En résumé
Au regard de la qualité du portage, il ne faut malheureusement pas attendre de cette version Switch qu’elle offre à Wolfenstein II: The New Colossus le succès qu’il mérite. Si le tout tourne relativement bien, c’est en effet au prix de grosses concessions sur le rendu visuel, lequel se caractérise par un flou permanent aussi disgracieux que gênant. Dommage, car s’il n’est pas révolutionnaire, ce nouvel épisode reste un jeu marquant de la fin de l’année dernière, qui dispose de nombreuses qualités tant d’un point de vue ludique que narratif. Car oui, ce n’est pas tous les jours qu’un jeu de tir en apparence bourrin arrive à nous émouvoir.
Note technique
Les plus et les moins
- Un scénario prenant
- La narration habile et bien rythmée
- Des personnages mémorables
- Un bon gros défouloir
- Certains niveaux artistiquement réussis
- Des doublages français réussis dans l’ensemble
- Le rendu visuel complètement flou
- Le 8 Go à télécharger pour avoir le jeu complet
- L’intelligence artificielle des ennemis pas bien fine
- Peu de grosses nouveautés depuis The New Order
Notre test détaillé
En 2014, l’ancêtre du jeu de tir en vue à la première personne qu’est Wolfenstein 3D s’offrait un retour à la fois inattendu, surprenant et réussi. Inattendu, d’abord, car on pensait la licence morte et enterrée. Surprenant et réussi, ensuite, car MachineGames, le studio à l’origine de cette résurrection, était parvenu à allier un trip régressif et jouissif à un univers consistant dans lequel évoluaient des personnages étonnamment attachants. Le public ayant répondu présent, une suite a logiquement été mise en chantier. Pourtant concocté à partir des mêmes ingrédients, l’excellent Wolfenstein II: The New Colossus sorti fin 2017 n’a hélas pas connu le même destin commercial. Une belle injustice que son récent portage sur Switch va tenter de réparer.
(Ce test a été réalisé sur Nintendo Switch.)
On pensait BJ Blazkowicz, mort après avoir héroïquement accompli sa mission dans Wolfenstein: The New Order, mais c’était sans compter sur les prouesses technologiques qu’autorisent les uchronies. Dans un monde où les États-Unis ont perdu la Seconde Guerre mondiale et sont occupés par les forces du IIIe Reich, une personne paraplégique peut en effet recouvrer l’intégralité de ses capacités motrices simplement en enfilant un exosquelette. Et tant pis si l’action se déroule pendant les années 1960.
Tueur au grand cœur
Vous l’aurez compris, ce second volet, comme son aîné avant lui, penche du côté de la série B, ce type de cinéma qui se démarque généralement par un ton décomplexé. Ceci dit, si cette filiation est clairement assumée, quand il s’agit notamment de décimer des hordes de nazis sans aucune subtilité, il ne faut pas croire que Wolfenstein II: The New Colossus n’est qu’un défouloir bête et méchant. On n’ira pas non plus jusqu’à dire qu’il fait réfléchir – il aurait fallu qu’il se montre moins manichéen pour cela, ou qu’il essaye de faire un parallèle avec l’Amérique d’aujourd’hui. Mais clairement, et à notre plus grande surprise, il sait émouvoir.
Les différents personnages croisés ont beau être caricaturaux, ils parviennent en effet à donner une ampleur insoupçonnée au récit. Certains, par la folie qui les anime, font froid dans le dos. D’autres donnent envie d’embrasser leur combat par le courage et la détermination qu’ils affichent. Il y en a aussi qui sont excessivement drôles tant ils peuvent être stupides. Mais l’on retiendra surtout que Blazkowicz n’est pas ce mâle alpha qu’il semble être. Tout au long de l’aventure, des cicatrices vont surgir du passé pour dresser le portrait d’un héros moins lisse qu’il n’y paraît.
