Entretien

Interview de Sophie Tal Men : « L’auto-édition est un excellent tremplin pour un écrivain »

17 octobre 2021
Par Anastasia

Elle s’est fait connaître en auto-éditant ses textes, elle est à présent l’auteure de quatre best-sellers publiés aux éditions Albin Michel. Sophie Tal Men, marraine 2019 du concours Kobo « Les Talents de demain », revient sur sa success story littéraire et livre de précieux conseils à qui souhaiterait sauter le pas de l’auto-édition. Passionnés de la plume, n’hésitez plus !

Quel est votre parcours dans le monde éditorial ?

Sophie Tal Men : Je suis neurologue en Bretagne et écrivaine. J’associe ces deux activités, la première nourrie l’autre et vice versa. Je suis publiée aux éditions Albin Michel et au Livre de Poche et j’ai écrit quatre romans pour l’instant. La trilogie : Les yeux couleur de pluie, Entre mes doigts coule le sable, De battre la chamade, et mon dernier qui s’appelle Qui ne se plante pas ne pousse jamais

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Vous avez commencez en auto-éditant votre premier livre…

Effectivement, mes débuts dans l’écriture étaient en auto-édition. J’ai d’abord envoyé mon premier roman à seize maisons d’édition et au bout de plusieurs mois j’ai eu deux réponses négatives, juste une ligne. J’étais un peu frustrée parce que je ne savais pas si mon texte avait réellement été lu.

J’ai un cousin photographe qui m’a fait une belle couverture, j’ai eu vent des auteurs qui avaient été propulsés en auto-édition et j’ai mis mon texte en un clic sans trop y croire, en envoyant le lien à mes amis. Là j’ai eu de la chance, car en trois semaines mon livre a été propulsé numéro 1 de la plateforme d’édition et donc très visible, avec plus de cent téléchargements par jour. J’ai été contactée par deux grandes maisons d’édition de Paris, à qui j’avais envoyé mon manuscrit, et le rêve est devenu réalité. 

Vous vous attendiez à ce succès ?

Non, je ne m’attendais vraiment pas à ce caractère très rapide et à cet appel des maisons d’édition, cet enthousiasme autour du livre. On m’a dit : « Tu es la seule à être médecin et à écrire des fictions sur ton milieu, avec des étudiants en médecine. » Je n’avais pas du tout pensé à ça. C’était vraiment extraordinaire ! Un grand souvenir. Je suis revenue chez moi et, dans le train, j’avais des étoiles plein les yeux. 

Quelles sont les différences entre s’auto-éditer et être publiée dans une maison d’édition ? 

C’est très différent ! En auto-édition, on est tout seul, on n’a pas de conseil, à part si on connaît des gens qui travaillent dans l’auto-édition, mais ce n’était pas mon cas. On a un peu peur d’être livré à soi-même. C’est donc très différent d’avoir des retours sur le texte. Dans une maison d’édition, il y a énormément de personnes qui nous entourent, qui nous conseillent. On travaille le texte avec l’éditrice, on nous accompagne dans les salons, on rencontre nos lecteurs. Je trouve que l’auto-édition est un excellent tremplin, mais c’est chouette d’avoir la chance d’éditer son texte et de pouvoir vivre ce métier d’auteur et toutes les rencontres qui vont avec. 

Quels sont vos conseils pour démarrer dans l’auto-édition ?

Il faut se lancer ! Ce n’est pas facile de croire en soi, mais tous les artistes ont ce même sentiment. Ce n’est pas facile de croire que ce qu’on a fait est assez bien pour être lu… Mais si on a vraiment l’envie et qu’on a vibré en écrivant son texte, il faut passer le pas, avoir un retour de lecteurs, c’est précieux. Il faut aussi travailler la couverture avec des copains un peu professionnels dans le domaine pour que la couverture soit accrocheuse, et travailler le résumé sur la plateforme pour qu’il donne envie. Les premiers lecteurs seront les amis, mais ce sont des lecteurs précieux. Il faut croire en son univers, il ne faut pas avoir des regrets dans la vie. Je dis souvent à mes enfants : « Si on a des rêves, il faut aller jusqu’au bout. Si ça ne se réalise pas, ce n’est pas grave parce que tu auras au moins essayé. » Et puis c’est vrai qu’à l’heure actuelle il y a plein de tremplins différents. Les auteurs viennent soit de l’auto-édition, soit des blogs, soit ils sont journalistes. Il y a plein de moyens d‘approcher une maison d’édition… Par exemple les concours d’écriture, comme « Les Talents de demain« , organisé par Kobo et les éditions Préludes.

