Critique

Jonas Kaufmann, ténor héroïque et crooner

05 septembre 2014
Par Frédérique
Jonas Kaufmann, ténor héroïque et crooner
©dr

Jonas Kaufmann les chantait en bis dans ses concerts. Il eut l’idée d’en faire un programme complet. Le ténor héroïque reprend donc ici le répertoire de Richard Tauber, Jan Kiepura et Joseph Schmidt, les stars de l’opérette dans le Berlin des années 30…

La plupart de ces artistes étaient autrichiens. Les compositeurs Franz Lehar, Emmerich Kalman, Ralph Benatzky ou Robert Stolz, leurs interprètes Richard Tauber, inséparable de Lehar, ou Robert Schmidt, son concurrent direct feront durant une dizaine d’années, les grandes heures des scènes berlinoises. Cette période marque aussi le début de l’opérette au cinéma devenu parlant, double défi pour les chanteurs dont la voix et le physique devaient passer aussi bien sur scène que sur l’écran. Une période charnière à bien des égards, qui dans le domaine de l’opérette fait se conjuguer des couleurs encore viennoises avec les influences du cabaret et du jazz.

Comme le précise le chanteur dans sa présentation, cette musique dite « légère » est sans doute facile à écouter mais beaucoup moins facile à interpréter. Il faut à la fois surmonter ses difficultés techniques comme un regisqtre souvent tendu, et garder la légèreté propre à ce répertoire, être à la fois le ténor héroïque et le crooner. Une prouesse visiblement  tout à fait à la portée de Jonas Kaufmann qui a pris un grand plaisir à enregistrer ces airs. Il est dans son élément de prédilection dans Die Gosse Sünderin de Eduard Künneke ou Giuditta de Lehar, très proches de l’opéra et change de registre avec des airs de Paul Abraham ou Benatzky plus swing et cabaret.

Le programme se termine par le très beau Glück, das mir verlieb, extrait de l’opéra de Korngold, Die tote Stadt. Pourquoi un opéra après toutes ces œuvres légères ? Tout d’abord car ce fut un grand succès à Berlin dans ces mêmes années. Mais c’est aussi pour une évocation de ce qui historiquement va suivre : l’exil en Amérique de la plupart de ces musiciens qui étaient souvent d’origine juive et leur apport crucial à la musique de film hollywoodienne, dont Korngold fut justement un des représentants les plus illustres.

Si ce n’est pas une totale nouveauté pour ceux qui ont entendu Jonas Kaufmann en récital, l’entendre dans ce répertoire léger surprendra sans doute ceux qui ne le connaissent que sous son image de Heldentenor. Malgré son timbre sombre, il s’en sort plutôt bien, c’est que le monsieur est doué et ça on le savait déjà ! Et peut-être cela changera-t-il un peu le regard du public français, parfois un peu dédaigneux à l’égard de l’opérette ?

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Sur cette vidéo Jonas Kaufmann chante parfois en anglais mais rassurez-vous, sur l’album il chante tous les airs en allemand :

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Frédérique
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