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La villa romaine abritant la seule peinture murale du Caravage estimée à près d’un demi-milliard d’euros

28 octobre 2021
Par Félix Tardieu
Le Caravage, "Jupiter, Neptune et Pluton", vers 1597-1599
Le Caravage, "Jupiter, Neptune et Pluton", vers 1597-1599 ©Domaine public / Wikimedia Commons

Édifiée à la fin du XVIe siècle, la Villa Aurora est le dernier vestige d’une grande propriété ayant appartenu au cardinal Francesco Maria del Monte (1549-1627), patron des arts et et des sciences qui prit entre autres sous son aile Galilée et Le Caravage.

Le Casino dell’Aurora, plus communément appelé Villa Aurora, va être mis aux enchères en janvier 2022 et est d’ores et déjà estimé à 471 millions d’euros (le prix de réserve étant fixé à 353 millions d’euros). Une somme qui paraît démesurée pour une bâtisse de seulement 260m2. Mais la Villa Aurora abrite plusieurs trésors de l’histoire de l’art qui constituent l’essentiel de sa valeur. Perchée dans les jardins de Salluste, historien romain du Ier siècle avant J-C, la Villa était à l’origine un pavillon de chasse, abritant une salle – possiblement un cabinet d’alchimie – que le cardinal del Monte fit décorer par Le Caravage à la toute fin du XVIe siècle. Jupiter, Neptune et Pluton est ainsi la seule peinture murale de la main du maître italien connue à ce jour. Ce décor représente les trois divinités les plus importantes de la mythologie romaine, chacune accompagnée de son attribut (l’aigle pour Jupiter, l’hippocampe pour Neptune et le cerbère pour Pluton), situées de part et d’autre d’une sphère représentant le cosmos. Si cette œuvre unique du Caravage nécessite des travaux de restauration, celle-ci a tout de même été estimée à 310 millions d’euros par l’historien de l’art Alessandro Zuccari.

Le Caravage, Jupiter, Neptune et Pluton, vers 1597-1599 © Domaine public, via Wikimedia Commons

Mais la Villa Aurora recèle d’autres joyaux qui expliquent une telle valorisation. Les décorations furent poursuivies par le cardinal Ludovico Ludovisi lorsqu’il racheta la propriété en 1621 : celle-ci comprend notamment une fresque murale commandée par Ludovisi au peintre baroque Le Guerchin (1591-1666) et au peintre maniériste Agostino Tassi, chargés de décorer une pièce par une représentation de la déesse de l’Aurore, d’où la villa tire aujourd’hui son nom. Entre l’architecture feinte de Tassi et le point de vue da sotto insu (en contre-plongée) du Guerchin, cette fresque en trompe-l’œil n’a rien à envier à celle du Caravage. D’autres salles décorées par Le Guerchin ou encore le Dominiquin (1581-1641), ainsi qu’une collection de sculptures antique font également partie du lot mis en vente. 

Le Guerchin et Agostino Tassi, Le char de l’Aurore, 1621- 1623 © Domaine public, via Wikimedia Commons

La Villa Aurora est restée dans la famille Ludovisi jusqu’à ce jour. Mais la mort du prince Nicolò Boncompagni Ludovisi en 2018 a déclenché un long conflit successoral qui a finalement abouti à la mise en vente du fameux Casino dell’aurora. Le site étant protégé par le ministère de la Culture, l’État italien se réserve par conséquent le droit de préempter le monument lors de sa vente aux enchères, ce qui pourrait éventuellement permettre de le rendre accessible au public dans un second temps. Mais la somme invoquée, qui dépassera peut-être le demi-milliard d’euros lors de la vente du 18 janvier prochain, constitue déjà un obstacle de taille à une éventuelle préemption.

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Article rédigé par
Félix Tardieu
Félix Tardieu
Journaliste