
Kamel Daoud, lauréat du prix Goncourt 2024, est accusé d’avoir volé l’histoire d’une jeune femme algérienne afin d’écrire son roman, Houris. Retour sur l’affaire.
Le 4 novembre 2024, Kamel Daoud remportait le prix Goncourt pour son roman, Houris (Gallimard). Cependant, quelques mois après son sacre, l’écrivain est de nouveau sous le feu des projecteurs mais cette fois-ci pour atteinte à la vie privée. En effet, et d’après les informations relayées par Médiapart, l’auteur aurait reçu le 13 février 2025 une assignation à comparaître devant le tribunal de Paris.
Après une première affaire soulevée en Algérie, Kamel Daoud aurait reçu une assignation devant la justice française, à l’occasion d’une séance de dédicaces, la semaine dernière, à Bordeaux, pour avoir volé l’histoire de Saâda Arbane. Plus précisément, la jeune femme l’accuserait d’avoir utilisé son récit sans son consentement, et de s’être inspiré de son parcours personnel pour brosser le portrait d’Aube, le personnel principal de Houris.
Le prix Goncourt accusé de vol d’histoire
Selon Le Figaro, la requérante, qui réclame 200 000 euros de dommages et intérêts à l’écrivain ainsi qu’une publication de l’éventuelle condamnation, affirme avoir été suivie entre 2015 et 2023 en consultation psychiatrique par l’épouse de Kamel Daoud, Aicha Dehdouh. Cependant, la plaignante qui voit dans le livre plusieurs éléments en lien avec sa vie privée — comme sa cicatrice au cou, ses tatouages ou encore les circonstances de son agression — n’aurait jamais donné son accord pour que cette histoire soit rendue publique, en dépit des prétendues insistances de l’auteur entre 2021 et 2023.
De son côté, ce dernier, qui s’était déjà défendu en décembre sur Radio France quant aux accusations faites en Algérie par la jeune femme sur la chaîne algérienne One TV, nie avoir récupéré les confidences faites à son épouse, à l’époque. Kamel Daoud affirme surtout avoir voulu raconter la guerre civile algérienne et avoir nourri « son texte d’histoires bien réelles ». L’écrivain, qui voyait il y a quelques mois dans cette affaire un outil de décridibilisation de la part du régime algérien, aurait interrogé des milliers d’hommes et de femmes et mener de nombreux entretiens afin d’étayer son livre.
Aujourd’hui vendu à plus de 400 000 exemplaires, Houris qui désigne dans l’islam les créatures célestes promises au paradis, se déroule en partie à Oran et narre le destin d’Aube, une jeune femme muette depuis qu’un islamiste lui a tranché la gorge le 31 décembre 1999. Elle-même rescapée d’une tentative d’égorgement par un groupe jihadistes en 2000, Saâda Arbane qui depuis des années a besoin d’une canule pour respirer et parler, affirme que ce roman reprend cet épisode tragique et traumatique de sa vie, tout en racontant les heures sombres de la guerre civile algérienne.
Une première audience est prévue le 7 mai 2025 au tribunal judiciaire de Paris, selon l’AFP et Médiapart. L’instance devra ainsi étudier l’atteinte à la vie privée en lien avec une œuvre fictionnelle ; une affaire tout à fait inédite.