Critique

Bubble : quand La Petite Sirène rencontre brillamment l’art du parkour

28 avril 2022
Par Alexandre Manceau
Phénomène surnaturel, voltige, romance et poésie : le cocktail détonnant de “Bubble” fait mouche.
Phénomène surnaturel, voltige, romance et poésie : le cocktail détonnant de “Bubble” fait mouche. ©Netflix

Orchestré par un studio et une équipe créative experte dans l’anime, Bubble réalise un parcours (presque) sans faute.

Disponible depuis le 28 avril sur Netflix, Bubble nous plonge dans un monde inondé de bulles ayant modifié les lois de la gravité, et plus particulièrement à Tokyo, qui s’est retrouvée coupée du monde. Dans ce contexte particulier, la ville nippone est devenue un terrain de jeu pour les adeptes de parkour qui organisent des affrontements. Tout bascule lorsque Hibiki, jeune prodige, est propulsé hors de sa zone de confort mais sauvé par Uta, une jeune fille aux pouvoirs mystérieux. Cette rencontre va les mener à une révélation qui changera le monde.

Une équipe de choc pour mener une aventure étonnante

Derrière cette production, on retrouve une équipe habituée à l’anime : le studio Wit, qui a notamment produit les trois premières saisons de L’Attaque des Titans. Malgré des aventures qui ne se concluront qu’en 2023, l’ombre d’Eren Jäger est très présente dans Bubble. Le réalisateur n’est autre que Tetsurô Araki, connu pour son travail sur les films et séries L’Attaque des Titans et Death Note. Du côté de la distribution technique, le scénario est à mettre au crédit de Gen Urobuchi (Mahou shoujo Madoka magica, Psycho Pass) et le design des personnages à Takeshi Obata, qui a lui aussi œuvré sur Death Note. Quant à la bande-son, c’est Hiroyuki Sawano, également familier de l’anime L’Attaque des Titans, qui compose les musiques.

Si les dialogues ne sont pas son point fort, Bubble peut compter sur plusieurs moments d’intense poésie.

Enfin, côté doublage, on retrouve Mamoru Miyano (The Seven Deadly Sins, Belle), Yuki Kaji (Jojo’s Bizarre Adventure), Tasuku Hatanaka (My Hero Academia) et Jun Shison dans le rôle du héros Hibiki. Une chose est sûre, Wit Studio a voulu réunir la crème de la crème de l’anime pour Bubble, et ça se ressent. Le film est beau, coloré et il ne faut pas longtemps pour se retrouver plongé dans cet univers apocalyptique, où Tokyo est une ville immergée et coupée du monde. Les décors sont basiques (à savoir des toits et gratte-ciels inoccupés ou transformés en terrains de jeu), mais le tout confère au film une ambiance digne de Je suis une légende, avec une touche plus colorée et poétique.

Un travail remarquable sur l’animation…

Face à un catalogue Netflix toujours plus important, et en attendant une série dans l’univers de Tekken, Bubble se démarque d’abord par son scénario. Ici, pas de monstres surnaturels ou de personnages avec des superpouvoirs. Les héros sont une bande de jeunes hommes accompagnés d’un ancien champion de parkour et d’une scientifique. Leur seule préoccupation est de survivre, en essayant de remporter des battles de parkours sur les toits désaffectés d’un Tokyo immergé. Face à un rythme parfois inégal, entre action et contemplation, les scènes de parkour sont l’une des grandes réussites de ce film. Portées par des animations que l’on retrouve déjà sur L’Attaque des Titans, les scènes de courses et d’acrobaties sont impressionnantes et la sensation de voltige derrière notre écran est on ne peut plus réaliste.

Rarement un anime n’a aussi bien retranscrit cette sensation de voltige et d’acrobaties.

… mais plus dispensable sur la psychologie des personnages

À mi-chemin entre des Yamakasis et des ninjas de Konoha, les héros de Bubble symbolisent eux-mêmes cette envie de légèreté qui flotte dans le film. Une symbolique bien plus poussée que les personnalités, toutes plus clichées les unes que les autres. Talentueux mais solitaire et marqué par un drame, Hibiki est le héros de ce film. À ses côtés, l’équipe de parkour se compose de personnages déjà-vus, comme le leader autoritaire et méfiant, le plus jeune particulièrement turbulent, sans oublier une scientifique qui s’illustre par son côté maternel (entre accès de colère et soutien de taille), et un mentor toujours là pour prodiguer des conseils et des phrases à double sens.

Des personnages attachants qui brillent plus par leur souplesse que par leur originalité.

Comment revisiter un célèbre conte avec mæstria

Mais ce qui rend Bubble si particulier, c’est le personnage d’Uta. La jeune fille est apparue de nulle part pour sauver Hibiki lors d’une chute et elle va se révéler être une équipière de choix dans les battles de parkour. Mutique et aussi agile qu’un chat, elle cache un secret, qu’il est évidemment bon de préserver. Plutôt que d’axer l’intégralité de son récit sur l’étrange catastrophe qui a frappé Tokyo, le film prend une direction surprenante et rafraîchissante dès l’arrivée de ce personnage. Telle Ariel dans La Petite Sirène, la jeune fille se retrouve projetée dans un monde qu’elle ne connaît pas et elle est attirée par un jeune homme. Cette revisite moderne et sportive du célèbre conte d’Andersen, qui est d’ailleurs ouvertement cité le temps d’une scène ou deux, permet à Bubble de s’offrir une bulle de poésie, le tout porté par une musique sobre, mais efficace. Le final pourra laisser certains spectateurs perplexes devant des questions non résolues, mais le film de Tetsurô Araki est à coup sûr une pause pleine de légèreté et de voltige à ne pas manquer.

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Alexandre Manceau
Alexandre Manceau
Journaliste
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