Décryptage

Alan Moore, mon amour !

02 octobre 2024
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Extrait du documentaire Alan Moore, Les vieux gangsters ne meurent jamais.
Extrait du documentaire Alan Moore, Les vieux gangsters ne meurent jamais. ©BBC Maestro

Depuis plus de 40 ans, le scénariste et écrivain trimballe avec une aisance déconcertante sa grande carcasse dans tous les pans de la pop culture. Retour sur la carrière d’un géant des littératures de l’imaginaire, qui inaugure cet automne une toute nouvelle série.

Avec ses presque deux mètres, son look destroy, sa longue chevelure argentée, cette immense barbe qui lui donne des airs de druide psychédélique, avec son adoration maintes fois répétée pour Glycon, la divinité-serpent de la Rome antique et ses punchlines acérées, Alan Moore fait partie de cette famille d’écrivains rares qui incarnent tout entier les univers qu’ils se proposent de nous raconter.

L’homme et l’œuvre se confondent dans un maelström imposant et foutraque, inquiet et déjanté, la célébration majestueuse d’un imaginaire débridé. À plus de 70 ans, presque 40 ans depuis la parution de Watchmen, la série de comics qui l’a révélé, il se lance dans une nouvelle série romanesque au carrefour de la fantasy et de la science-fiction. L’occasion de revenir sur la vie et l’œuvre d’un titan.

Révolutionner le comics

Né à Northampton, une petite ville du centre de l’Angleterre où il vit encore et hors de laquelle il ne s’est quasiment jamais aventuré, Alan Moore passe son enfance dans un des quartiers les plus pauvres d’Angleterre et trouve rapidement refuge dans la lecture. Dès l’âge de 6 ans, il découvre les comics anglais et surtout les super-héros américainsFlash, Superman, Les Quatre fantastiques –, qui sont pour lui une révélation. Renvoyé du lycée pour trafic de LSD – une drogue qui aura un impact déterminant sur sa littérature et dont il dira qu’elle lui a « permis de comprendre que la réalité n’était pas quelque chose de définitif. Que la réalité qui faisait notre quotidien était une réalité tout à fait valable, mais qu’il y en avait d’autres qui ne l’étaient pas moins » –, Alan Moore quitte définitivement le système éducatif pour se consacrer à sa passion dévorante pour la bande dessinée.

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Mais ce n’est qu’à la fin des années 1970, après plusieurs années d’extrême pauvreté, que sa carrière décolle enfin. Il se fait d’abord connaître pour ses histoires publiées dans le magazine 2000 AD, un hebdomadaire britannique de science-fiction, puis pour des interprétations dessinées des aventures de Docteur Who ou de L’Empire Contre-attaque. Il rencontre surtout Marvel UK, qui lui confie les rênes de Captain Britain, sorte d’alter ego local de Captain America. Pour démêler une histoire mise à mal par de nombreux scénaristes, il choisit une méthode radicale : annihiler l’univers de la série pour tout recommencer à zéro. Si la nouvelle histoire rencontre un certain succès public, le procédé n’est pas du goût de l’éditeur qui met fin à leur collaboration. Le point de départ d’une histoire tumultueuse entre Alan Moore et l’industrie du comics.

Mais, peu importe sa réputation de trublion, Alan Moore s’est fait un nom et multiplie les projets dans les innombrables revues du genre, avec toujours des fins tumultueuses. Il travaille surtout en parallèle sur deux histoires qui vont durablement marquer le monde du comics et même la pop culture tout entière.

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La première, Watchmen, est publiée de septembre 1986 à octobre 1987 chez le rival de Marvel, DC Comics. Le studio américain a repéré le talent du Britannique et l’a testé quelques années plus tôt sur la série Swamp Thing, l’histoire d’un être devenu mi-homme, mi-plante suite à un accident chimique. Avec Watchmen, Alan Moore entre définitivement dans la cour des grands.

En imaginant ce qu’aurait été le monde si les super-héros avaient réellement existé depuis les années 1940, en peignant une Amérique sombre et décrépie sur fond de menace nucléaire, en créant des personnages fascinants comme Le Comédien ou Dr Manhattan, sublimés par le dessin de Dave Gibbons, il fait étal d’un talent et d’un imaginaire hors du commun. Des années plus tard, la série aura le droit à plusieurs adaptations, dont un film signé Zack Snyder et une série imaginée par Damon Lindelof. Chose rare dans le milieu du comics, Watchmen remporte le prix du meilleur album étranger en 1989 à Angoulême.

