Critique

Death Stranding 2 : une nouvelle claque par Hideo Kojima ?

23 juin 2025
Par Antistar
“Death Stranding 2: On the Beach”, le 26 juin 2025 sur PlayStation 5.
“Death Stranding 2: On the Beach”, le 26 juin 2025 sur PlayStation 5. ©Kojima Productions

En 2019 paraissait une production audacieuse du plus célèbre des concepteurs de jeux vidéo : Hideo Kojima. Le père de Metal Gear Solid dévoilait alors une nouvelle expérience dépaysante qui marquait l’industrie, tout en se montrant assez clivante. Cependant, sa suite pourrait être plus appréciée.

Dans les jeux vidéo, les stars sont rarement leurs créateurs. Contrairement au cinéma, où les réalisateurs disposent d’une certaine aura, les game designers souffrent d’un vrai manque de notoriété. Cependant, Hideo Kojima fait exception : devenu célèbre avec Metal Gear Solid, celui que toute l’industrie considère comme un génie visionnaire capable de rapprocher jeu vidéo et cinéma plus que quiconque a fondé son studio en 2015 après avoir quitté Konami. En 2019, il livrait son premier titre en tant que créateur indépendant : Death Stranding.

Cette œuvre cryptique et fascinante dépeignait une Amérique dévastée qu’il fallait reconnecter en incarnant Sam Bridges, un « porteur » interprété par Norman Reedus (The Walking Dead) et chargé de transporter un peu tout et n’importe quoi à travers un continent en ruines. Un titre qui avait échoué à décrocher le prix de Game of the Year, que visera sans doute en 2025 sa suite terriblement attendue, Death Stranding 2: On the Beach.

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Death Stranding est un jeu complexe au gameplay très riche et délicat à appréhender (fait rare chez les exclusivités PlayStation, d’ordinaire plus grand public), et sa suite en reprend les bases. Le premier opus se déroule dans un futur post-apocalyptique où le monde a été ravagé par un événement surnaturel, le « Death Stranding ».

©Kojima Productions

Ce dernier a conduit les âmes des défunts à errer sur Terre, sous le nom d’Échoués, le tout sous des averses noires qui vieillissent êtres vivants et structures prématurément. Le monde extérieur n’est que désolation et il est plus que risqué de s’y aventurer, seuls de rares individus étant capables de détecter les Échoués et de leur échapper.

L’un d’eux est Sam Bridges, livreur transportant des cargaisons entre les relais blindés construits par les survivants, et dont la mission confiée par ce qu’il reste du gouvernement américain consiste à reconnecter les différents lieux ayant survécu au chaos.

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Cependant, Death Stranding est loin de constituer une simple série bête et méchante de quêtes de livraison sans aucun autre but que de se rendre d’un point A à un point B. Il propose un gameplay très riche qui rend chaque livraison passionnante, car elle requiert une préparation minutieuse de l’itinéraire à emprunter et un aspect gestion de l’équipement d’une rare profondeur.

Le titre de Hideo Kojima a su happer les joueurs avec un système de multijoueur asynchrone, permettant aux « porteurs » du monde entier de collaborer pour construire diverses structures sur la carte (ponts, abris, routes, échelles…), facilitant la progression de compagnons invisibles, et vice versa.

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Il offre aussi un scénario sans pareil, rempli d’émotion et de questionnements sur la thématique de la mort, porté par des acteurs de renom comme Léa Seydoux ou Mads Mikkelsen. Le tout au service d’une réalisation d’ensemble de très haute volée pour l’un des plus beaux mondes ouverts de sa génération, exploitant le moteur Decima du studio Guerrilla (licences Killzone et Horizon).

Pourquoi une suite ?

Alors qu’une œuvre aussi originale et radicale que Death Stranding aurait pu se suffire à elle-même, en dépit d’une fin plutôt ouverte, Kojima Productions avait surpris son monde en annonçant un second épisode. Il allait narrer la suite des événements d’un jeu ayant marqué son époque, et les joueurs allaient pouvoir reprendre les commandes de ce Norman Reedus numérique qu’ils avaient adoré incarner. Après avoir reconnecté des États-Unis ici rebaptisés « UCA » (pour « United Cities of America »), le plus iconique des « porteurs » avait disparu sans laisser de traces.

©Kojima Productions

Dans Death Stranding 2, c’est du côté du Mexique que Sam va se lancer dans une nouvelle entreprise de reconnexion entre les rescapés d’une civilisation perdue. En plus de découvrir un tout nouvel open world, on espérait (quelque peu naïvement ?) voir Kojima Productions livrer un titre un chouïa plus accessible, une promesse entrevue dans la Director’s Cut du premier jeu parue en 2021 sur PlayStation 5.

Ce qui rend aussi cette suite particulièrement attendue, c’est son statut d’exclusivité PlayStation 5, qui plus est visiblement très optimisée pour son modèle Pro. Un certain The Last of Us Part II est effectivement sorti il y a cinq ans en tant que titre testament de la PlayStation 4, et bon nombre le considèrent encore comme une référence en termes de réalisation poussée dans ses derniers retranchements.

