L’une des BD japonaises les plus attendues de ce début d’année s’est enfin révélée aux lecteurs assoiffés de sang (et d’encre). Imaginée par Shin’ichi Sakamoto, cette réinvention du mythe de Dracula est aussi déroutante qu’envoutante.
Près de 130 ans après sa naissance, Dracula continue de fasciner et d’inspirer des artistes du monde entier. Qu’il s’agisse de films, de séries ou de BD, le vampire est une figure incontournable du paysage culturel. Mais peut-on encore réinventer le personnage et le genre ? C’est l’objectif que s’est donné Shin’ichi Sakamoto, avec son manga (très attendu) #DRCL, midnight children.
Entre l’ombre et la lumière
Connu pour des œuvres telles qu’Ascension et Innocent, l’auteur japonais s’est lancé le défi de réécrire le mythe de Dracula en se posant la question : « Et s’il avait des enfants ? ». Tout en conservant des éléments propres à l’œuvre originale, le mangaka apporte des idées inédites et étonnantes, en nous plongeant au cœur de la jeunesse dorée anglaise du XIXe siècle.
Tout commence quand l’équipage d’un bateau russe découvre une étrange cargaison, remplie d’une terre à l’odeur infecte. Au fil des jours, des membres disparaissent, certains meurent, et d’autres voient leur corps se transformer. Quand le vaisseau arrive à destination, en Angleterre, il a tout d’une épave flottante. La police se lance à la recherche des survivants, et tombe sur une énorme bête à l’apparence d’un loup, qui bondit sur le rivage et disparaît dans la nuit.
Au même moment, quatre élèves du prestigieux établissement Whitby assistent à une scène terrifiante dans le cimetière de la ville : un de leurs camarades est attaqué par une créature ténébreuse. Mina Murray, l’unique fille de l’école, est la seule à affronter la bête pour sauver le jeune homme. Qui sont ces monstres ? D’où viennent-ils ? Quelles sont leurs intentions ? La bande d’adolescents va tenter de percer à jour leurs secrets.
Le premier tome pose les bases d’une histoire prometteuse. Il nous offre des dessins aux traits précis, mais à l’ambiance très sombre. #DRCL est un bel objet qui nous fait ressentir son potentiel horrifique dès les premières pages. Le mangaka ne cesse de jouer entre l’ombre et la lumière, passant tour à tour de tableaux gores, à des planches poétiques et lumineuses.
Des thématiques actuelles
Shin’ichi Sakamoto s’est inspiré des costumes d’Eiko Ishioka (qui a œuvré sur le Dracula de Francis Ford Coppola), ainsi que des mises en scène du ballet de Sergueï Polounine, et ça se ressent. Les décors, les mouvements et les vêtements des protagonistes sont millimétrés et très réalistes. Il parvient aussi à créer des personnages étonnants et déroutants qu’on n’arrive pas à cerner.
En réalité, #DRCL est bien plus profond qu’un simple manga horrifique. Il se démarque par son esthétique léchée, ses héros complexes, et les thématiques qu’il aborde. L’auteur parvient à moderniser le mythe en questionnant la place de la femme dans une société patriarcale, aborde la question du harcèlement, mais aussi de la peur des épidémies (qui est plus que jamais d’actualité). Vrai coup de cœur de la rédaction, l’œuvre de Shin’ichi Sakamoto a tout pour devenir un phénomène.