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Méta-photographie : Thomas Ruff retrace l’histoire de la photographie au MAMC+

16 mai 2022
Par Apolline Coëffet
Thomas Ruff, neg◊marey_02, 2016, C Print, 22,4 × 31,4 cm. Collection de l’artiste
Thomas Ruff, neg◊marey_02, 2016, C Print, 22,4 × 31,4 cm. Collection de l’artiste ©ADAGP, Paris 2022

Jusqu’au 28 août, le Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole organise la toute première rétrospective consacrée au photographe allemand en France.

« Je pense que la photographie est un médium très compliqué, même si cela semble être simple », déclare Thomas Ruff. En plus de quarante ans de carrière, le photographe allemand a porté un regard interrogateur sur son médium de prédilection. Au fil des ans, il a créé des milliers d’œuvres à partir de clichés préexistants, certains capturés aux prémices de la photographie, d’autres saisis par les dernières technologies d’imagerie militaires en service. En explorant divers procédés techniques, l’artiste esquisse ainsi une histoire de la photographie unique en son genre. Cette Méta-photographie – idéale pour s’initier est au 8e art – est à découvrir jusqu’au 28 août prochain au MAMC+ de Saint-Étienne.

Une histoire abrégée du 8e art

Pour la toute première fois en France, une centaine de clichés de Thomas Ruff – issues de dix-sept séries, dont une inédite – est regroupée dans un lieu institutionnel. Entamées dès les années 1980 pour les plus anciennes, elles témoignent de cette fascination de l’image qui anime le photographe depuis ses débuts. Des négatifs analogiques sur plaque de verre ou sur papier datant du milieu du XIXe siècle aux observations satellites de la NASA, sans oublier les photogrammes (une technique qui consiste à immortaliser un sujet grâce à du papier photosensible) des années folles ou encore la compression de documents JPEG… Thomas Ruff n’a épargné aucune méthode.

En une dizaine de salles, l’exposition convie visiteurs et visiteuses à s’immiscer dans cette histoire abrégée du 8e art. Les différentes séries ne suivent pas la chronologie du photographe, mais celle du médium. Elle rappelle alors qu’il s’agissait avant tout d’un outil scientifique, dénué de toute ambition artistique. Tirages archéologiques, études militaires, portraits-robots, images spatiales… Les expérimentations de Thomas Ruff réinventent ces conceptions originelles en les ancrant dans nos attentes contemporaines. 

Thomas Ruff, tripe_09 Amerapoora. My-au-dyk Kyoung, 2018, C Print, 80 × 103 cm. Collection de l’artiste©ADAGP, Paris 2022

Des problématiques qui composent notre quotidien

Au-delà des capacités technologiques et des fonctions de l’image, le photographe se livre, en creux, à un questionnement sous-jacent : celui de l’objectivité du médium. Son travail artistique revêt alors une autre dimension, presque scientifique, qui se superpose au matériau qu’il étudie. Méta-photographie s’achève ainsi sur deux salles dans lesquelles les clichés exposés entrent en résonnance avec ceux de Thomas Ruff. Saisis par de parfaits anonymes ou dans le cadre de documentaires, ils semblent se libérer du regard partial. Mais il n’en est rien.

Amateurs et connaisseurs ne pourront être insensibles à ces problématiques qui composent notre quotidien. Et ce, d’autant plus en période de crises sanitaires, économiques et géopolitiques. La rétrospective du MAMC+ s’impose finalement comme une occasion toute trouvée pour (re)découvrir l’histoire de la photographie tout en repensant sa manière d’appréhender les informations visuelles que nous consommons chaque jour.

Méta-photographie, au Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole (MAMC+), jusqu’au 28 août 2022.

Thomas Ruff, phg.01_I, 2013, C Print, 255 × 185 cm. Collection de l’artiste©ADAGP, Paris 2022
Thomas Ruff, anderes Porträts Nr. 122/138, 1994/1995, Sérigraphie sur papier, 52 × 37 cm. Collection de l’artiste©ADAGP, Paris 2022
Article rédigé par
Apolline Coëffet
Apolline Coëffet
Journaliste