La-maladie-de-SachsAvant la publication de votre premier livre, quel était votre rapport à l’écriture ?

J’écris tout le temps, depuis que je suis petite. Ça pouvait être des petits poèmes, des petits textes… J’ai toujours eu ce rapport à l’écriture. Je faisais beaucoup de théâtre, et j’écrivais aussi des pièces de théâtre avec des copains. À la fac de médecine, j’ai monté une troupe de théâtre : on a joué La Maladie de Sachs de Martin Winckler. Il nous a fait un beau cadeau : il est venu à notre représentation à la faculté de Rennes et j’ai pu échanger avec lui. C’était un grand moment et ça m’a aussi donné envie de passer le pas. On peut être médecin et écrire ! Justement, en étant médecin, on a plein de choses à raconter et on a un rapport aussi à l’autre qui est un peu différent. 

Ce n’est pas trop difficile de concilier vos deux métiers ?

Non, c’est même grisant, d’avoir ces deux vies, de passer de l’un à l’autre, de changer d’étiquette, de rencontrer deux mondes différents. Finalement, c’est un épanouissement incroyable.

Qu’est-ce que ça vous a fait d’être marraine du concours « Les Talents de demain » ?

J’ai tout de suite accepté ! C’est vrai que j’ai des liens privilégiés avec Kobo qui m’accompagne depuis mes débuts, donc ça me faisait plaisir. Les éditions Préludes sont en lien avec Le Livre de Poche qui m’accompagne aussi. C’était vraiment un plaisir pour moi d’accompagner un jeune auteur auto-édité, le propulser et qu’il vive l’aventure comme j’ai pu la vivre. C’était un exercice très rigolo de lire les cinq manuscrits sélectionnés avec des univers très différents, des genres très différents et d’assister à la réunion de délibération avec des professionnels de l’édition, de discuter du texte, d’avoir leur avis. C’était très chouette, je recommencerai avec plaisir !

Vous aviez des attentes de lecture ?

Je souhaitais découvrir un univers, une musicalité, rentrer dans une histoire et ne pas la lâcher jusqu’au bout. Et effectivement mes attentes ont été récompensées. 

Avez-vous un prochain projet de roman ?

J’ai toujours un projet de roman ! J’ai déjà fini mon futur roman qui sortira en mars/avril, ce n’est pas encore bien défini, aux éditions Albin Michel. Et je suis sur l’écriture du suivant. Je ne me mets pas la pression, j’ai mon autre métier de médecin à côté, j’écris le soir quand mes enfants sont couchés ou bien un après-midi devant la mer, parce que j’ai la chance d’habiter en Bretagne face à la mer. J’ai toujours un livre d’avance avec un esprit saga, des histoires comme des spin-off qui s’inscrivent en parallèle des autres, mais qui peuvent se lire complètement séparément. Soit on me connaît et on a le plaisir de retrouver mes personnages, soit on ne me connaît pas et on découvre l’univers. Les ingrédients : la Bretagne, l’univers médical, puisqu’effectivement c’est celui que je maîtrise bien, et puis souvent une histoire d’amour, de famille. 

Quelle est votre relation avec vos lecteurs ?

Je privilégie les rapports avec les lecteurs : je finis mon livre avec mon adresse mail et mes liens sur les réseaux. Il n’y a pas un jour où un lecteur ne m’écrit pas par ce biais pour me faire un retour de lecture et ça, ça me motive, ça me donne confiance pour la suite, j’en ai besoin. Les rencontrer lors des salons, c’est très important. C’est quelque chose que je privilégie beaucoup parce que, finalement, en écrivant, on est tout seul devant son ordinateur, alors qu’on écrit aussi pour être lu. On a ce besoin-là de savoir si les personnages qu’on crée, si notre histoire va faire vibrer les gens. Et là, maintenant que j’ai rencontré plusieurs lecteurs, je sais que quand j’écris, j’écris pour eux. 

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Anastasia
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