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Bad Boy : la série phénomène de Netflix est-elle surcotée ?

05 mai 2025
Par Sarah Dupont
“Bad Boy”, le 2 mai sur Netflix.
“Bad Boy”, le 2 mai sur Netflix. ©Netflix

Succès critique en Israël, Bad Boy frappe fort avec son récit de rédemption juvénile. Mais derrière les éloges et les comparaisons flatteuses, cette série carcérale est-elle vraiment à la hauteur de sa réputation ?

Portée par le nom du créateur de la version originale d’Euphoria, Bad Boy a d’emblée été propulsée dans la catégorie des séries-événements. Huit épisodes sous tension, inspirés de la jeunesse délinquante du comédien israélien Daniel Chen, aujourd’hui humoriste reconnu.

Co-réalisée par Hagar Ben-Asher et Ron Leshem, cette production nous plonge dans l’univers carcéral d’un centre pour mineurs en Israël. Deux mois après le raz de marée Adolescence, elle s’impose comme une autre immersion dans les failles d’une jeunesse brisée.

L’enfer des barreaux

Tout commence par l’arrestation brutale de Dean, 13 ans, dénoncé par sa propre mère. Transféré au centre pénitentiaire pour mineurs d’Okef, il y fait la connaissance de Zion Zoro, un codétenu. Entre scènes de détention violentes, relations complexes avec les adultes en charge et retours récurrents sur le Dean adulte devenu Daniel, la série déploie une mise en scène originale et une narration morcelée. Le Parisien salue « la qualité de la réalisation et le jeu des acteurs [qui] apportent une véritable profondeur au récit ».

©Netflix

Le réalisme cru, directement inspiré de la jeunesse de Daniel Chen, confère à Bad Boy une intensité rarement atteinte dans les drames carcéraux. Pour Martin Cid Magazine, l’œuvre réussit à mêler « humour, réalisme » et une « qualité cinématographique » qui capte l’attention.

Justesse et singularité

Le lien entre Dean et Zoro, construit sur l’ambiguïté, constitue l’un des piliers émotionnels du récit. The Time reconnaît que « la série est bien meilleure lorsqu’elle retrace la relation du jeune Dean avec son compagnon de cellule », incarné par Havtamo Farda. Movie Jawn évoque de son côté une « amitié magnifiquement illustrée » et relève la justesse rare dans l’interprétation des rôles.

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Autre atout souligné : la direction artistique. Malgré une esthétique parfois dissonante, certains critiques relèvent l’originalité de l’approche. Martin Cid Magazine voit dans l’alternance entre passé et présent « un portrait complexe de son protagoniste », où le stand-up ne sert pas seulement de commentaire, mais devient une forme de catharsis.

La quête d’équilibre

Si Bad Boy peut séduire, elle ne fait pas l’unanimité. À commencer par sa comparaison inévitable avec Adolescence, autre succès de Netflix sorti quelques semaines plus tôt. Pour The Time, le show israélien pâtit de la proximité apparente entre les deux intrigues – même âge du protagoniste, même contexte de violences adolescentes – tout en manquant d’une « approche précise et perspicace ». Le magazine reproche un ton inégal et une narration confuse, marquée par « une structure narrative inutilement elliptique ».

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L’humour, pourtant censé jouer un rôle de contrepoint, divise. Le journal américain déplore des « plaisanteries superficielles ». L’équilibre entre satire et gravité reste fragile, perturbé par des éléments de mise en scène jugés incongrus, comme une bande-son oscillant entre folk et beats électroniques ou de brèves séquences animées. Movie Jawn note aussi qu’à force de vouloir embrasser plusieurs registres, la série finit parfois par s’égarer.

Des lacunes thématiques

Enfin, certains sujets cruciaux – racisme, conflit religieux, rôle des institutions – sont à peine esquissés. Là où Adolescence dressait un constat social incisif, Bad Boy semble s’éparpiller, sans donner à ces enjeux la place qu’ils méritent. Le personnage de Zoro, par exemple, est marqué par son origine éthiopienne, mais ce prisme reste sous-exploité. Les tensions entre détenus juifs et musulmans sont évoquées, puis vite abandonnées. Movie Jawn regrette ainsi que « le cœur émotionnel [de l’œuvre] semble en perpétuel mouvement ».

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Malgré ces lacunes, Bad Boy reste une proposition rare par son sujet, son origine et son ancrage dans l’expérience vécue. Le projet est ambitieux, sincère, viscéral. Mais comme le souligne The Time, il lui manque parfois « quelque chose d’essentiel » pour faire corps avec les attentes suscitées.

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