Conduit par les journaliste et historien Jeanne Guérout et Xavier Mauduit, cet essai retrace la chronologie de nombreux préjugés dont l’origine est parfois des plus surprenantes.
Les préjugés se définissent comme « des opinions préconçues et mal fondées » aux effets stigmatisants. De leur mauvaise augure souffrent les peuples, les nations, les genres, les physiques, les esprits qui en sont les cibles, favorisant le délitement de lien humain, la méfiance voir la défiance en société. Mais derrière chacun d’entre eux se cache une simple interprétation morale d’un groupe vis-à-vis d’un autre. Dont la genèse, l’origine, provient d’une comparaison créant la frustration, le sentiment de supériorité, ou à l’inverse celui d’infériorité.
Comprendre pour déconstruire
D’où vient la pensée que « les végétariens sont des gens tristes » ou que « les femmes sont hystériques » ? C’est à la manière originale d’une étude géologique que la quarantaine d’historiens réunis par Jeanne Guérout et Xavier Mauduit (instigateurs du projet), se sont penchés sur le sujet. Abyssal puisque ces redoutables idées reçues ne s’arrêtent pas à l’Homme, tout y passe y compris les animaux, les couleurs, les aliments et bien sûr les arts.
Dans Histoire des préjugés (Les Arènes) les lieux communs sont investis pour essayer de comprendre, décortiquer, comment une fois nés ces derniers ruissellent d’époques en époques, comment ils sont colportés, modifiés. Comment on les ironise aussi, prenant le risque de les populariser, de les banaliser, de les assoir. Pour les auteurs « faire acte de mémoire et de contextualisation » est une façon de les priver d’une partie de leur mal, d’autant plus dans un monde qui subit de plein fouet la montée du populisme et du complotisme.
Bien qu’expliquer un préjugé ne suffise pas à le détruire, cet essai se veut être une expérience de lecture enrichissante ; qui rappelle que nous sommes tous à un moment donné pris sur le fait accompli de la diffusion d’idées reçues, ou victime du grand drame des généralités. Ces mauvaises graines plantées parfois depuis des siècles dans les traditions, nichées dans les expressions de langage et dans les représentations sociales qu’il est évidemment beaucoup plus facile de condamner que de supprimer. C’est une manière de mieux nous comprendre, comprendre les autres et les mondes que propose cet « antidote contre la haine ».