La führer de vaincre
Le tout fonctionne d’autant mieux que les nombreuses cinématiques brillamment mises en scène s’intègrent parfaitement à la narration, conférant à la progression un rythme qui alterne efficacement entre plages de repos et fusillades musclées. Sur ce dernier point, Wolfenstein II est à peu près conforme à ce que l’on pouvait en attendre, c’est-à-dire qu’il mise sur une action frénétique et diablement efficace à défaut d’être originale. Que ce soit dans l’armement proposé, dans la gestion de la santé (qui oblige à ramasser des kits de soin, à l’ancienne) ou dans les ennemis rencontrés, cette suite ne propose en effet rien de réellement neuf par rapport à son aîné. Pas même une intelligence artificielle digne de ce nom en difficulté standard.
Pour trouver un peu de nouveauté, il faut se pencher du côté des niveaux. Ceux-ci affichent désormais une belle diversité, aussi bien d’un point de vue artistique (cela va du sous-marin un peu générique à un Manhattan en ruine) que dans leur construction. Certains passages se feront ainsi plus linéaires, pendant que d’autres prendront la forme d’arènes plus ouvertes pour permettre à l’action de déployer tout ce qu’elle compte d’intensité et de variété. Ainsi, on préférera enchaîner les exécutions au corps-à-corps lorsque les lieux se font exigus. Tandis que des environnements plus vastes se prêteront mieux aux gunfights. Ou à l’infiltration pour ceux qui souhaiteraient jouer la carte de la discrétion.
La fluidité plutôt que la netteté
Wolfenstein II: The New Colossus est un jeu qui mérite incontestablement une seconde chance. Mais quitte à être un peu direct, on ne saurait que trop vous conseiller, si vous le pouvez, de préférer les versions sorties sur les autres supports à ce portage Switch. Cela vous permettra de vous offrir le jeu pour bien moins cher. Mais aussi, et surtout, de profiter d’une réalisation digne de ce nom. Car si Wolfenstein II a été transposé sur la machine de Nintendo avec bon sens et sérieux, le résultat global est trop faible pour pleinement nous satisfaire.
Que ce soit avec la console posée sur son dock ou dans une configuration nomade, le jeu s’illustre par une résolution drastiquement revue à la baisse, qui a pour effet de rendre l’image extrêmement floue ; un effet d’ailleurs amplifié par la baisse du niveau de détails des textures. Se repérer dans les niveaux labyrinthiques devient alors fastidieux, tandis que viser avec précision sur des cibles lointaines relève de la mission impossible. Dommage, car à côté de ça, le jeu peut se montrer bluffant, tant par la qualité de ses modèles 3D que par son travail sur les éclairages qui garantit une atmosphère conforme à celle croisée sur les machines concurrentes.
Les différentes concessions que Panic Button, le studio en charge du portage, a dû se résoudre à faire pourront être rédhibitoires pour certains. Mais aussi gênantes soient-elles, elles étaient nécessaires pour garantir une animation à 30 images/seconde (contre 60 sur les autres supports). Si l’on a bien noté quelques petits décrochages ici et là, globalement le jeu tourne bien, ce qui permet à l’action de conserver toute sa nervosité et son intensité. Le principal est donc préservé. Pour finir avec les spécificités de ce portage, outre la possibilité d’activer une visée utilisant les capacités de détection de la console, notons que dans sa version cartouche, il impose un malheureux téléchargement d’environ 8 Go pour donner l’accès à l’intégralité de l’aventure.
Conclusion
Au regard de la qualité du portage, il ne faut malheureusement pas attendre de cette version Switch qu’elle offre à Wolfenstein II: The New Colossus le succès qu’il mérite. Si le tout tourne relativement bien, c’est en effet au prix de grosses concessions sur le rendu visuel, lequel se caractérise par un flou permanent aussi disgracieux que gênant. Dommage, car s’il n’est pas révolutionnaire, ce nouvel épisode reste un jeu marquant de la fin de l’année dernière, qui dispose de nombreuses qualités tant d’un point de vue ludique que narratif. Car oui, ce n’est pas tous les jours qu’un jeu de tir en apparence bourrin arrive à nous émouvoir.