Critique

Apatride, le roman incendiaire de Shumona Sinha

31 janvier 2017
Par Frédérique
Apatride, le roman incendiaire de Shumona Sinha
©dr

Alors que beaucoup d’écrivains contemporains indiens décident d’écrire en anglais plutôt que dans une langue régionale, Shumona Sinha originaire du Bengale, se tourne vers la culture française et c’est dans la langue de Molière, de Rousseau et de Voltaire qu’elle s’exprime. Son dernier roman fait se croiser trois destins de femmes nées en Inde, consumées par le même désir de liberté et de vérité. Existe-t-il une terre d’asile pour ces femmes ?

Esha

Shumona-Sinha-ApatrideEsha a émigré en France où elle est enseignante. Elle n’est sans doute pas le double de l’auteure, mais Shumona Sinha a puisé dans ses propres expériences (notamment d’interprète à l’OFPRA) pour retracer le parcours de cette femme éprise de liberté et d’indépendance, en butte aux complications administratives, aux problèmes de communication entre communautés. Esha peine à se faire « une place » en France : la solitude est le prix de son idéal.

Mina

Pour Mina, fille de paysans bengalis, c’est une autre histoire : sa voie est théoriquement toute tracée : travail au village, mariage arrangé. Mais elle a, elle aussi, soif de liberté et de reconnaissance. Elle se jette à corps perdu et avec beaucoup de naïveté dans un mouvement d’insurrection paysanne et dans une histoire d’amour impossible.

Marie

Le lien entre ces deux femmes : Marie. Née elle aussi au Bengale, adoptée par une famille française. Révoltée et éprise de vérité, notamment sur ses origines, elle part en Inde à la recherche de ses parents biologiques. Mauvais ange pour Mina qu’elle fascine, énigme pour Esha qui a fait le chemin inverse de l’Asie vers l’Occident, toutes trois ont en commun un feu intérieur, potentiellement destructeur.

Un idéal qui part en fumée ?

Quel espoir pour ces trois apatrides, ces femmes qui doivent lutter pour trouver leur place quel que soit le continent ? Si Mina est victime de la violence des traditions et du machisme de la société indienne, la terre d’asile dans laquelle Esha avait sans doute fondé beaucoup d’espoir est un modèle décevant. Violence communautariste et sexiste, préjugés : ni l’Inde ni la France ne semblent être pour l’auteure la patrie idéale.

Apatride est le 4e roman de Shumona Sinha. Assommons les pauvres !, son 2e roman, a obtenu le Prix du roman populiste 2011 et le Prix Valéry-Larbaud 2012. Calcutta, 3e roman, a reçu le Prix du rayonnement de la langue et de la littérature française, décerné par l’Académie Française, et le Grand Prix du Roman de la Société des gens de lettres.

Paru le 5 janvier 2017 – 192 pages

Apatride, Shumona Sinha (Éditions de L’Olivier) sur Fnac.com

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