Isolement social, dépression, douleurs… Face à tous ces problèmes, plusieurs entreprises voient la réalité virtuelle comme la solution pour les atténuer et la mettent à disposition des personnes âgées dans divers établissements.
Contrairement à ce que l’on peut penser, les technologies et les seniors peuvent faire bon ménage. Bien que leurs usages soient plutôt associés aux jeunes, ils ont aussi leur place auprès des personnes âgées. La réalité virtuelle (VR) fait partie de ces technologies dont l’utilisation peut être bénéfique auprès de cette partie de la population. Plusieurs entreprises en France et outre-Atlantique parient dessus pour aider les seniors et la déploient au sein de maisons de retraite, d’EHPAD ou encore de résidences autonomie.
Plusieurs études ont en effet démontré que la VR peut servir à réduire des troubles tels que l’anxiété et la dépression. À côté de cela, les startups affirment qu’elle permet d’encourager le lien social chez les personnes âgées et donc de lutter contre l’isolement. La réalité virtuelle est ainsi vue comme un outil à visées sociale et thérapeutique.
La réalité virtuelle, un outil pour lutter l’isolement social
Ayant pour objectif de favoriser le lien social chez les seniors, les entreprises leur proposent des séances de réalité virtuelle en groupe. Ces immersions présentent l’avantage d’inciter les participants à dialoguer après avec des contenus autour de différents thèmes comme la nature, la culture et le voyage. La société française FeelU a par exemple développé des expériences permettant aux personnes âgées de visiter des lieux et des immersions autour de la sensation, avec la possibilité de faire virtuellement du parapente ou de la plongée avec des raies manta. « Chez FeelU, on a l’habitude de dire “7 minutes de voyage, 1h30 de discussion”, avec la personne qui va être immergée dans un décor qu’elle connaît, qu’elle a connu ou qu’elle va découvrir et ça va tout de suite raviver des souvenirs positifs. Ça va l’inciter à partager son expérience et les souvenirs qui lui sont remontés dès qu’elle va retirer le casque », explique David Verrière, directeur technique de l’entreprise.
Non seulement, ces firmes proposent aux seniors de vivre ensemble ces immersions, mais ils peuvent aussi de les partager avec des membres de leur famille. « Que ce soit en EHPAD ou en résidence autonomie, il y a souvent des visites et les équipes d’animation se servent de FeelU pour faire des voyages partagés, avec le petit-fils qui va par exemple faire du parapente en même temps que son grand-père et ils vont pouvoir échanger sur ce qu’ils sont en train de voir », indique David Verrière. Cela permet aussi de favoriser le lien social avec des discussions lors de la séance et après.
Tout cela est réalisable sans apprentissage nécessaire de la part des seniors qui ont juste à mettre le casque VR sur leur tête. Souhaitant simplifier l’utilisation de la VR chez les personnes âgées, les entreprises misent sur des animateurs qu’elles forment pour piloter les séances à l’aide d’une tablette sur laquelle ils peuvent notamment apercevoir ce que voient les résidents.
Une alternative aux médicaments pour les troubles et la douleur
Si plusieurs études ont démontré que la réalité virtuelle peut s’avérer utile face à des troubles comme l’anxiété et la dépression, les sociétés se servant de cette technologie pour aider les personnes âgées mènent aussi leurs propres expérimentations pour vérifier les capacités de leurs outils. FeelU a ainsi travaillé avec des psychologues afin de voir si les contenus qu’elle propose aident à réduire l’anxiété et la dépression. « Ils ont montré qu’à raison d’une séance par semaine, les personnes qui voyageaient virtuellement avec des casques étaient moins déprimées, moins anxieuses que des personnes ne le faisant pas », déclare le directeur technique de l’entreprise, ajoutant que le fait de favoriser le lien social débouche aussi sur une réduction de ces troubles.
Comme d’autres sociétés spécialisées dans ce domaine, FeelU met à disposition des contenus axés sur la relaxation afin de lutter contre ces maladies. Cette catégorie d’immersions inclut de la méditation pour aider les résidents ainsi que les soignants à gérer leur stress. Parmi ces expériences figurent des programmes guidés de sophrologie avec lesquels ils peuvent choisir l’environnement où ils veulent méditer, la durée, mais aussi d’intégrer un petit fond musical ou pas.
La réalité virtuelle peut ainsi permettre de réduire un peu la prise de médicaments tels que les antidépresseurs. C’est aussi le cas pour la douleur. Aux États-Unis, la société AppliedVR a développé un système immersif capable de réduire la douleur chez les patients âgés de plus de 18 ans et atteints de lombalgie chronique avec la thérapie cognitivo-comportementale. Traitant les maux de dos par la relaxation et la distraction, ce système peut être commercialisé dans le pays depuis qu’il a obtenu l’autorisation de l’agence américaine des médicaments (FDA) en novembre dernier. En France, les entreprises spécialisées cherchent aussi à utiliser la VR comme alternative aux médicaments pour la douleur. « Des soignants se servent de FeelU pour détourner l’attention lors des soins douloureux, notamment pour les changements de pansements d’escarres. Ils suppriment les antidouleurs et font une séance avec le casque pour changer le pansement sans que la personne n’ait mal alors qu’elle n’a pas pris de médicaments », explique David Verrière. Selon le directeur technique, cette méthode fonctionne comme de l’hypnose afin de réduire la prise médicamenteuse.
Une utilisation accompagnée de risques
Bien que la réalité virtuelle soit bénéfique aux personnes âgées pour plusieurs raisons, un autre aspect est à prendre en compte : les effets secondaires de cette technologie tels que les nausées, les vertiges ou la fatigue. Cela ne concerne d’ailleurs pas seulement les seniors, avec des personnes considérées comme sensibles (femmes enceintes, individus ayant le mal de transports, etc.) susceptibles de souffrir de ces effets indésirables dès les premières minutes d’utilisation. Les entreprises sont conscientes de ces impacts sur la santé et cherchent à les prévenir à l’aide des contenus qu’elles développent : « Dans les premières années, la réalité virtuelle avait mauvaise presse, on disait que ça rendait malade, mais la plupart des expériences proposées étaient souvent des montagnes russes ou des choses bougeant vraiment dans tous les sens et n’étant pas très agréables », indique David Verrière.
Le directeur technique de FeelU précise même que les premiers contenus de l’entreprise rendaient un peu malade les personnes âgées, mais qu’elle sait désormais où positionner la caméra ou encore ce qu’il faut filmer pour éviter l’apparition de vertiges chez ses utilisateurs. Il explique cependant qu’une personne sur dix ne supporte pas les casques VR en général car elle a le mal de mer ou le mal des transports, rendant l’expérience désagréable pour elle.