©Kojima Productions

Or, les différents trailers du titre de Kojima Productions n’avaient eu de cesse de trahir les intentions et surtout les ambitions de leur génial concepteur : offrir à la génération PS5 l’étalon technique qui lui manquait, surtout dans un monde ouvert plus imprévisible qu’une aventure plus linéaire. Quoi qu’il en soit, il était difficile de ne pas se réjouir devant la perspective de retrouver cet univers si singulier, porté par l’écriture et la science du game design de Hideo Kojima.

Jeux idéaux

Avec Death Stranding 2, nous n’avions pas beaucoup de doutes quant à la qualité de la réalisation d’une œuvre qui ne laisse pas de place au hasard. Tout d’abord, il faut souligner le niveau phénoménal de reconstitution des territoires sauvages que Sam Bridges explore, et dans lesquels vous l’aidez à recréer des routes liant (presque) tous les relais afin d’étendre le « réseau chiral » permettant de reconnecter un pays entier.

©Kojima Productions

Une nouvelle fois, Kojima Productions fait merveille en tirant parti d’un moteur physique qu’il exploite à la perfection, et offre une claque visuelle encore magnifiée sur PS5 Pro, bien que le modèle de base ne soit pas en reste. On apprécie par ailleurs la présence d’un mode Performance, encore plus impressionnant sur la gamme Pro, surtout sur un monde ouvert de cette densité porté par un moteur physique laissant la place à beaucoup de fantaisies.

Ce dernier offre en effet une fluidité qui ne nuit pas à l’aspect cinématographique. Cet opus flatte constamment la rétine et se distingue par de nouveaux effets visuels bluffants, dans des situations d’un réalisme saisissant, notamment lorsqu’elles confinent à l’extrême (déluges, tornades, incendies ou séismes).

©Kojima Productions

Le résultat d’ensemble est encore plus impressionnant que ne l’était Horizon Forbidden West, pourtant conçu sur le même moteur graphique mis au point par ses développeurs. Il en résulte une ambiance formidable et difficile à décrire, à la direction artistique unique en son genre en dépit de son photoréalisme. Enfin, Death Stranding 2 régale nos oreilles comme son aîné, et le fait que sa bande originale soit cette fois-ci confiée au musicien français Woodkid lui donne un petit supplément d’âme non négligeable.

Le réseau qui râle

Cependant, par certains aspects, la copie rendue par Kojima Productions peut faire grincer des dents. D’abord, la lourdeur quasi obligatoire de son gameplay (surtout au début) peut rebuter, tout comme la relative absurdité d’un synopsis très particulier, qu’il est assez difficile de suivre et de comprendre. Hideo Kojima aime livrer des jeux d’auteur délibérément non consensuels. Et si vous n’entrez pas dedans, il sera très difficile d’adhérer à la proposition d’ensemble.

©Kojima Productions

Certains personnages pourront se révéler irritants pour les uns, quand d’autres les trouveront émouvants et seront touchés par de nombreuses scènes marquantes, dont on vous laissera bien entendu le plaisir de la découverte. Une fois l’introduction un peu longuette passée et les bases de gameplay d’ensemble assimilées, l’univers conçu par Kojima Productions est néanmoins addictif et le monde ouvert intelligent et unique en son genre a de grandes chances de vous occuper pendant des dizaines d’heures sans jamais vous lasser.

Enfin, en dépit de mécaniques d’infiltration grandement améliorées, les combats restent aussi décevants que dans le premier opus, surtout contre les êtres humains. Ceux opposant Sam à des Échoués sont également frustrants, mais le jeu a la bonne idée de proposer de simuler des victoires face aux boss obligatoires du scénario pour ne jamais rester bloqué.

©Kojima Productions

Un aveu d’échec à peine dissimulé tant ces combats sont aussi incroyables côté mise en scène… que lourds et parfois pénibles manette en main. Heureusement, ce n’est clairement pas sur ce point que Death Stranding a misé. Tant mieux, car c’est son aspect le moins réussi, surtout face à une proposition de gameplay d’ensemble étonnamment satisfaisante, où tout s’imbrique idéalement, et une réalisation fascinante qui en fait une nouvelle œuvre marquante.

Si le premier opus avait marqué les esprits en 2019 et que la perspective d’une suite ne pouvait que laisser perplexe tant il semblait dur de réitérer cette performance, Kojima Productions réussit avec brio à nous replonger dans un nouveau monde ouvert fascinant.

©Kojima Productions

Porté par plein d’améliorations de gameplay le rendant un peu plus accessible, Death Stranding 2: On the Beach surprend peut-être moins son monde que son aîné, mais fait étalage de beaucoup plus de maîtrise et livre une performance technique époustouflante qui fait honneur à une génération de machines qui manquaient de références de ce calibre. Hideo Kojima confirme une fois de plus sa maîtrise stupéfiante d’un média que chacune de ses créations transcende.

Death Stranding 2: On the Beach sortira le 26 juin exclusivement sur PlayStation 5.

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