« On ne naît pas femme, on le devient » demeure l’une des phrases-clés du XXème siècle. Écrite par Simone de Beauvoir, elle symbolise la prise de conscience qui s’est jouée petit à petit au cours des dernières décennies. À l’occasion du 110ème anniversaire de naissance de son auteur, retour sur Le Deuxième Sexe, un ouvrage fondamental et ô combien émancipateur.
Immédiate après-guerre
En 1949, Simone de Beauvoir est déjà une femme de lettres reconnue et respectée. Issue de l’aristocratie, brillante professeure de philosophie, reçue deuxième à l’agrégation, compagne de Jean-Paul Sartre, elle représente une certaine idée de l’intellectuel français de l’après-guerre. À cette époque, elle vient de publier Tous les hommes sont mortels, un roman sur le sens de la vie et l’immortalité, et l’essai Pour une morale de l’ambiguïté, ouvrage de philosophie faisant la part belle au concept de l’action. En parallèle, elle s’est attelée à la rédaction d’une somme, monumentale, qui fera l’effet d’une bombe dès sa parution : Le Deuxième Sexe, ou l’analyse phénoménologique et existentialiste de la condition féminine.
Ouvrage de référence
Partant de ses propres questionnements, et de ses nombreuses conversations avec Sartre autour de l’éducation des filles et de la place des femmes, la philosophe élargit peu à peu l’horizon de son essai par ses recherches. Sciences dures, sociologie, littérature et Histoire sont donc brassées peu à peu par Beauvoir ; ces multiples références se mêlent à son vécu, et constituent le socle d’une longue réflexion. Répartie en deux tomes (Les Faits et les Mythes et L’Expérience vécue), Le Deuxième Sexe débute par un questionnement des raisons de l’infériorisation de la femme, puis continue par une étude historique de la relation entre les deux sexes. À la fin du premier tome, le « Castor » entreprend une suite de considérations sur la place du beau sexe chez quelques grands auteurs littéraires (Stendhal, Claudel, Montherlant). Le deuxième tome aborde plus spécifiquement la femme d’aujourd’hui, dans toutes ses dimensions (sociales, sexuelles, affectives). Beauvoir mélange étude de cas, vécu personnel et concept ; son discours progressant vers l’idéal qu’elle fixe pour l’humanité : l’émancipation des femmes.
La renaissance du féminisme
Sans simplifier son œuvre, on peut discerner chez Beauvoir deux aspirations pour la femme de 1949 : d’abord qu’elle ait accès au marché du travail, ensuite qu’elle puisse contrôler sa fécondité. Rétrospectivement, ces deux vœux ont été réalisés, par le remboursement de la contraception, la légalisation de l’IVG, et l’arrivée massive des femmes sur le marché du travail au cours des années 1950-1960. Beauvoir a une part très importante dans la prise de conscience collective de la cause féministe et dans son arrivée dans le champ politique. De nos jours, le combat reste d’actualité ; d’énormes disparités existent encore, au niveau salarial, médical, social et familial, entre les femmes et les hommes. Par son ampleur intellectuelle mais aussi son impact, Le Deuxième Sexe est donc une lecture toujours aussi utile, et la preuve une nouvelle fois que Simone de Beauvoir fut l’une des femmes de ce siècle, à l’esprit aussi brillant que révolutionnaire.
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Parution originale en 1949 – 408 pages
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Visuel d’illustration © Keystone-France/Gamma-Keystone – Getty
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