
Pour son 70e anniversaire, la Fnac célèbre son fonds photographique au moyen de Regards, un beau-livre publié aux éditions Gallimard. À cette occasion, la rédaction de L’Éclaireur revient sur quelques-uns de ces tirages qui ont marqué le 8e art. Ce mois-ci, lumière sur l’un d’eux, signé Gianni Berengo Gardin.
La Fnac continue de célébrer les liens étroits qu’elle a tissés, dès ses balbutiements, avec le 8e art. Après la publication de Regards aux éditions Gallimard à l’automne 2024, son fonds photographique s’est dévoilé au travers de plusieurs expositions. Celles-ci ont eu lieu dans des gares, au Salon de la Photo, à Paris Photo ou encore à Planches Contact. C’est à l’occasion de ce dernier festival, qui, chaque année, prend place à Deauville, que les visiteurs ont pu contempler Toscane, un tirage que Gianni Berengo Gardin a réalisé en 1965.
Ce monochrome apparaissait déjà dans l’ouvrage susmentionné et était consigné au neuvième chapitre, intitulé Natures mortes, paysages vivants. De fait, à l’image, la nature prédomine. Seuls deux êtres solitaires peuplent ce fragment de territoire italien qui s’anime sous le regard du public. Cette vision, apaisante et satisfaisante à l’œil, a d’ailleurs inspiré un texte à l’écrivain français Yannick Haenel.
De nouvelles perspectives
La composition est simple en apparence et, par son minimalisme, tend vers l’abstraction. Des cyprès bordent une route qui, en son milieu, scinde la photographie en deux parties égales. En haut se trouvent donc les arbres, d’un noir profond, comme des gouttelettes d’encre qui s’écoulent. En bas se distinguent une femme et un homme en mouvement, côte à côte. De là où nous nous tenons, ils semblent minuscules et fragiles. Leurs contours rappellent pourtant ceux des conifères, grands et droits. Sur cette ligne serpentine, le couple trace son chemin. Nul ne sait ce qui unit ces personnes, ni où elles se dirigent. Le paysage se prolonge avant de s’évanouir dans le lointain, ne donnant aucun indice aux spectateurs. Il faut alors se projeter.

Le bruit des pas, foulant le sable d’un blanc lumineux, se devine volontiers. Le soleil caresse le visage, à moins qu’il ne s’agisse d’une légère brise. Les nuances apparaissent selon nos états d’âme. Le ciel est tantôt azur, tantôt grisonnant. L’herbe est verte, pleine d’espérance, ou a déjà bruni à cause d’un été trop chaud. C’est le début d’un voyage hors du temps, la métaphore d’une relation qui, malgré les tourments, traversera l’agitation des jours pour gagner cet horizon inconnu, qui se dessine à mesure que nous avançons.
Au-delà de ce cliché, tout un monde existe ainsi. Nos imaginaires lui donnent un sens spécifique. Il invite à prendre le temps, à méditer ou à rêver. Après tout, il s’agit bien là d’un des rôles de la photographie : nous offrir la distance nécessaire à l’appréciation d’autres perspectives.