Critique

Les chats d’Ulthar : que vaut ce nouveau manga adapté de Lovecraft ?

04 février 2025
Par Sofian Nouira
Les chats d’Ulthar : que vaut ce nouveau manga adapté de Lovecraft ?
©Ki-oon

Vous étiez en manque d’adaptation de l’univers de Lovecraft par le mangaka Gou Tanabe ? Bonne nouvelle, il revient avec Les chats d’Ulthar, un volume qui tranche avec les précédentes adaptations.

Sorti ce 23 janvier en France, Les chats d’Ulthar de Gou Tanabe s’inscrit dans la continuité formelle des précédentes adaptations lovecraftiennes de l’artiste. Le manga vient enrichir la collection des chefs-d’œuvre de Lovecraft, déjà bien établie chez l’éditeur Ki-oon. Nous vous avions déjà dit tout le bien que nous pensions de L’abomination de Dunwich, mais le volume qui nous intéresse aujourd’hui regroupe non pas un, mais trois récits issus du cycle du rêve.

La vie après Cthulhu

L’œuvre de Howard Phillips Lovecraft (1890-1937) se décline en effet autour de plusieurs cycles, parmi lesquels le fameux mythe de Cthulhu, largement commenté et revisité au fil des décennies. Toutefois, son cycle du rêve, moins connu du grand public, abrite des histoires mettant en scène la puissance de l’imaginaire et la fragilité humaine face à des mondes qui échappent à toute logique terrestre. Les chats d’Ulthar figure au cœur de ces récits, faisant partie de ce pan important que Lovecraft nomme lui-même le « Dream Cycle ». 

Les Chats d’Ulthar, Gou Tanabe
©Ki-oon

Prendre la plume – ou plutôt le pinceau dans le cas de Gou Tanabe – pour adapter un texte de Lovecraft n’a désormais plus rien de surprenant pour ce mangaka. Il s’est fait connaître du public francophone par ses adaptations telles que L’appel de CthulhuDans l’abîme du tempsLa couleur tombée du cielLes montagnes hallucinéesLe cauchemar d’Innsmouth, ou encore Le molosse.

Il y démontre à chaque fois sa capacité à retranscrire dans son style épuré et réaliste l’horreur hantant les lignes du romancier de Providence. Avec Les chats d’Ulthar, il s’aventure dans des récits au ton plus subtil. En effet, le cycle du rêve fait souvent la jonction entre l’onirisme, la terreur et un sentiment d’aliénation en filigrane. Il n’a pas vocation à dépeindre uniquement des peurs cosmiques tapies dans l’ombre de la réalité.

Plaisant, mais moins marquant

Publié pour la première fois au Japon en mai 2024, le manga sort en France dans une édition toujours aussi soignée, reprenant le format grand volume et la couverture en similicuir caractéristiques de la collection des chefs-d’œuvre de Lovecraft. Fidèle à l’approche visuelle à laquelle il nous a habitués, Gou Tanabe livre une œuvre très détaillée sur le plan graphique, au point que l’on peine parfois à y voir un manga au sens traditionnel du terme. Les illustrations sont d’une précision impressionnante, renforçant l’atmosphère inquiétante propre aux récits de Lovecraft.

Les Chats d’Ulthar, Gou Tanabe
Le premier récit du manga Les chats d’Ulthar est décoléré des deux autres, même s’il se passe lui aussi dans le monde des rêves.©Ki-oon

Comme évoqué précédemment, ce volume regroupe trois récits issus du cycle du rêve, dont deux se suivent, tandis que le dernier se distingue par son indépendance narrative. La structure du recueil apporte une certaine cohérence, même si ces histoires restent relativement courtes et, par conséquent, moins prenantes que d’autres adaptations plus longues et aux scénarios plus développés. Si l’on retrouve l’ambiance caractéristique du cycle du rêve, avec son mélange d’onirisme et d’angoisse diffuse, l’impact émotionnel s’avère logiquement moins puissant que dans des récits comme L’abomination de Dunwich ou Les montagnes hallucinées.

Un respect absolu du matériau d’origine

Nous nous répétons, mais Gou Tanabe excelle dans l’art de retranscrire l’univers lovecraftien sans trahir l’essence du texte. Ici encore, son adaptation se distingue par une fidélité remarquable, tant dans l’ambiance que dans la mise en scène. Il mise sur une suggestion graphique maîtrisée plutôt que sur l’illustration frontale des horreurs indicibles.

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Néanmoins, si Les chats d’Ulthar s’intègre bien dans la collection chefs-d’œuvre de Lovecraft et fera figure d’indispensable pour qui possède les autres volumes, il n’en demeure pas moins un ouvrage plus anecdotique dans la bibliographie lovecraftienne de Tanabe. La brièveté des récits limite leur portée et leur intensité dramatique en comparaison avec les autres adaptations plus ambitieuses du mangaka.

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Article rédigé par
Sofian Nouira
Sofian Nouira
Journaliste
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