Critique

À mes sœurs de combat : l’indispensable témoignage de Julie Meunier

04 février 2021
Par Léon
À mes sœurs de combat : l'indispensable témoignage de Julie Meunier

À mes sœurs de combat, c’est le récit de Julie Meunier, une jeune femme qui raconte sa cohabitation avec Jean-Yves, son cancer du sein. 18 mois de traitement qu’elle décrit objectivement, en abordant toutes les thématiques reliées de près ou de loin à la maladie. Sans aucun tabou et avec une grande sensibilité, cette éternelle optimiste nous livre un témoignage d’une sincérité rare.

A-mes-soeurs-de-combat julie meunier27 ans, l’âge maudit ?

C’est en 2014, en plein dans l’année de ses 27 ans, qu’on diagnostique un cancer du sein à Julie. Au bout de plusieurs examens médicaux, la maladie est confirmée, et la vie s’effondre pour cette jeune juriste en droit immobilier : pourquoi échapperait-elle au destin funèbre qui frappe les stars (Kurt Cobain, Amy Winehouse, Jimi Hendrix) dans l’année de leur 27 ans ?

Son récit avant tout celui d’un combat : celui qu’elle mène, aidée de la médecine et de son entourage, contre Jean-Yves. Jean-Yves, c’est ce petit caillou de 5 centimètres venu parasiter son sein gauche, et à qui Julie est bien décidée à faire la peau. On la suit dans sa lutte, de l’annonce du diagnostic aux réactions de sa famille, en passant par les multiples procédures médicales. S’ajoutent également des réflexions plus personnelles (et pourtant nécessaires) sur l’aspect psychologique d’une telle épreuve : comment, par exemple, le cancer a modifié son rapport à la féminité et au regard des autres.

Élargir le champ de la lutte

Julie Meunier ne n’est pas contentée de mettre à terre Jean-Yves : elle décide, quelques temps après, de mettre son énergie au profit d’une cause plus vaste : la déstigmatisation des malades. Faire en sorte que les personnes atteintes d’alopécie ou de pelade se sentent mieux dans leur corps, en leur proposant une alternative à la traditionnelle perruque : c’est l’objectif des Franjynes, la marque fondée par Julie. Sur son site, on retrouve des franges, des turbans, des bonnets, des bandeaux, et même des vêtements, conçus pour ses sœurs et frères de combat, les Franjynes.

« Rebooster le moral de ses protégées », voilà ce qui anime la jeune femme. Elle confie à ses « sœurs de combat » que le sourire a été son arme secrète contre le cancer. De l’optimisme, de la détermination, et surtout de l’entraide : le projet des Franjynes est un engagement fort, et un joli moyen d’accompagner les personnes malades dans cette « parenthèse désenchantée ».

Libérer la parole

« J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle. La mauvaise, c’est que vous avez un cancer … mais la bonne, c’est qu’on sait le traiter. »  Le verdict tombe, et on embarque aux côtés de Julie, de l’annonce du diagnostic jusqu’à sa déclaration en rémission. Avec elle, on apprivoise le jargon médical autour du cancer, on suit son quotidien, et on remet en question nos préjugés. Et la jeune femme met notamment l’accent sur des aspects de la maladie trop rarement traités, bien qu’importants.

Elle aborde, par exemple, le coût du cancer, en nous expliquant qu’une perruque vaut entre 125€ et 5000€. Cette somme conséquente met en lumière un fort clivage social, visible dès la salle d’attente de la chimiothérapie, en constatant la qualité des perruques que les malades peuvent s’offrir. De son côté, le cancer la place dans une certaine précarité : elle ne touche plus que la moitié de son salaire. Est abordée également l’épineuse question des prêts bancaires, dont le taux est conditionné par la maladie : il faut attendre 10 ans pour ne plus avoir besoin de mentionner un cancer.

La féminité fait partie des sujets qui la préoccupent. Un mois après sa première chimiothérapie, elle créé Feminity and J&Y, un blog où elle parle féminité et image de soi pendant les traitements. Maquillage, cheveux, corps, sexe, quotidien, turban, activité physique : cet espace lui permet de coucher sur papier toutes ses réflexions, en échangeant avec une communauté très soudée.

Et même si la jeune entrepreneuse ne perd pas sa bonne humeur, elle concède néanmoins avoir dit adieu à son insouciance. Un aveu qu’elle résume avec cette formule : « Combattre un cancer ne se résume pas à suivre des traitements lourds et subir des opérations. Combattre un cancer, c’est également apprendre à vivre avec stigmates parfois invisibles, difficiles à dompter et à comprendre, tout le reste de sa vie. Et faire le deuil du choix ».

Finalement, le message envoyé par Julie Meunier est limpide : il faut que les langues se délient, que les discours et témoignages sur le cancer se multiplient, afin de lever le voile sur un sujet encore trop tabou.

Parution le 20 janvier 2021 – 288 pages

À mes soeurs de combat, Julie Meunier (Larousse) sur Fnac.com

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