Jeu vidéo social par excellence, la saga des Sims a su conquérir le cœur de millions de joueurs et de joueuses depuis sa création. Retour sur un phénomène unique dans l’histoire du jeu vidéo.
Ils sont tellement installés dans le paysage vidéoludique qu’on en oublierait presque leur immense popularité : en un quart de siècle, Les Sims ont changé la manière de voir les jeux vidéo pour des millions et des millions de personnes. Dix ans après son lancement, Les Sims 4 continue de vendre des millions d’exemplaires de ses nouvelles extensions et son éditeur, Electronic Arts, multiplie les plans pour le futur. Mais quelles sont les raisons de ce succès ? Retour sur sept points majeurs qui ont garanti un succès inoxydable à la série !
1 Un spin-off qui a su trouver la bonne formule
On a tendance à l’oublier, mais avant les Sims, il y avait Sim City, la série qui a révolutionné le genre du city builder, ces jeux où il est question de gérer une agglomération de A à Z. Dans les années 1990, l’éditeur de Sim City, Maxis, a lancé quantité de jeux dérivés de son produit phare. Les concepts fusent : Sim Earth consacré à la gestion d’une planète, Sim Tower qui se concentre sur la vie au sein d’un même bâtiment ou même un improbable Sim Ant, qui proposait de simuler la vie d’une fourmilière. Mais c’est bien Les Sims qui va remporter la mise début 2000.
Le concept est très simple : prendre un quartier de Sim City et zoomer jusqu’à arriver à l’unité de base : les habitants eux-mêmes, leur vie, leurs tracas, la gestion de leur foyer. Une sorte de maison de poupée virtuelle qui applique les principes du modélisme à la vie quotidienne. Le concept est aussi simple que son exécution est subtile et complexe : Les Sims est un des succès surprise du début des années 2000 et survit sans problème à l’arrêt de sa série mère, Sim City, disparue des radars il y a une dizaine d’années.
2 Une révolution dans la façon de concevoir l’IA dans les jeux vidéo
Dans les Sims, on n’interagit pas en permanence avec les membres du foyer que l’on gère. Une partie de la « magie » du jeu vient du fait que les Sims sont des êtres autonomes, qui vont agir en fonction de leurs besoins, de leurs impératifs et de leurs envies. Problème : il faut faire tourner cette programmation complexe sur de modestes PC de la fin des années 1990.
Le jeu va donc servir de véritable laboratoire de simulation d’intelligence artificielle pour ses développeurs, qui vont rivaliser d’idées pour simuler à moindre coût des comportements réalistes. Une astuce va par exemple consister à transformer certains objets (réfrigérateurs, micro-ondes) en « aimants » à Sims, pour que ces derniers n’oublient pas de manger régulièrement : une technique beaucoup plus efficace que de programmer un mécanisme de gestion de la faim chez chaque habitant de la maison ! Dans les versions ultérieures, les Sims auront un « cerveau virtuel » de plus en plus puissant, leur permettant par exemple de hiérarchiser de manière cohérente et dynamique leurs différents besoins ou de s’orienter de manière logique dans l’espace.
3 Plus de 200 millions de personnes s’y sont essayées
Dans les deux premières décennies du XXIᵉ siècle, un des enjeux majeurs de l’industrie du jeu vidéo a été de séduire le public occasionnel, voire le public entièrement non-joueur. Les tentatives ont été nombreuses : jeux éducatifs, casual gaming, motion gaming, applications sur mobile ou intégrées à des navigateurs… Mais aucune n’a mieux réussi que Les Sims, qui ont su trouver un bon équilibre entre jeu exigeant et jeu accessible au plus grand nombre.
De fait, chaque épisode a réussi l’exploit d’élargir sa base d’utilisateurs :
- 11 millions d’exemplaires pour le premier,
- 15 millions pour le second,
- 20 millions pour le troisième,
- 85 millions pour le quatrième.
