Critique

120 battements par minute de Robin Campillo : le cœur battant

06 janvier 2018
Par Lucie
120 battements par minute de Robin Campillo : le cœur battant

La Palme d’or, Robin Campillo l’a déjà touchée du doigt puisqu’il était scénariste d’Entre les murs, le film de Laurent Cantet récompensé en 2010. Cette fois-ci, c’est en tant que réalisateur qu’il présente en compétition 120 Battements par minute, chronique saisissante des débuts d’Act Up Paris.


Un exercice salutaire

Sur le sida, on avait vu les films sur la discrimination (Philadelphia), sur l’amour malgré tout, version dramatique (Les Nuits fauves) ou version comédie musicale (Jeanne et le garçon formidable). Mais un film politique sur la lutte pour sortir l’épidémie des cercles des minorités ou marginaux qu’elle décimait en priorité (homos, toxicos, prostitués, détenus), cela manquait. Maintenant que l’on peut vivre avec la maladie, on en viendrait presque à oublier qu’il fut une époque où les gens, souvent très jeunes, mourraient en quelques mois dans l’indifférence générale, sans avoir eu le temps d’attendre les agendas politiques ou économiques.

adèle haenel

Petite et grande histoire mêlées

C’est donc sur les premières actions d’Act Up Paris, au début des années 1990, que se concentre 120 battements par minute. Une présentation d’abord didactique – via l’introduction de quatre petits nouveaux à la lutte active. Didactique, presque documentaire, car nourrie de la propre expérience du réalisateur, mais jamais pesante, tant Robin Campilloussit à mêler toutes les dimensions de son histoire avec un naturel bluffant. Le politique et l’intime, le collectif et l’individu, tout est imbriqué. Avec l’œil du cinéaste, on suit les débats sur la radicalisation d’Act Up, les priorités à défendre, l’opportunité ou non de taper toujours plus fort. Avec les acteurs, tous exceptionnels, on redonne des vies, des émotions, des joies, des colères à ces morts anonymes qu’Act Up a si souvent dénoncés. Un condensé de vie, dans tous ses excès. L’urgence est présente partout. Dans la volonté de vivre, de danser, d’aimer. Dans celle de mobiliser, de parler, d’expliquer, de réveiller quitte à secouer.

 120-bpm

La Croisette sous le choc

Et secoué, on l’est dans la dernière partie de 120 battements par minute. Le film quitte un (petit) moment la politique pour laisser place à un grand film d’amour. Celui entre un jeune homme de 26 ans, Sean, condamné par la maladie, et un autre jeune homme, Nathan, séronégatif. Avec lui, on regarde l’autre mourir, petit à petit, irrémédiablement. La fin est là, la mort rôde. Et Robin Campillo s’attarde sur ce moment, intime s’il en est, devenu par la force de la lutte collective, un moment d’émotion partagée, de politique toujours en mouvement, de solidarité déterminée. Des cendres dispersées de Sean en un ultime bras d’honneur, naît la pulsion de vie, le désir de continuer à lutter, ensemble.

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Article rédigé par
Lucie
Lucie
rédactrice cinéma sur Fnac.com
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