier à immortaliser des personnes en état d’arrestation, des corps gisants de criminels, des accidents de voiture, des immeubles dévorés par les flammes ou encore le quotidien des plus démunis. Ces images de rue, brutales – et souvent recadrées par les médias, comme le montre les coupures de presse, également exposées –, étaient publiées dans les tabloïds nord-américains de l’époque.

Au printemps 1948, las de cette pratique de la photographie, il part s’installer à Hollywood, où il s’immisce dans l’industrie cinématographique. Dès lors, des moments de joie et de fêtes se distillent dans ses compositions monochromes. Weegee commence également à tirer le portrait de personnalités publiques et politiques, qu’il retouche lors du développement afin de les déformer jusqu’à la caricature. 

Critique de l’industrie du spectacle

« Les exégètes se sont plu à renforcer l’opposition entre ces deux périodes, à encenser la première et à détester la seconde. L’exposition Autopsie du spectacle a pour ambition de réconcilier les deux Weegee en montrant qu’au-delà des différences de formes, la démarche du photographe repose sur une réelle cohérence critique », assure Clément Chéroux. À cet effet, pour la première fois, plusieurs fonds ont été réunis pour rassembler un total de 126 images d’époque, tirées par leur auteur pour l’essentiel, et dont certaines n’ont jamais été présentées en France.

À partir de
55€
En stock
Acheter sur Fnac.com

Au fil des salles se découvre finalement une industrie protéiforme, dévoilée sous un même prisme. La théâtralisation des faits divers, devenus semblables à des spectacles, se heurte à une critique incisive du spectaculaire hollywoodien. Autopsie du spectacle offre ainsi une autre lecture du grand œuvre de Weegee, qui intéressera autant les amateurs de photographie que les curieux.

À lire aussi

Article rédigé par
Apolline Coëffet
Apolline Coëffet
Journaliste