Ce à quoi il faut ajouter les millions de joueurs ayant découvert la série grâce des épisodes annexes pour consoles de salon et consoles portables, et les dizaines de millions de pack d’expansion pour les différentes versions du jeu. Avec plus de 200 millions d’exemplaires vendus, Les Sims sont tout simplement une des franchises les plus populaires au monde.
4 Communautés phare du modding et du contenu généré par les utilisateurs
Cette popularité, on la doit en grande partie aux joueurs eux-mêmes, qui ont très tôt créé des mods et du contenu additionnel à télécharger gratuitement pour enrichir son expérience. Si le phénomène est très fréquent sur PC, il est absolument central dans l’univers des Sims, puisque des communautés entières se sont constituées sur le fait de créer du nouveau contenu pour le jeu.
Un phénomène si intense et si constitutif de l’expérience qu’il a été largement étudié par la recherche scientifique. Laquelle a notamment pu constater la manière dont ces communautés de créateurs se sont soudées et organisées durant des périodes de crises, comme dans le cas de la pandémie de 2020.
5 Electronic Arts a fini par trouver une cohérence éditoriale avec les Sims 4
La série n’a pas été exempte de polémiques, en particulier sur ce qui a pendant très longtemps été son modèle économique : la vente de contenu bonus (parfois assez anecdotique) à un prix qui pouvait être prohibitif… Le tout pour des expériences truffées de bugs. Les Sims 4 possède ainsi 17 extensions officielles, auxquelles il faut ajouter 12 packs de jeu, des dizaines de packs d’objets et de kits, etc.
Cependant, un compromis a fini par émerger entre les joueurs et Electronic Arts fin 2022, quand le jeu de base a finalement été rendu gratuit, le business model du jeu se basant désormais entièrement sur l’achat d’extensions par les fans. Une stratégie couronnée de succès, puisque le nombre de possesseurs du jeu aurait bondi de plus de 35 millions de joueurs depuis lors. Un succès qui a récemment conduit Electronic Arts à abandonner les projets de développement d’un cinquième épisode pour se concentrer sur l’amélioration du quatrième. Une situation cohérente avec les demandes d’une bonne partie de la communauté, toujours fidèle aux Sims 4.
6 Les Sims sont devenus un phénomène culturel
La saga a profondément marqué, et même davantage qu’on ne le pense, la culture contemporaine. Le « simlish » (la langue universelle à base d’emojis des sims) est devenu un élément important de la pop culture mondiale et a été utilisé dans de nombreux travaux de linguistique. La série a popularisé le jeu sur PC et l’émergence des jeux « bacs à sable ». Elle a lancé des débats sur la place des minorités dans le jeu vidéo.
Mais elle a aussi fait progresser le design des interfaces informatiques, et fait progresser l’art, la musique ou la philosophie de conception de logiciels de jeux. Les Sims font désormais partie de l’histoire culturelle mondiale. Vous n’avez peut-être jamais joué aux Sims, mais il est probable que, comme pour Mario, Sonic ou GTA, vous connaissiez la licence.
7 Les Sims ont un avenir radieux… Et un peu de concurrence !
On a appris en cette fin d’année 2024 que Les Sims 4 n’aurait vraisemblablement pas de successeur direct. Néanmoins, Electronic Arts a déjà annoncé pour 2025 une quantité industrielle de contenus allant de l’intégration de certaines créations de fans dans le jeu à des laboratoires de tests de nouveautés ou encore l’annonce d’un futur film hollywoodien consacré à la saga. Et ce au risque de provoquer une certaine fatigue, même chez les fans les plus acharnés.
2025 sera une année d’autant plus cruciale pour la licence que, pour la première fois, elle risque de se faire concurrencer de manière frontale par des productions d’un calibre similaire. Car, si la licence a déjà fait face à des propositions relativement semblables (on pense à Animal Crossing, Stardew Valley ou encore Terraria), le genre du « Sims-like » n’a jamais véritablement émergé. Certains concurrents, comme Life by You, ont même dû jeter l’éponge en 2024 avant même d’arriver sur le marché. Les choses pourraient changer avec l’arrivée de concurrents ambitieux comme Vivarium, Paralives et surtout InZoi, du studio coréen Krafton.