Critique

Secrets de maisons closes de Marc Lemonier : un ouvrage très instructif…

26 mai 2015
Par Thierry
Secrets de maisons closes de Marc Lemonier : un ouvrage très instructif...
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ÉROTIQUE – Une fois n’est pas coutume, je ne vais pas vous parler de l’éducation d’une jeune coquine ou des aventures d’un libertin. Secrets de maisons closes, de Marc Lemonier, est un ouvrage très sérieux et documenté sur l’histoire des maisons closes et de la prostitution à travers les âges.

Si vous craignez d’avoir affaire à l’une de ces études sociologiques barbantes et interminables, je vous rassure tout de suite : Secrets de maisons closes est un livre passionnant qui vous fait découvrir ce monde interlope par le biais de 35 histoires véridiques. Et le moins qu’on puisse dire est qu’on en apprend de belles ! Le livre débute avec rien moins que Messaline, impératrice de Rome, dont le nom est rentré dans le langage courant et désigne une femme de mœurs légères. À la lecture de cette première histoire, on comprend pourquoi

Au fil des histoires, on se rend compte combien le livre, pour être légèrement romancé, n’en est pas moins amplement documenté. J’ai ainsi découvert que le mot « bordel » venait des tentatives des autorités pour éradiquer la prostitution du centre de Paris. Tentatives qui eurent pour conséquence de repousser les prostituées dans des cabanes en planches (dites « bordes ») situées en périphérie et au bord du fleuve (« bord d’eau »). On apprend aussi que les prostituées à Rome officiaient sous des voûtes – fornix en latin – qui leur donnèrent le nom de fornices, à l’origine des termes « forniquer »  et « fornication ». Et le terme de « prostituée », saviez-vous qu’il venait des filles publiques clandestines, appelées « prostibula », lesquelles devaient officier devant (pro) leur porte (stabulum) ? Voilà en tout cas de quoi briller en société.

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Tout au long du livre, on découvre les différents types de maisons closes, du bordel dit d’« abattage », situé au plus bas de l’échelle, jusqu’aux maisons de haut-rang réservées à une clientèle riche et triée sur le volet. On partage également le quotidien souvent tragique des pensionnaires, cloîtrées, utilisées comme une marchandise, enfermées dans un système d’endettement qui leur interdit toute échappatoire. Dans cet univers glauque, quelques perles témoignent cependant d’une certaine poésie, comme ces recommandations d’hygiène faites par les mères maquerelles parisiennes aux prostituées, dans un siècle (nous sommes en 1759) qui ne brille pas par sa propreté : « Pour le centre de la volupté, on doit souvent en rafraîchir les charmes. L’amour ne veut pas que son dard se plonge dans la fange ». Qu’en termes galants ces choses-là sont mises… !

Certaines anecdotes sur les grands de ce monde et leurs plaisirs coupables – je vous recommande tout particulièrement celle qui touche le Prince de Galles, futur roi d’Angleterre – ou encore des figures littéraires en devenir comme Gustave Flaubert et, plus tard, son protégé Guy de Maupassant, apportent une touche de légèreté à l’ensemble. On découvre également l’existence de maison dédiées à ces dames, d’autres exclusivement consacrées aux amours masculines, et même des maisons spécialisées dans une clientèle… de curés ! Sans parler des bien-nommés BMC (Bordel Militaire de Campagne). Un chapitre est également consacré à l’attitude peu glorieuse du monde des maisons closes pendant l’Occupation.

De l’âge d’or des maisons closes à leur crépuscule, avec en France la loi Marthe Richard, ce livre retrace tout un monde souterrain et fantasmé. En même temps qu’il prolonge la légende, il en révèle nombre d’aspects peu reluisants. Un excellent livre, qui se lit avec un grand plaisir et que je vous recommande chaudement.

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