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Une récompense qu’il remporte également l’année suivante avec un autre monument de l’imaginaire : V pour Vendetta, imaginé en collaboration avec David Lloyd. Dans cette dystopie anarchiste, il ressuscite la figure historique britannique de Guy Fawkes, qui tenta d’assassiner le roi Jacques 1er en 1605. Alan Moore réécrit l’histoire et invente un héros masqué qui combat une Angleterre tombée aux mains des fascistes à la fin du XXe siècle. Dessins et textes ne font qu’un dans cette œuvre fascinante, créée sans la supervision des grosses machines du comics – et donc furieusement libre et engagée. Enfin seul maître à bord, l’auteur déclarera quelques années plus tard : « Je suis convaincu que V pour Vendetta fut le premier pas de géant que je franchis vers mon propre style. »

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Son propre style et sa créativité sans borne s’incarneront d’ailleurs dans ses deux chefs-d’œuvre suivants. D’abord La Ligue des gentlemen extraordinaires, une œuvre illustrée par Kevin O’Neill et qui met en scène une équipe de choc composée des héros de la littérature populaire de l’époque victorienne comme Allan Quatermain, L’Homme invisible, le capitaine Nemo, Dr Jekyll et Mr Hyde, ou encore Wilhelmina Murray. Puis From Hell, une série publiée en France en 2000, qui propose une plongée terrifiante dans la psyché du tueur en série le plus célèbre de l’histoire : Jack L’Éventreur.

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Avec toutes ces œuvres déjantées, foutraques, révolutionnaires dans le style comme dans le propos, Alan Moore devient un pionnier qui préfigure l’avènement d’un genre à la croisée du récit littéraire et de l’album dessiné qui occupe aujourd’hui plus que jamais le devant de la scène : le roman graphique.

Un grand romancier aussi

En quête d’autres formes, Alan Moore annonce se retirer du monde des comics à partir des années 2000. Il prend du recul, multiplie les projets indépendants, publie un premier roman – La Voix du feu, passé inaperçu – et disparaît. Il faut attendre 2017 pour assister à son retour fracassant. Pendant plus de dix ans, il a rédigé un deuxième livre gigantesque aux allures de mémoires, une fresque de 1200 pages sur sa ville, sa vie, sa famille mais aussi sur la grande histoire du monde : Jérusalem.

Composée de trois parties, cette œuvre labyrinthique et foisonnante convoque à la fois les fantômes du passé d’Alan Moore et des figures historiques, comme William Blake, Lady Di ou Cromwell. Son quartier devient une métaphore du monde entier, un monde étrange et inquiétant, comme toujours chez Moore, où surgissent des ombres monstrueuses.

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Mais l’entreprise qu’il entame aujourd’hui est tout autre. À presque 71 ans, il s’élance dans une première saga romanesque, au carrefour de la fantasy et de la science-fiction. L’aventure débute à Londres en 1949. Un aspirant écrivain sans le sou, Denis Knuckleyard, subsiste en faisant des petits boulots pour un libraire d’occasion. Envoyé un jour chercher des livres rares chez un étrange bibliophile, il se trouve en possession d’un livre qui ne devrait pas exister, un livre imaginaire, inventé de toutes pièces dans une œuvre de fiction.

Denis est alors pris au piège d’une affaire qui le dépasse. Se pourrait-il qu’il existe une autre réalité ? Ce livre provient en fait d’un Londres alternatif qu’on appelle Le Grand Quand, une ville située au-delà de l’espace et du temps. S’il ne rapporte pas l’ouvrage dans l’autre monde, c’est la mort qui l’attend. Alors, le gamin des rues se jette à corps perdu dans les coins les plus obscurs et inquiétants de la ville, croise la route des êtres les plus excentriques, bien décidé à briser la frontière entre les mondes. Sans savoir que toute action dans l’un peut avoir de lourdes répercussions dans l’autre.

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Sorte de réécriture gothique et fantastique d’Olivier Twist et de tous les romans de Charles Dickens, servie par une impeccable traduction de Claro, qui suit Alan Moore depuis ses débuts romanesques, Le Grand Quand pose les jalons d’une aventure trépidante, mystique et bourrée d’humour noir. Un nouveau monument de l’imaginaire dont Alan Moore vient de poser la première pierre.

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