Que vous soyez une coccinelle, un pervers pépère, un gai-luron, quelqu’un qui scie la branche sur laquelle il est assis ou qui reçoit des pommes sur la tête, vous êtes forcément en deuil. Le dernier gag de Gotlib est certainement le moins bon de sa carrière : il nous a quittés à l’âge de 82 ans ce 4 décembre. Il était l’un des derniers géants de la BD humoristique francophone.
Un grand enfant…
Si le monde de Gotlib est infiniment coloré, jouissif et délirant, la vie de Marcel Gotlieb (son vrai nom), né à Paris un 14 juillet n’a pas toujours été rose. En février 1945, alors qu’il a vécu caché une partie de la guerre, il perd son père, tué au camp de concentration de Buchenwald. Placé dans un orphelinat, c’est tout jeune homme qu’il se découvre une passion pour le dessin. En 1959 commence sa carrière de dessinateur. Il illustre à cette époque divers ouvrages pour enfants. Trois ans plus tard, dans le journal Vaillant, ses premières bandes dessinées commencent à susciter l’intérêt, jusqu’à la création de Gai-Luron, en 1965, chien cabot issu de la série Nanar et Jujube.
…qui fera toujours rire les adultes
C’est à la même époque que Gotlib rencontre Jacques Lob et René Goscinny et commence sa collaboration légendaire au sein du magazine Pilote. C’est là qu’il crée, avec Goscinny, les Dingodossiers (dont il reprendra seul la mise en œuvre avec pour titre La Rubrique-à-brac). Le style graphique très carré vu de loin (et très irrévérencieux dans le détail), avec la fameuse coccinelle (destinée à remplir les espaces vacants et à assurer le contrepoint de « l’intrigue ») apparaît à ce moment, prouvant toute la vigueur créatrice d’un dessinateur et scénariste inventif, capable de pousser l’humour jusqu’au cinquante-septième degré sans sourciller.
Immortel
Par la suite, Gotlib sera à l’origine de deux journaux de BD humoristique restés fameux : L’Echo des savanes (avec Brétecher et Mandryka) puis Fluide Glacial (avec Alexis et Jacques Diament). Là et dans d’autres publications célèbres des années 1970 (Rock’n’Folk notamment), l’artiste invente les personnages restés associés à sa légende : le scout « mélomane » Hamster jovial, l’excentrique Pervers pépère, et le héros anti-antifrance Superdupont. Des personnages singuliers devenus aujourd’hui orphelins, mais qui restent à jamais les enfants d’un des monstres sacrés de la bande dessinée, touche-à-tout de génie et inventeur, en quelque sorte, de la modernité dans le neuvième art.
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