Alors qu’une vague de censure inédite continue de faire rage dans les bibliothèques et établissements scolaires un peu partout aux États-Unis, l’autrice Margaret Atwood, 82 ans, a présenté une version ininflammable de son best-seller La Servante Écarlate, régulièrement visé par des tentatives d’interdiction outre-Atlantique.
L’oeuvre de Margaret Atwood n’a jamais été aussi brûlante, c’est le moins que l’on puisse dire. Le plus célèbre roman de l’autrice canadienne, La Servante écarlate, publié pour la première fois en 1985, imagine un monde dystopique dans lequel les femmes ne sont plus maîtresses de leurs propres corps, certaines étant forcées de porter les enfants des puissants ; le roman, adapté en série en 2017, dont la quatrième saison a été diffusée l’année dernière, résonne d’autant plus depuis qu’un document de travail de la Cour suprême a révélé que l’arrêt Roe v. Wade, qui protège le droit à l’avortement des femmes depuis près de cinquante ans, s’apprêterait à être révoqué. Si le jugement final rendu le mois prochain venait à confirmer ce projet émanant de la majorité conservatrice de la Cour, l’avortement pourrait alors devenir illégal dans près de la moitié des États américains.
Des milliers d’ouvrages incriminés
Un retour en arrière qui va de pair avec la vague de censure qui s’est emparée des États-Unis ces dernières années (visant en premier lieu à des oeuvres abordant des thématiques telles que le racisme, l’homophobie, l’homosexualité, le genre, etc.) et plus particulièrement en 2021 : selon l’American Library Association, pas moins de 1597 ouvrages auraient fait l’objet d’une tentative d’interdiction cette année-là – la triste « palme » du livre le plus visé revenant à Gender Queer de Maia Kobabe. Des livres comme Beloved de Toni Morrison, All Boys Aren’t Blue de George M. Johnson, La haine qu’on donne d’Angie Thomas, La Servante écarlate donc ou encore, plus récemment, Maus d’Art Spiegelman, font partie des livres régulièrement visés par des tentatives de censure. Il arrive que des blockbusters de l’édition comme Harry Potter et Twilight soient parfois incriminés, voire brûlés dans certains cas.
En réaction à cette vague de plus en plus incontrôlable, l’autrice canadienne Margaret Atwood est donc apparue dans une vidéo, lance-flamme à la main, dans une scène dystopique digne de Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, tentant de mettre le feu à son propre ouvrage. Heureusement, il n’en est rien : cette édition ignifugée de La Servante écarlate, conçue par le géant de l’édition Penguin Random House,est bien au contraire un fervent réquisitoire contre la censure.L’ouvrageest proposé aux enchères chez Sotheby’s jusqu’au 7 juin prochain (la dernière enchère en date est de 45 000 dollars). Les bénéfices de la vente seront intégralement reversés à la PEN America, association luttant pour la liberté d’expression.
La saison 5 de The Handmaid’s Tale devrait quant à elle sortir d’ici la fin de l’année. Pour rappel, Margaret Atwood a fait paraître en 2019 une suite à La Servante écarlate, intitulée Les Testaments (publiée en France chez Robert Laffont), pour lequel elle reçut le prestigieux prix Booker la même année. Une série autour de cette suite, qui se déroule quinze ans après les événements de La Servante écarlate, serait d’ores et déjà en chantier chez Hulu.