En résumé
En dépit d’une mécanique intéressante basée sur les sons et la communication entre les espèces, Fe ne restera pas autant gravé dans les esprits que d’autres titres misant sur la singularité de l’expérience qu’ils proposent. En cause, des sensations de jeu souvent imprécises et l’incapacité du titre à surprendre autant qu’on était en droit de l’espérer.
Note technique
Les plus et les moins
- Une expérience intrigante servie par une atmosphère bien à elle
- La mécanique du chant pour un gameplay basé sur la communication sonore
- La diversité des créatures et des pouvoirs que celles-ci nous lèguent
- La libre interprétation de l'histoire et de son final
- Le nombre important de bonus cachés susceptibles de relancer l'intérêt
- Des situations qui se répètent beaucoup trop
- Un level design et une caméra pas toujours propices à la plate-forme
- L'oiseau guide quasiment indispensable pour se repérer
- La furtivité au stade embryonnaire
- Pas assez de surprises dans le déroulement global
- Paresseux et perfectible sur le plan technique
- Durée de vie légère en ligne droite (6 heures environ)
Notre test détaillé
Suscitant mille et une interrogations par sa direction artistique en « low poly », ses teintes en bichromie et son protagoniste aussi attachant que vulnérable, Fe possède bien des arguments pour nous inciter à pénétrer dans son univers. Mais de quoi est donc faite cette expérience ?
(Ce test a été réalisé sur PlayStation 4.)
Sous ses airs de simple voyage contemplatif, Fe affiche rapidement sa volonté d’accorder une place prépondérante à l’exploration, au point de ramener l’essentiel de son gameplay à des composantes de pure plate-forme. Si ceux qui espéraient y trouver davantage d’énigmes seront inévitablement déçus, les autres s’apercevront vite que la consistance ludique de Fe est toute relative. Prenant place dans une étrange forêt d’inspiration nordique, le titre étant développé par un studio suédois, Fe emprunte bien souvent la voie de la facilité, multipliant les redites quant aux situations proposées, comme lorsqu’il nous invite à caracoler sur la canopée ou à lancer des graines sur des sphères brillantes pour les neutraliser. Mais s’il n’a rien de bien original, le gameplay de Fe mérite tout de même quelques éclaircissements.
Libre interprétation
Si vous avez joué quelques minutes à Fe, vous avez sans doute déjà compris que le titre laissait une libre interprétation totale à chacun de ses éléments constitutifs. Pour commencer, les raisons de la traque de Fe, cet étrange petit animal que l’on incarne, par des créatures cyclopéennes baptisées les Silencieux, sont implicites. Tout comme le développement du scénario que les plus motivés tenteront peut-être de percer à jour en décryptant les différentes peintures rupestres éparpillées aux quatre coins du jeu. En termes de survie, en revanche, le joueur comprend très vite qu’il va lui falloir combiner acrobaties et parties de cache-cache dans les hautes herbes pour échapper à la vigilance des ennemis qui scrutent le moindre des mouvements de Fe.
Chanter pour survivre
Totalement vulnérable aux attaques des Silencieux, Fe possède en revanche le don de communiquer avec les animaux les moins farouches de la forêt. Via un mini-jeu analogique basé sur la pression exercée sur les gâchettes, le joueur peut établir le contact avec son interlocuteur s’il parvient à accorder sa voix à la sienne. Plus symbolique que réellement prenante, cette trouvaille permet surtout de s’assurer le soutien d’alliés au travers de leurs capacités, Fe pouvant par exemple survoler une zone sur les ailes d’une raie géante ou escalader des pentes verglacées en s’accrochant sur la fourrure d’un sanglier… ou du moins de la créature qui s’y apparente.
Une expérience visuelle et sonore
Avec sa direction artistique si singulière, le titre instaure une atmosphère à la fois pesante et mystique sur cette forêt pleine de dangers. On ne sait jamais réellement qui sont ces animaux évoquant tantôt des cerfs, tantôt des ours, et encore moins ce que nous veulent ces terrifiantes créatures à l’œil unique. L’absence d’interface met d’autant plus en valeur l’étrangeté des situations et les fréquents changements de filtres altèrent le spectre des couleurs comme s’ils voulaient transmettre les variations d’émotions du petit animal. Mais au-delà du voyage visuel qu’il représente, Fe reste surtout une expérience sonore à la fois charmante et dérangeante. En apprenant le langage des créatures sylvestres, le protagoniste élargit son éventail de voix utilisables pour entonner des chants qui diffèrent selon la pression exercée sur la gâchette. Ressemblant le plus souvent à des complaintes, ces voix sont presque des appels au secours dont la finalité est de surmonter une difficulté en ayant recours à l’un des mystérieux pouvoirs hérités au fil de nos rencontres.
L’oiseau guide
À l’instar d’un jeu tel que Rime, titre avec lequel il entretient d’ailleurs d’autres similitudes, Fe s’articule autour d’une progression non guidée, le joueur devant nécessairement tout découvrir par lui-même au gré d’inévitables déconvenues. Cela touche évidemment aussi à la dimension narrative implicite du titre qu’il appartient à chacun de cerner suivant sa propre sensibilité, les situations évanescentes de Fe interpellant davantage notre ressenti que notre logique. Cet aspect du jeu, s’il contribue bel et bien à renforcer l’immersion et le sentiment d’étrangeté de l’univers de Fe, n’en comporte pas moins des lacunes qui nuisent régulièrement à l’expérience. Il est notamment regrettable que le tout soit entaché par une technique largement perfectible qui ne contribue pas à rendre le voyage plaisant. Le fait d’être constamment obligé d’appeler notre oiseau guide pour savoir quel chemin emprunter prouve à quel point le level design est loin d’être un modèle du genre.
Errances ludiques
Il faut dire que notre animal emprunte des voies pour le moins inhabituelles, privilégiant les sauts dans les arbres pour des ascensions parfois malheureuses. La faute à une gestion approximative des sauts qui nous renvoie en arrière au moindre dérapage dû à une collision ratée avec le décor ou à un mauvais placement de la caméra. Le titre aurait gagné à afficher des textures moins lisses et des animations plus abouties pour une meilleure mise en valeur de sa faune si particulière. L’idée d’y incorporer un zeste de furtivité en se camouflant dans les touffes d’herbe, et ce afin d’éviter le regard perçant des Silencieux qui n’ont besoin que de quelques secondes pour nous anéantir, ne dépasse également jamais le stade embryonnaire. Plus généralement, la progression a une fâcheuse tendance à se répéter en nous obligeant à recourir trop souvent aux mêmes astuces de progression.
En somme, si l’aventure a quelque chose d’indéniablement captivant, à aucun moment elle ne parvient à s’élever au-dessus de ce que l’on attend d’elle pour réussir à nous surprendre ou à nous enchanter. Ne dépassant pas les six heures de jeu en ligne droite, Fe comporte néanmoins un nombre important d’éléments cachés à collecter une fois l’aventure terminée. Reste à savoir si vous vous laisserez apprivoiser suffisamment pour accepter de prolonger un peu la visite.
Conclusion
En dépit d’une mécanique intéressante basée sur les sons et la communication entre les espèces, Fe ne restera pas autant gravé dans les esprits que d’autres titres misant sur la singularité de l’expérience qu’ils proposent. En cause, des sensations de jeu souvent imprécises et l’incapacité du titre à surprendre autant qu’on était en droit de l’espérer.