
Célébré le 6 mars à Paris, la sixième édition des Pégases a mis en lumière des productions françaises ambitieuses malgré les tensions qui secouent l’industrie du jeu vidéo.
Comme chaque année depuis 2020, la cérémonie des Pégases met à l’honneur les meilleures productions vidéoludiques françaises. Équivalent des César pour le jeu vidéo, cet événement organisé par l’Académie des arts et techniques du jeu vidéo célébrait jeudi soir sa sixième édition à La Cigale, à Paris. L’occasion de récompenser les studios qui ont marqué l’année 2024, dans un contexte toutefois difficile pour l’industrie.
Retour triomphal pour Prince of Persia
Sans surprise, Prince of Persia: The Lost Crown d’Ubisoft Montpellier s’est imposé comme le grand vainqueur, décrochant quatre récompenses, dont le « meilleur jeu vidéo » – mais aussi « meilleur univers sonore », « meilleur game design » et « meilleure accessibilité ». Sorti en janvier 2024, ce metroidvania revisite la franchise avec une esthétique en 2.5D et un nouveau gameplay. Le joueur incarne Sargon, un guerrier lancé à la recherche du prince de Perse dans un univers imprégné de mythologie.
Éloigné de la surenchère visuelle des blockbusters, le titre a brillé par son level design soigné, son rythme maîtrisé et ses nombreuses options d’accessibilité. Malgré un accueil critique enthousiaste, ses ventes n’ont en revanche pas atteint les attentes d’Ubisoft.
La surprise indépendante
Autre grand gagnant de la soirée : Caravan SandWitch, pour le « meilleur jeu vidéo indépendant », signé Studio Plane Toast. Ce jeu narratif invite le joueur à explorer un monde de science-fiction inspiré des paysages de Provence. Sorti en septembre dernier, il séduit par sa direction artistique solaire et sa narration intimiste, où l’aventure se vit au rythme d’une caravane itinérante.
Dans la catégorie « meilleur jeu vidéo mobile », c’est BEAST: Bio Exo Arena Suit Team, du studio Oh BiBi, qui s’est imposé. Ce jeu multijoueur compétitif, lancé en novembre dernier, mise sur des affrontements rapides en arène où les joueurs, équipés d’exosquelettes, s’affrontent dans un chaos maîtrisé.
Une prouesse visuelle pour Les fourmis
Côté excellence visuelle, le trophée a été attribué à Les fourmis, développé par Tower Five et édité par Microids. Adaptation vidéoludique du célèbre roman de Bernard Werber, ce jeu de stratégie en temps réel propose aux joueurs de gérer une colonie de fourmis dans un écosystème foisonnant. Son moteur graphique, qui parvient à retranscrire la perspective microscopique de ce monde miniature, a su convaincre le jury.
Quant à la distinction pour l’excellence narrative, elle revient à The Operator, une création de Bureau 81. Dans ce thriller technologique, sorti en juillet, le joueur incarne un enquêteur chargé de surveiller des communications et de démêler un complot inquiétant. Inspiré par des séries comme X-Files et Black Mirror, le jeu s’appuie sur un récit dense et une immersion renforcée par une mise en scène minimaliste.
Enfin, le titre du « meilleur jeu vidéo étranger » a réservé une surprise en sacrant Warhammer 40,000: Space Marine 2, développé par Saber Interactive et édité par Focus Entertainment. Très attendu depuis l’annonce de sa sortie, ce shooter a devancé des concurrents de taille, notamment Final Fantasy VII Rebirth.
Une industrie sous tension
Derrière ces récompenses, la cérémonie des Pégases s’est toutefois déroulée dans un climat morose. L’année 2024 restera marquée par une vague de licenciements sans précédent dans l’industrie, avec près de 15 000 suppressions de postes à travers le monde, dont plusieurs centaines en France.
Des studios majeurs comme Ubisoft et Don’t Nod ont été contraints de restructurer, tandis que de nombreux indépendants ont fermé faute de financement. La grève du 13 février dernier en France, une première pour le secteur, témoigne de la précarité qui touche une industrie pourtant en pleine expansion. Dans ce contexte, les Pégases apparaissent autant comme une célébration du talent que comme un rappel des défis qui attendent les créateurs de demain.