En résumé
Considéré comme un monstre sacré dans notre pays où il fut précurseur dans le domaine de l’action-RPG sur console, Secret of Mana est une pépite encore jalousement gardée par les nostalgiques de la Super Nintendo. Le retrouver ainsi défiguré dans un remake qui ne lui apporte aucune amélioration digne de ce nom fait vraiment peine à voir. C’est la raison pour laquelle nous conseillerons plutôt à ceux qui souhaiteraient le découvrir aujourd’hui de se procurer la version originale pour en retrouver toute la saveur.
Note technique
Les plus et les moins
- Un pilier de l'action-RPG qui conserve quelques-unes de ses valeurs intrinsèques
- La volonté de ne pas toucher à certaines composantes du jeu de 1994
- La possibilité de jongler entre les musiques originales ou réorchestrées
- Traduction française revisitée et choix entre doublage anglais ou japonais
- Le multijoueur à trois sur un même écran
- Une direction artistique repoussante déjà datée
- Des mécaniques de gameplay archaïques, aucunement optimisées
- Le comportement chaotique des compagnons gérés par l'I.A.
- Le manque d'ergonomie des sous-menus et de précision de l'interface d'achat
- Une progression laborieuse en termes de level up (personnages, armes, magies)
- Des réarrangements musicaux souvent inférieurs aux compositions originales
- Aucune proposition de multijoueur online
Notre test détaillé
Alors que tout le monde rêve d’une localisation européenne de Seiken Densetsu Collection qui nous permettrait de découvrir enfin le troisième volet de la saga resté inédit sur notre continent, c’est le remake du deuxième opus qui concentre toutes les attentions. Mais pas forcément de la meilleure des manières…
(Ce test a été réalisé sur PlayStation 4.)
Secret of Mana n’a certes pas volé son statut de mythe, ne serait-ce que parce qu’il a permis à bon nombre d’entre nous de s’initier aux joies de l’action-RPG sur Super Nintendo lors de sa sortie en France en 1994. Mais fallait-il pour autant exhumer un tel chef-d’œuvre au risque de rompre le charme ?
Lifting raté
S’il est vrai que le titre original a considérablement vieilli aux yeux des joueurs les moins sensibles à la 2D caractéristique de l’époque, on ne peut pas dire que la 3D rudimentaire employée pour dépoussiérer sa réalisation le place davantage dans l’air du temps. Quitte à moderniser un titre, ne doit-on pas s’attendre à ce que celui-ci bénéficie des technologies les plus actuelles pour paraître à son avantage ? Ce n’est évidemment pas le cas de ce remake de Secret of Mana qui parade sans complexe sur les machines les plus avancées, alors même que ses visuels nous donnent le sentiment de jouer sur mobiles. Comble de l’ironie, la mini-carte incrustée dans la partie supérieure de l’écran réutilise les jolis graphismes 2D d’origine, illustrant en permanence le gouffre qui sépare les deux versions sur le plan de l’enchantement.
Des arguments dépassés
Mais laissons un instant de côté ce débat sur la forme pour voir si le titre parvient au moins à se racheter une conduite sur le fond. Après tout, si l’original était parvenu à faire si bonne figure il y a maintenant 25 ans, il n’y a pas de raisons que son remake n’ait pas conservé au moins une fraction de ce qui faisait alors son efficacité. C’est probablement dans cette optique que les responsables de cette version contemporaine se sont attachés à reprendre religieusement toutes les spécificités du système de jeu que l’on connaissait, y compris les plus datées.
Par exemple, si l’anneau de sélection dédié aux magies et aux choix des armes comptait à l’époque parmi les singularités les plus emblématiques de Secret of Mana, il reflète aujourd’hui un manque d’ergonomie évident qui dessert le rythme du jeu. Et les exemples analogues sont nombreux, ne serait-ce que dans le cas de l’interface d’acquisition des pièces d’équipements chez les marchands qui ne permet même pas de savoir si les objets vendus sont meilleurs que ceux que l’on porte sur soi.
L’homme contre la machine
Dans son déroulement aussi, le remake de Secret of Mana se borne à conserver jusqu’aux défauts les plus flagrants de l’original, à l’instar du laps de temps qui s’écoule entre le moment où l’on porte un coup et le moment où l’ennemi reçoit les dégâts. Parce que rien n’a été fait pour optimiser la nervosité et la fluidité des phases d’action, le jeu paraît extrêmement daté et s’enterre dans des considérations que l’on n’avait plus vues depuis des années. Attendue au tournant, la gestion des compagnons contrôlés par l’I.A., déjà laborieuse à l’époque, révèle sans surprise rapidement ses limites.
Les alliés se coincent régulièrement dans le décor sans parvenir à nous suivre, la faute à un pathfinding trop approximatif et à une réduction des options censées réguler leur comportement, ce qui ne les empêche pas de multiplier les rencontres malheureuses avec la faucheuse. Quiconque dispose d’âmes charitables dans son entourage aura donc tout intérêt à parcourir l’aventure avec deux comparses humains afin de contourner ces désagréments et d’accroître la dimension conviviale de l’expérience. Dommage qu’aucune option multijoueur en ligne n’ait été implémentée pour dépanner les joueurs les plus isolés.
Problème d’authenticité
Si la traduction dans notre langue reste clairement à l’avantage du titre, elle diffère néanmoins de celle (très perfectible) que l’on avait connue sur Super Nintendo, ce qui pourrait éventuellement faire tiquer les joueurs en quête de sensations nostalgiques authentiques. L’ajout de discussions venant égayer les soirées à l’auberge se révèle quant à lui anecdotique, même si l’on apprécie que le titre nous laisse le choix entre le doublage anglais ou japonais. Plus discutables, les réarrangements des morceaux ayant fait la gloire du compositeur Hiroki Kikuta, s’avèrent trop souvent en deçà des musiques originales, mais il est heureusement possible de jongler à n’importe quel moment entre les deux versions.
Livré intact, le caractère laborieux de la progression dû aux indispensables phases de level up nécessaires pour développer les niveaux des personnages, des armes et des magies, n’aide pas à sortir le rythme de sa torpeur. En résumé, ceux qui s’attendaient à ce que ce remake transcende l’original en le dépoussiérant sans pour autant dénaturer son aura culte risquent d’être cruellement déçus, au point sans doute de relancer la version Super Nintendo afin de préserver le souvenir du « vrai » Secret of Mana.
Conclusion
Considéré comme un monstre sacré dans notre pays où il fut précurseur dans le domaine de l’action-RPG sur console, Secret of Mana est une pépite encore jalousement gardée par les nostalgiques de la Super Nintendo. Le retrouver ainsi défiguré dans un remake qui ne lui apporte aucune amélioration digne de ce nom fait vraiment peine à voir. C’est la raison pour laquelle nous conseillerons plutôt à ceux qui souhaiteraient le découvrir aujourd’hui de se procurer la version originale pour en retrouver toute la saveur.