Décryptage

Mais c’est quoi ce délire avec Scott Pilgrim ?

16 novembre 2023
Par Michaël Ducousso
“Scott Pilgrim” revient en série d'animation pour en découdre avec tous les ex de Ramona Flowers.
“Scott Pilgrim” revient en série d'animation pour en découdre avec tous les ex de Ramona Flowers. ©Netflix

Après les comics et le cinéma, le personnage de nerd devenu culte revient en série animée sur Netflix. Un événement aux allures de phénomène générationnel.

C’est officiel : Scott Pilgrim est de retour. Mais qu’est-ce qui explique tout cet affolement autour de ce petit personnage qui prend son envol ? Bien sûr, la série animée de Netflix est produite par Science SARU, le studio de l’un des génies japonais de l’animation (Masaaki Yuasa). Mais ça n’explique pas tout. Les acteurs du film culte d’Edgar Wright reviennent également pour prêter leurs voix aux personnages qu’ils ont campés en 2010, mais ce n’est pas non plus la raison de toute cette excitation. Si les fans sont aussi emballés par cette nouvelle production Netflix, c’est parce qu’elle marque le retour du héros de toute une génération.

Le premier des héros geeks ?

Avec ses airs de losers et sa petite vie assez pathétique, Scott Pilgrim n’a pourtant rien de bien héroïque. Bien sûr, il est né dans les comics, mais il ne porte pas de cape ni de masque. Il est simplement lui : un adulescent tendance nerd, travailleur précaire et rockeur se produisant surtout dans un garage. Rien de bien admirable.

Même sa vie sentimentale, qui va d’une relation sacrément louche et pas trépidante à la romance qui vire au tournoi d’arts martiaux, n’a rien d’enviable. Alors, pour comprendre pourquoi ce petit loser canadien est devenu l’icône d’une génération, il faut revenir à une époque pas si lointaine et pourtant radicalement différente : le début des années 2000.

Le héros aux traits cartoonesques de Bryan Lee O’Malley est devenu une icône pour toute une génération de geeks.©HiComics

Lorsque le comic-book indépendant de Bryan Lee O’Malley sort pour la première fois, à l’été 2004, Big Bang Theory n’a même pas fait l’objet d’un pilote, Player One n’est pas écrit et Iron Man n’a pas encore propulsé Marvel au cinéma.

Apparaît alors Scott Pilgrim, « un comics au format manga, en noir et blanc, avec un mec qui jouait de la Megadrive en faisant des blagues sur sa vie, mais au final sur la nôtre », se rappelle Sullivan Rouaud, alors simple lecteur, fan d’univers geeks, et aujourd’hui directeur éditorial de HiComics qui publie le chef-d’œuvre d’O’Malley en France.

Mélange de rock, de jeux vidéo et de romance totalement déjantée, Scott Pilgrim a été un échec au cinéma avant de devenir culte.

« C’était une BD pleine d’humour méta et de références à la pop culture, poursuit-il. Une approche dont on commence à se lasser aujourd’hui, mais qui était hyper nouvelle à cette époque. » Résultat, le nerd canadien a très vite trouvé son public, avec « plus de 20 000 exemplaires vendus en 12 semaines en France. Un chiffre que l’on ne connaît plus aujourd’hui dans les comics », précise Sullivan Rouaud.

Le succès a été tel que le petit comic-book indé a attiré les regards de l’industrie du cinéma et notamment d’Edgar Wright, réalisateur célèbre pour sa « trilogie Cornetto », qui n’était encore qu’un diptyque lorsqu’il s’est lancé dans l’adaptation filmique de Scott Pilgrim.

Un film culte pour faire découvrir l’œuvre d’un génie de la BD

Alors que la série de BD s’achevait en août 2010, le réalisateur britannique livrait une production fidèle à l’œuvre d’origine, bourrée de références aux jeux vidéo et servie par des acteurs aujourd’hui incontournables (Aubrey Plaza, Chris Evans, Brie Larson…).

Résultat : c’est un bide. Aux États-Unis, les résultats financiers ont été jugés décevants, mais en France, où la sortie a été repoussée à décembre, cela a été bien pire, Scott Pilgrim ayant fait à peine plus de 23 000 entrées durant sa première semaine d’exploitation.

La série de Netflix s’annonce très fidèle aux comics dont elle reprend l’esthétique qui a fait le charme de l’œuvre d’O’Malley.©Netflix

C’est pourtant devenu une œuvre culte, grâce au bouche-à-oreille et aux recommandations entre geeks. Le film a en effet connu une seconde vie, beaucoup plus réussie, en DVD. Le public a ainsi pu découvrir une excellente adaptation et, pour certains, le comics qui l’avait inspirée. Un comics qui résonnait avec leurs propres vies. Voilà pourquoi ils sont si nombreux aujourd’hui à s’extasier de l’arrivée prochaine de Scott Pilgrim sur Netflix. Mais le retour du héros canadien n’est pas qu’une bonne nouvelle pour les geeks nostalgiques.

La nouvelle adaptation des aventures de Scott Pilgrim sort le 17 novembre sur Netflix.

Elle l’est également pour tous ceux qui voudraient découvrir l’œuvre de celui qui, pour Sullivan Rouaud, est ni plus ni moins un « génie de la BD ». Cela tombe bien, les spectateurs de Scott Pilgrim prend son envol pourront poursuivre leur découverte avec le coffret intégral de l’œuvre originale, sorti cet automne, ou avec Seconds, autre merveille d’O’Malley, republiée par Dargaud dans une nouvelle édition cet été. De saines lectures qui permettront de patienter en attendant la première édition française du roman graphique de l’artiste, Lost at Sea, annoncée par HiComics pour l’an prochain.

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Article rédigé par
Michaël Ducousso
Michaël Ducousso
Journaliste
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