
Les dinosaures reviennent en salles ce 4 juillet 2025 avec « Jurassic World : Renaissance », septième volet de la licence « Jurassic Park » initiée par Steven Spielberg en 1993. A l’affiche cette fois-ci, Scarlett Johansson, Jonathan Bailey et Mahershala Ali. Mais alors, quel est le secret du succès de cette saga débutée il y a plus de trente ans maintenant ? Décryptage.
Jurassic Park prend vie sous la plume d’un auteur, Michael Crichton, qui, en 1990, nous conte l’histoire d’une petite île au nord du Costa Rica, abritant des dinosaures. Et c’est ici que le rêve commence. Trois ans après, Steven Spielberg s’empare de cette aventure fantastique et marque la décennie, en façonnant le film le plus rentable de tous les temps (1,057 milliard de dollars au box-office mondial), jusqu’à Titanic en 1997.
La suite, on la connaît : sortent Le Monde perdu : Jurassic Park en 1997 et Jurassic Park III en 2001. Puis viendra la trilogie des « World » : 1,672 milliard de dollars pour le premier volet en 2015 (le film le plus lucratif de toute la saga et l’un des plus gros succès de l’histoire du cinéma), 1,310 milliard de dollars pour le deuxième en 2018 et 1,001 milliard pour Jurassic World : Le monde d’après en 2022. En tout, les films Jurassic Park et Jurassic World ont cumulé plus de six milliards de dollars de recettes mondiales. Rien que ça.
En 2025, le monde jurassique revient une nouvelle fois en salles avec un septième opus intitulé Jurassic World : Renaissance. Mission sauvetage pour Zora (Scarlett Johansson) et Henry (Jonathan Bailey), qui vont effectuer des prélèvements sur les trois plus grands dinosaures ayant peuplé la Terre (mosasaure, titanosaure, quetzalcoatlus) afin d’obtenir un remède capable de sauver une partie de l’humanité.
Un genre révolutionnaire
Si l’univers Jurassic rencontre un succès aussi retentissant, c’est que son sujet effraie autant qu’il fascine. Dans l’imaginaire collectif, les dinosaures sont une forme de memento mori, une prise de conscience de la petitesse de l’être humain et de son insignifiance. C’est un lien entre le présent et le passé qui nous permet de ne pas perdre pied et de nous situer dans l’immensité de la vie. Mais aussi, c’est un appel de l’enfance, de l’aventure, du grandiose. Face à ces animaux disparus, on ne peut qu’avoir des étoiles dans les yeux.
Quand on tient un sujet de cette envergure, le succès est presque assuré, comme le prouve la licence Jurassic. Le premier opus, novateur dans ses représentations filmiques, a évidemment trouvé son public en donnant à voir le rêve de bien des enfants : un parc à dinosaures. À ceci près que les animaux ont eu la fâcheuse idée de croquer les visiteurs…
Dès ce premier épisode, la machine à rêves (et à cash) était lancée.
Jurassic Park, 1993, Copyright Universal Pictures
Le côté novateur laissera ensuite place à une forme d’héritage soigneusement préservé et perdurant au fil des décennies. L’ombre du premier Jurassic Park plane sur les épisodes suivants, parsemés de nombreuses références. En témoigne le scientifique Henry Wu (B. D. Wong), que l’on retrouve du premier au sixième film. Divers clins d’œil au premier volet font surface, des fusées de détresse utilisées pour « protéger les gosses » (4e et 7e), une banderole « When dinosaurs ruled the earth » qui ne cesse de réapparaître, de l’ambre posée sur le sceptre de Lockwood, des dilophosaures farceurs. Même le souvenir du torse iconique de Ian Malcolm a perduré à travers Xavier (David Iacono) dans le dernier long-métrage.
Des traces de son héritage qui semblent évidentes pour les fans de la licence et qui s’inscrivent dans la recette du succès de la saga.
Jurassic World : Rebirth, 2025, Copyright Universal Studios
Mais ce n’est pas tout : Jurassic Park travaille aussi son univers. La licence à la bande-son inoubliable cherche une véritable continuité entre ses épisodes qui s’imbriquent et se complètent. Loin des suites désuètes, les intrigues se succèdent : la création du parc, la découverte du site B, le sauvetage sur ce dernier, l’ouverture d’un nouveau parc sur les ruines de l’ancien, l’extraction des animaux de cette nouvelle île, leur remise en liberté, le démantèlement de Biosyn, et enfin dans ce dernier opus (en date), la découverte d’un site C.
Et pour compléter cette chronologie exemplaire, on répète des patterns : le second parc (Jurassic World) imitant le premier, du portail aux Jeep en passant par les vestiges laissés. Des décors qui semblent familiers tout comme les personnages qui les habitent. On retrouve la division de groupes avec d’un côté les expérimentés et de l’autre les amateurs, ou encore, d’une part, les protecteurs et de l’autre, les hommes appâtés par le profit.
Jurassic World, 2015, Copyright Universal Studios
Sans sombrer dans la redite, la saga parvient à proposer des digressions. Avec Jurassic World : Fallen Kingdom, signé par Juan Antonio Bayona en 2018, elle se réinvente, orientant le genre vers une forme de monstruosité à la limite de l’horreur. Ainsi, après cet opus, la saga quitte peu à peu sa passion animale pour se diriger de plus en plus vers le survival, comme le démontre pleinement le septième film.
