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Le cycle des Princes d’Ambre : après un fauteuil pour deux, voici un trône pour neuf !

21 septembre 2016
Par Gauthier
Le cycle des Princes d'Ambre : après un fauteuil pour deux, voici un trône pour neuf !
©DR

Ainsi commence le cycle des Princes d’Ambres : s’échappant de la clinique où il était hospitalisé, Carl Corey part à la recherche de son passé. Au fur et à mesure de ses rencontres, il se remémore ce qu’il est réellement : Corwin, fils d’Obéron, le roi d’Ambre, le seul monde réel dont la Terre n’est qu’un reflet. Or son père a disparu, le trône d’Ambre est donc vacant. C’est le début d’une lutte fratricide pour le pouvoir, et Corwin compte bien la remporter !

« J’étais prince d’Ambre. C’était vrai. Nous étions seize frères – six étaient morts – et huit sœurs, dont deux étaient mortes, peut-être quatre. Nous avions passé la plupart de notre temps à errer en Ombre, ou dans nos propres univers. La question, purement formelle, mais philosophiquement étayée, est de savoir si quelqu’un qui possède un pouvoir sur Ombre peut créer son propre univers. »

D’un monde à l’autre

Les Princes d'Ambre cycle 1

Dans notre monde, vers les années 1970. Carl Corey se réveille amnésique dans une clinique privée. Lorsqu’il cherche à partir, on lui oppose une fin de non-recevoir, qu’il ignore superbement en se faisant la belle. Il part alors à la rencontre de sa sœur Flora, qui l’aurait confié à l’établissement, et en fouillant dans sa demeure, tombe sur un jeu de tarot qui fait ressurgir quelques bribes de mémoire.

Il est en fait Corwin, prince d’Ambre, et les personnages dessinés sur les Atouts correspondent à sa famille. Il s’avère que son père, Obéron, roi d’Ambre, a disparu et qu’Eric, frère de notre héros, revendique la couronne aux dépends de celui-ci. Intrigues, complots, alliances, guerres… La fratrie va se déchirer pour faire valoir ses droits, lorsque d’autres évènements semblent être des signes précurseurs d’un danger plus grand encore !

Un nouveau classique de l’imaginaire 

Publié en 1970, le premier tome du Cycle des Princes d’Ambre a été le départ d’une véritable révolution dans la littérature de l’imaginaire. En effet Roger Zelazny sort des sentiers battus en proposant une œuvre magistrale et inclassable. Impossible en effet de ranger ce cycle dans une case bien définie. Si la trame se rapproche de la high fantasy, nous sommes dans un contexte de multivers, c’est-à-dire d’univers multiples et convergents, un sujet que l’on retrouve principalement en science-fiction.

Et sur la forme, l’auteur nous offre tout au long de son œuvre de grandes envolées oniriques, réflexions philosophiques et psychanalytiques comme rarement jusqu’alors dans ce domaine littéraire. Il parvient à créer un univers cohérent et construit sur des préceptes souvent intangibles.

Un royaume parmi d’autres

L’exemple le plus flagrant est le Royaume d’Ambre : le seul monde « réel », tous les autres, dont la Terre, n’étant que des ombres de ce Royaume, des projections issues de la psyché de la famille royale d’Ambre, qui sont les seuls à pouvoir aller d’un monde à l’autre en modifiant progressivement la trame environnante en se représentant le lieu où ils veulent aller. De ce fait, chaque Ombre est unique, suit des principes physiques qui lui sont propres et évolue de façon totalement autonome. Même le temps s’écoule différemment d’une Ombre à l’autre, ce qui crée des situations complexes. De ce fait, certaines Ombres – la Terre en est le parfait exemple – sont technologiquement bien plus avancées qu’Ambre, et cette dernière ne peut utiliser ces technologies en son sein. On évolue donc dans un univers platonicien de par ces concepts, mais également freudien, auquel Roger Zelazny fait beaucoup référence, puisque l’inconscient possède un rôle très important pour les personnages du roman.

Jeux de pouvoirs

Un autre aspect particulier tourne autour de la lutte de pouvoir, et plus généralement des relations compliquées entre les différents enfants et petits-enfants d’Obéron. En effet, le roi, et créateur d’Ambre, s’est marié plusieurs fois, et a engendré au moins vingt-quatre enfants, dont au minimum quatre hors-mariage. Ce qui donne des situations très compliquées pour la succession.. L’exemple le plus flagrant étant celui d’Eric, frère aîné de Corwin (ils ont la même mère), mais né avant qu’Obéron n’épouse leur mère, et donc pas légitime pour monter sur le trône. Plus généralement, les princes et princesses d’Ambre font preuve d’une personnalité très différente, chacun ayant ses priorités et ses centres d’intérêts, même si on retrouve des constantes, dont l’orgueil, voire l’arrogance. Du coup, les relations entre chacun sont variables en fonction de la période, des évènements, même si les affinités sont plutôt établies. Une famille inspirée en bonne partie par La saga des hommes dieux de Philip José Farmer.

Des inspirations multiples 

Les sources d’inspirations sont d’ailleurs nombreuses. Outre Platon, Freud ou P.J. Farmer, on retrouve des références aux mythes médiévaux (licorne, Légende arthurienne, Chanson de Roland) et même à Shakespeare, que ce soit pour les noms ou pour les actes, mais sans toutefois étouffer l’originalité de l’œuvre. Au contraire, elles sont intelligemment inclues ou réinventées pour donner une ampleur nouvelle au récit. Le cycle des Princes d’Ambres, c’est une saga épique, intelligente et sans équivalent. Cinq tomes de bonheur concentré, axés sur le personnage de Corwin, puis cinq tomes consacrés à son fils, Merlin, dont les péripéties n’ont rien à envier à celles de son géniteur. Pour résumer ? Une œuvre majeure de la SF/Fantasy, à ne manquer sous aucun prétexte !

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Paru le 5 juin 2015, 923 pages

Les Princes d’Ambre, Cycle 1, Roger Zelazny (Gallimard, Folio XI), sur Fnac.com

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Gauthier
Gauthier
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