Jurassic World : Fallen Kingdom, 2018, Copyright Universal Studios
Malgré ses différences de style, une constante guide le chemin de la licence : celle du spectaculaire, qui régit les plans, du plus ancien – avec la découverte sidérante des dinosaures par Sattler (Laura Dern) et Grant (Sam Neill) – au plus récent, avec l’immensité et la beauté du titanosaure observé par l’équipe de Zora et Henry.
Des personnages marquants
Si on vous demande qui sont les personnages marquants de la saga jurassique, vous nous répondrez immanquablement Grant (Sam Neill), Sattler (Laura Dern) et Malcolm (Jeff Goldblum). Cette sainte trinité du premier opus, qui apparaît de manière disparate dans les deux suivants, s’est offerte une belle fin avec leur grand retour dans Jurassic World : Le Monde d’après en 2022. Une façon de boucler la boucle et de faire sourire les fans de la première heure.
Mais, au-delà de ce trio culte, les longs-métrages ont aussi laissé place à des personnages attachants, profondément humains, comiques par leurs actes ou attendrissants par le regard qu’ils portent sur ces espèces disparues ramenées à la vie. De Eddie (Richard Schiff) et son « cache-en-l’air » (une tour d’où les scientifiques peuvent observer les dinosaures), à Kelly (Vanessa Lee Chester) en passant par le comique Franklin (Justice Smith) et les jeunes Timothy (Joseph Mazzello), Lex (Ariana Richards) et Maisie (Isabella Sermon), on peut dire que la franchise a su conquérir notre cœur.
Cerise sur le gâteau : notre Omar Sy national est venu ajouter une « French touch » aux côtés de Chris Pratt dans Jurassic World. Incarnant Barry Sembène, gardien des vélociraptors, on le retrouvera ensuite dans Jurassic World : Dominion en tant qu’agent de protection des dinosaures pour les services de renseignement français.
Les femmes ne sont pas en reste dans Jurassic Park. On retiendra bien sûr cette réplique culte du premier volet : « Dieu crée les dinosaures. Dieu détruit les dinosaures. Dieu crée l’Homme. L’Homme détruit Dieu. L’Homme crée les dinosaures. Les dinosaures mangent l’Homme. La Femme hérite de la Terre. »
Ainsi, la brillante paléobotaniste Ellie Sattler (Laura Dern) et la zoologiste passionnée Sarah Harding (Julianne Moore) incarnent toutes deux des personnages féminins à la fois courageux et ingénieux, affirmant avec force la place des femmes dans des univers traditionnellement dominés par les hommes. Dans Jurassic World : Renaissance, place à une certaine Zora (Scarlett Johansson), ancienne militaire spécialisée dans les opérations spéciales, à la fois déterminée et humaniste.
Si on peut noter quelques stéréotypes sexistes persistants, notamment le personnage de Claire (Bryce Dallas Howard) perché sur ses talons hauts dans Jurassic World, la saga a su présenter des héroïnes intelligentes et courageuses – avec la représentation pionnière, en 1993, d’une scientifique crédible – participant activement à l’action et aux décisions.
Jurassic Park, 1993, Copyright Universal Pictures
Toujours plus de dents
Comme le répond le scientifique Wu à Simon Masrani (Irfan Khan) dans Jurassic World : « You didn’t ask for reality, you asked for more teeth » (« Tu n’as pas demandé la réalité, tu as demandé plus de dents »). Et c’est sur ce même principe que fonctionne la licence.
On vous l’accorde, en 1993, le tyrannosaure impressionnait. Mais en 2025, il ne ferait plus vraiment le poids face à d’autres créatures numériquement générées, et ça, la licence Park l’a bien compris. Pour faire perdurer l’attrait des spectateurs, les longs-métrages ont su nous présenter des créatures toujours plus grosses, plus dangereuses, et souvent engagées dans des combats sanglants.
Les deux premiers films nous servaient timidement des vélociraptors et T-Rex. Jurassic Park III, quant à lui, nous faisait frissonner avec un spinosaure devenu culte, le plus grand animatronique de l’histoire du cinéma (13 mètres de long et 12 tonnes). La trilogie World se devait d’en faire encore plus. Jurassic World présentait alors le mosasaure et l’Indominous Rex, un animal génétiquement modifié, lui-même décliné en Indoraptor dans Jurassic World : Fallen Kingdom.
Jurassic World, 2015, Copyright Universal Pictures
Dans cette surenchère spectaculaire, Jurassic World : Renaissance laisse place à un monstre à la croisée d’Alien et de Jurassic Park, qui « fera même faire des cauchemars aux parents ». Une nouvelle créature sûrement inspirée par la filmographie de son réalisateur Gareth Edwards (Godzilla) qui donne un nouveau souffle à la suite de la licence.
En somme, si la saga parvient à façonner des bestioles aux dents toujours plus acérées, elle pourrait perdurer encore des années. Ça tombe bien, les fans de la licence ne sont pas prêts à laisser s’éteindre l’ère Jurassic.